Le fils de Latifa Ibn Ziaten a inventé son agression

Après une bagarre avec un ami, le frère de la première victime de Mohamed Merah avait raconté avoir été agressé par trois hommes portant «des barbes d’islamistes».

 Latifa Ibn Ziaten sillonne la France depuis plusieurs années pour prévenir les dérives islamistes.
Latifa Ibn Ziaten sillonne la France depuis plusieurs années pour prévenir les dérives islamistes. LP / OLIVIER LEJEUNE

    Ils ont tout inventé, pour couvrir une sombre histoire de bagarre alcoolisée. Naoufal Ibn Ziaten, l'un des fils de Latifa Ibn Ziaten, la mère de la première victime de Mohamed Merah, a passé la journée de samedi en garde à vue pour « dénonciation mensongère de crimes et délits », selon des informations de sources concordantes qui nous ont été confirmées par le procureur de Rouen. Un de ses amis, âgé de 23 ans et très proche de Latifa Ibn Ziaten a lui aussi été entendu par les enquêteurs. Selon nos informations, ils vont être convoqués au tribunal sur reconnaissance préalable de culpabilité, ce qui laisse entendre qu'ils ont reconnu leurs méfaits.

    Jeudi soir, vers 23 heures, le frère de la première victime de Merah s'était rendu avec son ami et colocataire au CHU de Rouen (Seine-Maritime). Ils avaient alors expliqué avoir été agressés par trois hommes qui portaient « des barbes d'islamistes ».

    « L'agression a été très violente, sauvage même. Les deux victimes ont été rouées de coups, on leur a cogné la tête contre un mur. Il y avait du sang dans la pièce », racontait, se fiant au récit de Naoufal Ibn Ziaten, Me Méhana Mouhou, l'avocat de la famille. Selon lui, Naoufal Ibn Ziaten et son ami avaient eu le sentiment que les agresseurs, avaient « la volonté d'en finir ». Le frère de la première victime de Mohamed Merah avait même affirmé que ses agresseurs « étaient repartis dans une voiture avec à l'intérieur une femme portant un niqab », avait expliqué Me Mouhou à France 3 Normandie.

    Versions contradictoires

    Rapidement après les déclarations du jeune homme à l'hôpital et le signalement des faits par son avocat au procureur, une enquête avait été confiée au service régional de police judiciaire (SRPJ) de Rouen. Très tôt, une source proche de l'enquête avait fait part de ses doutes au Parisien, évoquant des « contradictions sur les circonstances et les motifs ». Entendu jeudi soir puis réentendu vendredi, le fils de Latifa Ibn Ziaten et son ami ont livré, durant leurs auditions, des versions imprécises, voire totalement contradictoires.

    Surtout, une rapide enquête de voisinage menée par les enquêteurs de la PJ de Rouen a mis le doute dans la tête des policiers. Plusieurs témoins de la scène affirmaient ainsi n'avoir vu que deux personnes à proximité des lieux de la rixe. Deux hommes qui avaient très vite pris la fuite. Confrontés à ces éléments, Naoufal Ibn Ziaten et son ami auraient reconnu avoir inventé l'agression, selon des sources condordantes. En réalité, les deux hommes se seraient battus après une soirée alcoolisée. L'un des deux reprochait à l'autre d'être rentré trop tard.

    L'altercation semble en tout cas avoir été violente, l'avocat de la famille Ibn Ziaten évoquant rapidement des ITT de 10 et 11 jours. Me Mouhou a d'ailleurs, ce samedi matin, retiré le Tweet qu'il avait publié en direct du CHU de Rouen.

    Contactée ce samedi matin, Latifa Ibn Ziaten assure « être à l'étranger et ne pas être au courant » des suites de cette affaire. Ni Me Mouhou ni le procureur de la République de Rouen n'étaient joignables ce samedi matin.

    «Des comportements inadaptés»

    Me Méhana Mouhou, avocat de la famille Ibn Ziaten, a confié samedi soir sa première réaction au Parisien. « L'important est que la vérité soit rétablie. Mon client est effondré et mesure les conséquences de son appel à police secours pour signaler une agression alors qu'il s'agissait de violences entre lui et un des ses amis ».

    Quand il a appris que Naoufal était en garde à vue, son avocat a été complètement sonné. « Je n'en revenais pas, explique-t-il. Jeudi, son père m'a appelé et je suis aussitôt allé aux urgences de l'hôpital de Rouen où j'ai trouvé Naoufal et son ami bien amochés, en sang. Avec 10 et 11 jours d'ITT ! Naoufal a pleuré dans mes bras en me racontant son histoire d'agresseurs. Alors oui, aujourd'hui je suis choqué et écoeuré. »

    S'il a le sentiment que ce fils de Latifa Ibn Ziaten a trahi sa confiance, Me Mouhou n'a pas l'intention de le laisser tomber. « C'est mon rôle d'avocat », ajoute encore le pénaliste qui ne comprend toujours pas pourquoi le jeune homme a inventé cette agression après s'être violemment battu avec son ami. « Depuis l'assassinat de son frère Imad par Mohamed Merah, il est en proie à des comportements inadaptés. Je me demande s'il n'aurait pas besoin d'une aide psychologique », réagit Me Mouhou.