Piotr Pavlenski : des soins psychiatriques ou la prison

Dans un courrier que nous avons pu consulter, la justice enjoint l’artiste russe à suivre des soins psychiatriques sous peine de prison. Piotr Pavlenski voit dans cette mesure un «traitement forcé».

 Piotr Pavlenski, ici en février, est à l’origine de la diffusion des vidéos sur Benjamin Griveaux, ancien candidat à la mairie de Paris.
Piotr Pavlenski, ici en février, est à l’origine de la diffusion des vidéos sur Benjamin Griveaux, ancien candidat à la mairie de Paris. LP/Guillaume Georges

    C'est une lettre de quelques lignes que Piotr Pavlenski perçoit comme « une insulte et une menace directe ». Datée du 6 juillet 2020 et signée de la juge d'instruction Laurence Lazerges, elle rappelle ses obligations à l'artiste russe.

    L'homme a été mis en examen pour « atteinte à l'intimité de la vie privée » et « diffusion sans l'accord de la personne d'un enregistrement portant sur des paroles ou images à caractère sexuel », depuis qu'il a diffusé sur Internet des vidéos intimes de Benjamin Griveaux alors candidat à la mairie de Paris. Piotr Pavlenski est aussi suspecté de « violences aggravées » après une bagarre survenue le 31 décembre 2019 lors d'une fête « post-crépusculaire » organisée par son ami, l'avocat Juan Branco.

    Dans ce cadre, celui qui a changé le destin de la course à la mairie de Paris doit suivre des soins. « Je vous prie de bien vouloir me justifier du respect de l'obligation de soins psychiatriques à laquelle vous êtes astreint dans le cadre de votre contrôle judiciaire », note la juge d'instruction, qui précise à l'artiste qu'il doit impérativement « envoyer des justificatifs de soins psychiatriques tous les deux mois ». Et la juge de rappeler que « tout manquement volontaire aux obligations de son contrôle judiciaire » risque d'entraîner « une mesure de placement en détention provisoire ».

    « Une mesure aussi inutile que vexatoire »

    Pour Piotr Pavlenski, « par cette lettre, la juge d'instruction déclare que par défaut je suis déjà malade mental ». De fait, le Russe n'entend pas se soumettre à cette « situation de traitement forcé », qu'il juge « beaucoup plus grave qu'une simple exigence procédurale que je refuse de remplir en raison de mon mauvais caractère ».

    Dans une envolée transmise par mail, Piotr Pavlenski compare sa situation à celle de victimes de régimes totalitaires, « lorsque tout ce qui n'était pas conforme à l'idéologie du régime était reconnu comme dégénéré, malade, et nécessitait une stérilisation, une correction, un isolement, une expulsion ou une liquidation. » Et l'artiste russe d'évoquer l'Allemagne des années 1930, l'Union soviétique ou encore les Etats-Unis en 1851 « lorsque les esclaves qui tentaient d'échapper à l'esclavage ont reçu un diagnostic psychiatrique de drapétomanie (NDLR : prétendue maladie mentale qui aurait poussé les esclaves à s'évader) et ont également été traités avec des orteils hachés ».

    Malgré son courroux, les obligations de soins – qu'elles soient psychiatriques ou destinées à mettre fin à une addiction à l'alcool ou à la drogue – restent des mesures très courantes en France en cas de contrôle judiciaire.

    Contacté, l'avocat de Piotr Pavlenski, Yassine Bouzrou, voit de son côté dans ces soins psychiatriques « une mesure aussi inutile que vexatoire. Mon client refuse de s'y soumettre ». Selon le courrier de la juge d'instruction, il a jusqu'au 15 juillet prochain pour justifier auprès de la justice d'un traitement en cours.