Environnement

Les oies arctiques migrent plus vite pour s’adapter au réchauffement climatique, mais en vain

Les oies de l’Arctique, perturbées par le réchauffement climatique, ont réduit leur temps de migration vers le Nord, ce qui augmente la mortalité des jeunes oisillons.

Bernaches nonnettes

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Cap sur l’Arctique ! Chaque année, au cours du mois de mars, les bernaches nonnettes (Branta leucopsis), des sortes d’oies, quittent les régions tempérées et migrent vers le Nord pour se reproduire. Or, le réchauffement climatique est beaucoup plus marqué dans les régions arctiques que dans les régions tempérées, avec des printemps de plus en plus précoces ces dernières années.

Une équipe de l’Institut néerlandais d’écologie et de l’université d’Amsterdam menée par Bart Nolet s’est intéressée à la façon dont les bernaches s’adaptent à ces changements. Les oies ne peuvent pas savoir à distance si le printemps arrivera plus tôt dans les régions arctiques, avant d’entamer leur migration. Elles partent donc pour les terres gelées au mois de mars, comme d’habitude. L’équipe s’est par contre aperçue que les bernaches accélèrent en cours de route, lorsque le printemps est en avance dans les terres arctiques, et qu’elles peuvent alors arriver sur place jusqu’à 13 jours plus tôt. Les oies semblent donc capables de juger au cours de leur périple vers le Grand Nord, à partir de repères environnementaux, si le printemps est précoce dans l’Arctique. Les oiseaux migrateurs raccourcissent leur voyage en effectuant moins de pauses pour se ravitailler (en sautant notamment une escale importante dans la mer Baltique). Elles arrivent donc à temps dans l’Arctique pour le début du printemps, de sorte à pouvoir profiter de la période où la nourriture est abondante et ainsi assurer aux futurs poussins une bonne croissance.

Si cette adaptation au changement climatique peut paraître a priori favorable, il n’en est, en réalité, malheureusement rien. Le problème est que les oies ne s’arrêtent pas assez longtemps pour constituer des réserves en cours de route et ne peuvent pas démarrer l’ovogenèse (la fabrication de leurs œufs) durant la migration. En temps normal, ces escales de ravitaillement sont indispensables pour que les oiseaux puissent pondre dès leur arrivée à destination. Lors des printemps précoces, les oies doivent d’abord consacrer du temps à se nourrir en arrivant sur place, afin de reconstituer leurs réserves et de déclencher la production de leurs œufs. La ponte a donc finalement lieu au même moment qu’avant et il en va de même pour l’éclosion des œufs. Mais comme le pic de nourriture est avancé avec l’arrivée précoce du printemps, les oisillons naissent à la fin de cette période favorable, et nombre d’entre eux meurent de faim.

Ces oies arctiques ne savent donc plus sur quel pied danser. Mais ne perdons pas espoir : comme d’autres espèces d’oiseaux, elles finiront peut-être par s’adapter en partant plus tôt de nos latitudes pour arriver à temps ou en arrêtant de migrer pour se reproduire dans nos régions tempérées. Comme le disait Jean de La Fontaine : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point ! »

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Claire Heitz

Claire Heitz est journaliste stagiaire pour Pour la science et Cerveau et Psycho. 

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Références

T. Lameris et al., Artic Geese Tune Migration to a Warming Climate but Still Suffer from a Phenological Mismatch, Current Biology, vol. 28, pp. 1-7, 2018.

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