Benjamin Griveaux : «Il faut en finir avec la gestion clanique de Paris»

L’ancien porte-parole du gouvernement, qui a quitté son poste pour briguer la mairie de Paris en 2020, souhaite que LREM désigne officiellement son candidat avant l’été.

 «Quand on a envie d’être maire de Paris, il ne faut pas d’ambiguïté. Il faut le dire», lance Benjamin Griveaux.
«Quand on a envie d’être maire de Paris, il ne faut pas d’ambiguïté. Il faut le dire», lance Benjamin Griveaux. LP/Olivier Arandel

    Lorsqu'il arrive au siège de notre journal vendredi matin, Benjamin Griveaux affiche sa décontraction, et évoque son quotidien de jeune papa, une semaine après la naissance de sa petite troisième. Mais qu'on ne s'y trompe pas : l'ancien porte-parole du gouvernement, qui a quitté son poste pour se consacrer à sa campagne, n'a qu'une seule chose en tête : la mairie de Paris.

    Une semaine après les européennes -un scrutin marqué par une poussée verte, où cet ancien socialiste se rappelle avoir « voté Cohn-Bendit en 2009 »-, le voilà qui se relance dans la bataille. Espérant décrocher, d'ici l'été, l'investiture de LREM. Un premier obstacle à franchir, car de Mounir Mahjoubi à Cédric Villani, les candidats sont nombreux. Sans parler d'une éventuelle surprise. Les rumeurs sur une future candidature du Premier ministre, Édouard Philippe, restent vives…

    Quels enseignements tirez-vous des élections européennes ?

    BENJAMIN GRIVEAUX. Ceux qui ont expliqué que l'élection d'Emmanuel Macron en 2017 était une parenthèse, liée aux circonstances, se sont trompés.

    Le Rassemblement national est tout de même est arrivé en tête…

    Je ne le nie nullement. Mais les idées que Marine Le Pen porte sont, fort heureusement, minoritaires en Europe.

    L'exécutif en retient qu'il faut « accélérer ». N'est-ce pas un peu court ?

    La politique du zigzag n'est jamais une bonne politique. On peut ajuster, mais pas changer de cap tous les deux ans. C'est ce qui a fait que ce pays a été immobile pendant trop longtemps.

    Reconnaissez-vous des erreurs ?

    Sur la question des petites retraites, objectivement oui. Mais on a corrigé. On aurait dû, aussi, abandonner le projet de la Montagne d'or ( NDLR : projet de mine en Guyane ) plus tôt.

    Le gouvernement en a-t-il assez fait sur l'écologie ?

    Nous avons engagé la fermeture de Fessenheim, l'arrêt des centrales à charbon en 2022, stoppé le projet de Notre-Dame-des-Landes… On a fait beaucoup de choses. Mais il faut aller plus vite.

    Comment ?

    Le projet EuropaCity (NDLR : projet immobilier à Gonesse, dans le Val-d'Oise), par exemple, est contraire aux principes que l'on défend. Il ne faut pas le faire.

    Ce subit verdissement ne risque-t-il pas d'être perçu comme de la pure récupération politique ?

    Est-ce qu'on a tout bien fait ? Non. Est-ce que l'on n'a rien fait ? Personne ne peut sérieusement dire cela. Alors, les leçons d'écologie…

    Anne Hidalgo propose de limiter la vitesse à 50 km/h sur le périphérique. Cela va dans la bonne direction ?

    La vitesse moyenne est déjà à 39,8 km/h sur le périphérique… Multiplier les annonces à un an d'une élection, quand on a été maire de Paris pendant cinq ans, me laisse toujours songeur.

    Comment lisez-vous le résultat des européennes à Paris ?

    Il faut toujours se garder d'extrapoler les résultats d'une élection. Les municipales sont une élection locale, avec des enjeux locaux, des personnalités locales. Maire, c'est l'anagramme d'aimer. Les années qui viennent ouvrent le temps des maires.

