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Affaire Benalla: le mail de l’Elysée omis par le Sénat

Alexandre Benalla face à la commission d'enquête du Sénat.

Alexandre Benalla face à la commission d'enquête du Sénat. - Alain JOCARD / AFP

La présidence de la République avait transmis à la commission d’enquête du Sénat un courrier électronique montrant son respect des procédures dans la demande de port d’arme de Benalla. Cette pièce n’a pas été jointe au rapport final.

Le Sénat a-t-il occulté une pièce favorable à l’Elysée dans son rapport sur l’affaire Benalla? Début août 2018, la présidence de la République a transmis à la commission d’enquête dirigée par Philippe Bas un mail de Patrick Strzoda, directeur de cabinet du chef de l’Etat adressé au préfet de police de Paris.

Dans ce courrier électronique, dont BFMTV.com s’est procuré une copie, il lui demande de statuer sur le port d’arme du chargé de mission, "dans le strict respect de textes". La présidence de la République a porté ce document au dossier dans l’objectif de prouver sa bonne foi et son respect des procédures. Mais il ne figure pas dans les annexes du rapport sénatorial rendu public le 20 février. Sa teneur est certes mentionnée dans un chapitre, mais partiellement et au conditionnel. 

Dans ses conclusions, la commission a jugé que l’Elysée avait fait pression sur la préfecture de police afin qu’Alexandre Benalla obtienne cette autorisation.

"Dans le strict respect des textes"

Que dit ce mail? Le 10 octobre 2017, à 22h30, Patrick Strzoda s’adresse ainsi au patron de la police parisienne Michel Delpuech, limogé cette semaine après les violences sur les Champs-Elysées: "Bonsoir Michel, Yann Drouet (alors chef de cabinet de la préfecture de police, NDLR) a dû te parler d’une demande formulée par un proche collaborateur du PR (président de la République, NDLR), Alexandre Benalla, qui souhaite bénéficier d’une autorisation de port d’arme sur le fondement de l’article L 351-1. Si cette autorisation peut être accordée dans le strict respect des textes, j’y suis favorable."

Le courrier de Patrick Strzoda adressé à Michel Delpuech.
Le courrier de Patrick Strzoda adressé à Michel Delpuech. © BFMTV

Auditionné par les sénateurs en juillet 2018, Delpuech a dit "assumer" l’autorisation in fine, jugeant au passage que l’Elysée avait communiqué avec lui "sans faire pression". La commission a détaillé les conditions d’obtention du permis, qu’elle a considérées comme abusives. 

Pourquoi le Sénat n’a-t-il pas mis ce document dans son rapport? "Nous n’avons pas tout joint, le volume était trop important et il y a eu de nombreux échanges de mail qui étayaient nos propos, au-delà de celui que vous citez", répond Muriel Jourda, co-rapporteur (LR) de la commission. Dans l’entourage de Philippe Bas, on indique que « rien n’est à reprocher à M. Strzoda sur ce mail ». 

Les sénateurs écrivent qu’Alexandre Benalla a demandé une autorisation de port d’arme "avec le soutien appuyé de la présidence de la République" pour assurer une "fonction de protection rapprochée" du chef de l’Etat. L’Elysée, au contraire, a toujours avancé que le chargé de mission avait un rôle d’interface et de coordination entre les services, y compris de sécurité, sans exercer le métier de garde du corps. De leur côté, la majorité LaRem et l’exécutif estiment que le Sénat, à majorité de droite, mène une opération politicienne contre Emmanuel Macron.

Nicolas Prissette