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Faire pousser des fraises en hiver grâce aux bitcoins

Heatmine a un centre de données à Lévis, mais veut désormais décentraliser ses activités

Heatmine a un centre de données à Lévis, mais veut désormais décentraliser ses activités

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Radio-Canada

Les pertes de chaleur liées à l'industrie des monnaies virtuelles, comme le bitcoin, sont immenses au Québec. Une jeune entreprise de Lévis veut corriger le problème avec une technologie qui récupère 90 % de ces rejets thermiques pour chauffer des bâtiments.

Un texte d’Alexandre Duval

L’entreprise Heatmine teste actuellement sa technologie avec la nouvelle serre du Caveau à légumes, un producteur maraîcher situé à Neuville.

À l'arrière de la serre, la compagnie a installé un gros boîtier, qui fait environ deux fois la taille d'un réfrigérateur.

La serre du Caveau à légumes et le boîtier de Heatmine qui servira à la chauffer

La serre du Caveau à légumes et le boîtier de Heatmine qui servira à la chauffer

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Dans ce boîtier, 63 processeurs informatiques produisent de la monnaie virtuelle. Ils fonctionnent à plein régime, jour et nuit, et dégagent d'importantes quantités de chaleur.

Mais plutôt que de la rejeter dans l’air ambiant, Heatmine l’emmagasine. Chaque processeur est branché à des tuyaux, dans lesquels circule du glycol.

La chaleur dégagée par les processeurs informatiques est emmagasinée par du glycol qui circule dans des tuyaux

La chaleur dégagée par les processeurs informatiques est emmagasinée par du glycol qui circule dans des tuyaux

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Le liquide est ensuite conservé à 65 degrés Celsius dans un réservoir thermique d’une capacité de 60 gallons.

Lorsque le système sera parfaitement opérationnel, le glycol sera transporté par une conduite souterraine, qui ira ensuite chauffer le plancher de la serre.

Le réservoir conserve le glycol à 65 degrés Celsius dans le système de Heatmine

Le réservoir conserve le glycol à 65 degrés Celsius dans le système de Heatmine

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Cette technologie a déjà fait l’objet de quelques essais sur des piscines et des entrepôts, mais jamais sur une aussi imposante infrastructure, soutient le président de Heatmine.

C'est le premier gros test, parce qu'une serre, ça a besoin d'énormément de chaleur. Ce n'est pas isolé comme un bâtiment ou un entrepôt.

Une citation de Jonathan Forte, président de Heatmine

Un virage à saveur de fraises

Pour le propriétaire de la serre, Guy Béland, il s'agit d'un virage à 180 degrés. Plutôt que de produire uniquement l’été, il pourra bientôt faire pousser des fraises en plein hiver.

Comme le président de Heatmine est son propre gendre, M. Béland se lance dans l'aventure avec une confiance aveugle. Il est certain qu'il fera d'importantes économies.

« J'ai un partenaire qui a une serre et, au mois de novembre, juste en propane, ça lui a coûté 12 000 $. Ça ne coûtera jamais ça avec les équipements de Jonathan! », assure-t-il.

Guy Béland, propriétaire du Caveau à légumes

Guy Béland, propriétaire du Caveau à légumes

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Une solution gagnant-gagnant

Pour chauffer complètement la serre, il faudra environ 300 processeurs informatiques, soit l’équivalent de 5 boîtiers comme celui qui est déjà en place.

Heatmine compte faire de ce modèle sa marque de commerce. Contrairement aux centres de données traditionnels, l'entreprise veut décentraliser ses actifs.

En réalité, on le voit un peu comme répartir notre risque et ne pas avoir toute notre installation en un seul point.

Une citation de Jonathan Forte, président de Heatmine
Jonathan Forte, président de Heatmine

Jonathan Forte, président de Heatmine

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

Le modèle d'affaires est symbiotique : Heatmine diminue la facture d'électricité de ses partenaires, et en retour, il produit de la monnaie virtuelle sans payer de loyer.

Selon M. Forte, ce modèle d'affaires sera même avantageux pour Hydro-Québec lorsque la demande d'énergie sera forte, comme les matins de grand froid.

Ce qu'on offre, c'est de l'énergie qui allait de toute façon être utilisée par après sur un système de chauffage traditionnel.

Une citation de Jonathan Forte, président de Heatmine

Au moins 4,6 millions de lave-vaisselle

L’industrie des monnaies virtuelles et des chaînes de blocs en général pose tout de même d’importants défis énergétiques pour Hydro-Québec. D’ailleurs, aucun nouveau projet n’est actuellement autorisé dans la province.

Depuis un an, Hydro-Québec a reçu des demandes totalisant 18 000 MW. De ce nombre, les projets jugés « sérieux » par la société d’État représentent environ 6000 MW.

Si uniquement ces projets sérieux étaient approuvés, ce serait l’équivalent de 4,6 millions de lave-vaisselle fonctionnant sans arrêt au Québec, selon le porte-parole d'Hydro-Québec, Jonathan Côté.

Dans le boîtier de Heatmine, chacun des sept tiroirs compte neuf processeurs informatiques comme ceux-ci

Dans le boîtier de Heatmine, chacun des sept tiroirs compte neuf processeurs informatiques comme ceux-ci

Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL

À titre comparatif, l'industrie québécoise des pâtes et papiers représente une demande énergétique de 1800 MW. Malgré tout, Hydro-Québec semble reconnaître la valeur d’un projet comme celui de Heatmine.

« Économiquement, à capacité de branchement égale, les projets qui valorisent la chaleur sont plus compétitifs que ceux qui rejettent tout simplement leur chaleur par la fenêtre en pure perte », note M. Côté.

Voir plus grand

Le projet de Heatmine qui s'amorce à Neuville n’est qu’un début, selon le président de la compagnie.

Sur cinq ans, on vise un total d'un million de processeurs sur notre réseau, qui représenteraient environ 1 % de la chaleur dont le Québec a besoin.

Une citation de Jonathan Forte, président de Heatmine

Quant à M. Béland, si les résultats sont concluants, il entreprendra la construction d’autres serres chauffées par Heatmine. Il n’a qu’un objectif en tête : détrôner les fraises que le Québec importe en hiver.

« Elle n'a pas un bon goût, elle n'est pas sucrée. Moi, je veux faire une fraise pour me démarquer de ces fraises-là en période hivernale », résume-t-il.

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