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TÉMOIGNAGE - Alexandre, étudiant à Saint-Denis : "Je suis devenu escort pour ne pas crever de faim"

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Alors que de plus en plus d'étudiants galèrent pour boucler les fins de mois, depuis le début de la crise sanitaire, France Bleu Paris a recueilli le témoignage d'Alexandre, étudiant de 20 ans, à Saint-Denis, devenu "escort-boy" pendant le confinement pour "pouvoir se nourrir".

Alexandre, 20 ans, étudiant à l'université Paris 8 de Saint-Denis Alexandre, 20 ans, étudiant à l'université Paris 8 de Saint-Denis
Alexandre, 20 ans, étudiant à l'université Paris 8 de Saint-Denis © Radio France - Hajera Mohammad

"C'est dur d'avoir 20 ans en 2020", déclarait Emmanuel Macron, lors de son allocution du 14 octobre 2020. "Dur" est sans doute un mot bien faible pour des milliers d'étudiants qui ont perdu leur job, leurs revenus, doivent suivre les cours chez eux, souvent seuls, loin de leur famille et des amis. Face à une précarité grandissante, certains ont opté pour d'autres solutions.

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Il perd son job d'étudiant 

Alexandre (son prénom a été modifié) est étudiant en droit, à l'université Paris 8 de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Avant le confinement, il avait, comme beaucoup d'autres jeunes, un job de livreur "au noir" pour une épicerie. Un emploi qui, avec sa bourse étudiante de 500 euros, lui permettait à l'époque déjà, seulement de "survivre". Le jeune homme de 20 ans, est en "rupture familiale". Ses parents qui sont en Guadeloupe sont sans-emploi et ne peuvent pas l'aider financièrement. 

Alors quand il a perdu son boulot, lors du premier confinement, la situation est devenue dramatique, "parce qu'avec un loyer de 285 euros pour mon logement étudiant, il ne me reste plus grand chose sur les 500 euros de ma bourse pour vivre".  Pendant le premier confinement, il a du enchaîner plusieurs jours "sans nourriture, même pas de conserves, rien... alors j'ai rempli mon ventre en buvant de l'eau". 

200 euros ou 300 euros par soir

Il finit par craquer et décide de gagner de l'argent d'une toute autre manière : il devient "escort-boy" et propose ses "services" à des femmes. "Parfois, c'est juste pour de la compagnie et sinon c'est pour du sexe", avec des tarifs qui grimpent selon le type de prestation, la durée et le nombre de clientes lors du rendez-vous, "entre 150 euros et 300 euros par soir et même une fois jusqu'à 1300 euros". Au bout de quelques mois, il s'inscrit sur un site spécialisé et répond aux annonces "très nombreuses même pendant le confinement". De l'argent "facile" en apparence, mais gagné pourtant au prix d'un mal-être qui grandit chez l'étudiant

"Je me sentais sale"

Alors, le mois dernier, il arrête. "J'étais épuisé physiquement, je me suis mis à prendre du viagra à 20 ans... Mais c'était surtout psychologiquement, je me sentais sale, j'avais du mal à me regarder". Depuis qu'il a arrêté cette "activité", Alexandre doit de nouveau survivre avec un budget serré. "Ce serait bien que le gouvernement ait conscience que payer un loyer, l'électricité, faire des courses avec 500 euros, c'est impossible". Il nous confie que dans son entourage, plusieurs jeunes hommes qui ont perdu, eux aussi, leur emploi pendant le confinement ont basculé dans le monde de la prostitution

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La précarisation, un des facteurs de la prostitution, mais pas le seul

Pour Sandrine Goldschmidt, chargée de communication au Mouvement du Nid, le témoignage d'Alexandre prouve bien que "la crise sanitaire et la précarisation qu'elle entraîne est un risque d'entrer en prostitution, pas simplement pour les jeunes mais pour toutes les personnes  en situation de vulnérabilité"

Si l'association n'a aucune donnée officielle, pour l'instant, pour évaluer un éventuel "effet du confinement", Sandrine Goldschmidt assure qu'elle reçoit beaucoup plus d'appels de "jeunes majeurs qui prennent contact". Mais la précarité n'est pas la seule raison qui fait basculer un homme ou une femme, "la rupture familiale, par exemple, est un facteur de risque aggravant". Sans oublier la banalisation de la prostitution "qui donne l'impression que c'est un métier comme les autres alors qu'il s'agit d'une violence"

Le Mouvement du Nid accompagne chaque année entre 1.200 et 1.300 personnes en France, dont une centaine en Île-de-France. 

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Ce vendredi 4 décembre 2020, la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, était l'invitée de France Bleu Paris à 8h15 pour répondre aux interrogations et inquiétudes des étudiants. Une interview à réécouter ici

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