“Nous sommes en 2018, pas en 1984 !” lance Nicolas Hatton en référence au célèbre roman de George Orwell et à la figure de Big Brother, devenue le symbole de tout régime policier et totalitaire, dans le quotidien The Guardian.
The3million, l’association qu’il copréside et qui défend les citoyens européens installés au Royaume-Uni, vient de lancer une action en justice contre le gouvernement britannique, conjointement avec une autre organisation qui milite, elle, pour les droits et libertés numériques, Open Rights Group.
En cause, une disposition de la loi sur la protection des données personnelles (Data Protection Act) adoptée par le Parlement en mai 2018.
Une disposition “illégale, inutile et discriminatoire”
Cette loi, censée transposer le Règlement général sur la protection des données européen (RGPD), stipule en fait que les dispositions du RGPD ne s’appliqueront pas “au traitement de données à caractère personnel à l’une des fins suivantes : maintien d’un contrôle de l’immigration efficace, enquête ou détection d’activités susceptibles de compromettre le contrôle efficace de l’immigration”.
En vertu de cette exemption, un citoyen européen résidant légalement au Royaume-Uni qui se verra refuser le statut de résident permanent ne pourra pas avoir accès aux données personnelles le concernant détenues par le Home Office – le ministère de l’Intérieur britannique.
Selon l’avocate Rosa Curling, cette disposition est “illégale, inutile et constitue une transgression disproportionnée” des droits fondamentaux relatifs à la protection des données.
Selon l’avocate,
il n’est pas admissible, souligne-t-elle, qu’un système à deux poids, deux mesures soit instauré en ce qui concerne les droits relatifs aux données personnelles.”
Les deux associations soutiennent que la disposition en question est contraire à l’article 23 du RGPD et à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et qu’elle est discriminatoire.
Cette action en justice est lancée alors que le gouvernement britannique teste pour la première fois, à Liverpool, le nouveau système d’enregistrement qui devrait devenir obligatoire pour tous les citoyens européens, relève The Guardian.
Le Home Office espère que 4 000 volontaires se soumettront au processus de candidature en ligne pour décrocher le nouveau statut de résident (“settled status”).
L’indépendance et la qualité caractérisent ce titre né en 1821, qui compte dans ses rangs certains des chroniqueurs les plus respectés du pays. The Guardian est le journal de référence de l’intelligentsia, des enseignants et des syndicalistes. Orienté au centre gauche, proeuropéen, il se montre très critique vis-à-vis du gouvernement conservateur.
Contrairement aux autres quotidiens de référence britanniques, le journal a fait le choix d’un site en accès libre, qu’il partage avec son édition dominicale, The Observer. Les deux titres de presse sont passés au format tabloïd en 2018. Cette décision s’inscrivait dans une logique de réduction des coûts, alors que The Guardian perdait de l’argent sans discontinuer depuis vingt ans. Une stratégie payante : en mai 2019, la directrice de la rédaction, Katharine Viner, a annoncé que le journal était bénéficiaire, une première depuis 1998.