    L'effondrement de la droite parisienne aura-t-il un impact sur les futures alliances ?

    Il faut en finir avec la gestion clanique de Paris. Je ne crois pas aux grandes alliances globales. Au sein du PS, ou chez LR, les gens ne pensent plus du tout la même chose. Je veux en finir avec les étiquettes.

    Claude Goasguen appelle à une coalition anti-Hidalgo. Que lui répondez-vous ?

    Non merci! On ne construit pas un projet contre quelqu'un ou sur des haines recuites. Claude Goasguen, ou Philippe Goujon, défendaient les couleurs de François-Xavier Bellamy haut et fort. Quatre jours après, ils veulent faire alliance avec nous pour garder des postes. Ils n'ont rien compris de ce qu'attendent les Parisiens!

    Y a-t-il d'autres LR avec lesquels vous pourriez travailler ?

    J'échange depuis un an avec Delphine Bürkli, la maire du IXe, notamment sur l'importance des maires d'arrondissement. Il y a aussi des conseillers de Paris. Eric Azière, le président du groupe UDI, est prêt à s'engager en travaillant dès maintenant à mes côtés. On travaille également avec des gens issus de la gauche, de l'écologie.

    Lesquels ?

    À Paris, c'est la règle de l'omerta. Ils ont peur des représailles, donc je ne vais pas donner leurs noms.

    Vous pourriez travailler avec les écologistes ?

    Mais ils sont protéiformes! Oui! Si c'est la ligne d'une écologie positive défendue par Yannick Jadot, évidemment. Mais si c'est une approche punitive et dure, non.

    Quand LREM doit-elle désigner son candidat pour Paris ?

    Avant l'été. Ceux qui souhaitent attendre mettent en marche la machine à diviser. C'est une bataille difficile. On ne la prépare pas quelques semaines avant la fin de l'année.

    Tout le monde n'est pas déclaré…

    Quand on a envie d'être maire de Paris, il ne faut pas d'ambiguïté. Il faut le dire.

    N'est-ce pas un moyen pour vous de verrouiller le processus de désignation ?

    Non.

    Quelles garanties donnez-vous donner à ceux qui le pensent, notamment du fait de vos liens avec Stanislas Guerini ?

    C'est le mouvement qui établit les règles de désignation et personne d'autre. On me prête donc un pouvoir que je n'ai pas. Je ne suis pas le grand marionnettiste.

    Craignez-vous les divisions ?

    Non. Chaque candidat a pris l'engagement de soutenir celui ou celle qui sera investi. La République en marche est différente en cela des autres partis politiques. Ce n'est pas la maison des Atrides.

    Avez-vous échangé avec Emmanuel Macron à ce sujet ? A-t-il montré une préférence ?

    Je ne dis jamais rien de mes discussions avec le président.

    Édouard Philippe entretient l'ambiguïté sur sa candidature à Paris…

    Je ne fais aucun commentaire sur les rumeurs.

    Pour emporter Paris, il faudra rassembler. N'êtes-vous pas trop clivant, « arrogant » disent certains ?

    Je l'entends beaucoup dans la bouche de mes adversaires. J'ai été l'artisan d'un premier rapprochement avec Julien Bargeton (NDLR : sénateur LREM de Paris). Et j'ai reçu déjà des soutiens de toutes les sensibilités. Je rassemble déjà.

    Mais cette image vous colle à la peau…

    Lorsque j'étais porte-parole du gouvernement, j'ai assumé d'avoir des positions tranchées. On s'engage en politique avec ses convictions et avec ses tripes. Est-ce qu'il m'est arrivé d'être trop dur dans mes expressions ? Vraisemblablement. Je suis quelqu'un d'entier. Je l'ai fait avec sincérité, jamais pour blesser.

    Les avocats des manifestants jugés pour s'être introduits dans votre ministère en décembre dénoncent « une justice spectacle ». Que répondez-vous ?

    Je ne commente jamais les affaires judiciaires.