L’attentat de Christchurch a des répercussions politiques jusque dans la si paisible Autriche, à des milliers de kilomètres de la Nouvelle-Zélande. L’opposition dénonce en effet les liens entretenus par le Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ, extrême droite), au pouvoir aux côtés des conservateurs, avec le Mouvement identitaire autrichien (IBÖ). Ce dernier est visé par une enquête pour « soupçon de participation à une organisation terroriste », après la découverte d’échanges entre son leader, Martin Sellner, et l’Australien Brenton Tarrant.
Ce terroriste a revendiqué l’attentat qui a coûté la vie à 50 fidèles dans deux mosquées néo-zélandaises, le 15 mars. M. Sellner a reconnu avoir reçu en 2018 un don de 1 500 euros de la part de l’auteur de la fusillade, qui a séjourné en Autriche à la fin de l’année dernière.
Des photos datant de 2015 du vice-chancelier, Heinz-Christian Strache, attablé tout sourire avec plusieurs membres de ce groupuscule identitaire, ont resurgi dans la presse. Il y est rappelé que le ministre de l’intérieur, Herbert Kickl, n’avait pas refusé de tenir un discours, en 2016, à l’occasion d’un congrès auquel participaient de nombreux identitaires. Et Martin Sellner posait en costume de soirée au bras de sa compagne, la youtubeuse américaine Brittany Pettibone, en janvier, à l’occasion du bal annuel des corporations estudiantines, proches du FPÖ.
M. Strache est par ailleurs visé par une plainte de la principale association représentant les musulmans en Autriche pour incitation à la haine. Depuis qu’il est entré au gouvernement, le FPÖ utilise l’argent public pour augmenter la portée de son message hostile à l’islam. La veille de l’attentat, il affirmait encore que dans des jardins d’enfants autrichiens contrôlés par une mouvance de l’islam radical, les enfants étaient « éduqués, à travers des sermons haineux, à devenir des martyrs ». Il établissait également un lien entre « le pourcentage de citoyens musulmans » dans un pays et « les conditions d’une guerre civile ».
Passivité face à l’extrême droite
Depuis l’ouverture de l’enquête, le FPÖ tente de prendre ses distances, « car il y a des directives extrêmement claires : quelqu’un d’actif au sein de la mouvance identitaire ne peut pas exercer de fonctions dans le parti », selon son secrétaire général, Christian Hafenecker, qui nie toute complaisance. Lors de l’élection présidentielle de 2016, le candidat du FPÖ Norbert Hofer avait très fermement énoncé qu’il ne voulait en aucun cas avoir à faire aux identitaires, dont il avait condamné les actions.
Au-delà du FPÖ, c’est l’exécutif dans son ensemble que la gauche tente de placer devant ses responsabilités. « Le ministre de l’intérieur n’est pas en mesure de combattre ce groupe, puisqu’il glorifie son idéologie », s’insurge par exemple le député social-démocrate (SPÖ) Peter Wittmann, qui doute que l’enquête puisse être menée sereinement, tant qu’une personnalité aussi controversée que M. Kickl participera à la marche de l’Etat.
Le chancelier conservateur Sebastian Kurz, qui avait invité le FPÖ à former une alliance, est très critiqué pour sa passivité face à l’extrême droite. Il l’a installée dans ses fonctions régaliennes et affiche avec elle une entente surjouée.
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