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La « cancel culture » rattrape une journaliste britannique

Suzanne Moore, l’une des plumes les plus aguerries du « Guardian », a quitté le quotidien britannique progressiste à la mi-novembre. En cause, une tribune qui défendait une universitaire jugée « transphobe ».

Par  (Londres, correspondante)

Publié le 04 décembre 2020 à 17h45

Temps de Lecture 4 min.

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Suzanne Moore (ici, à Londres, en février) soupçonne les milieux intellectuels de gauche de museler la parole au nom de « politiques d’inclusion ».

Grande plume et grande gueule du journalisme britannique, Suzanne Moore, 62 ans, a claquĂ© la porte du Guardian le 16 novembre d’un Tweet Ă©nigmatique. « Je viens de quitter le Guardian. Il y a quelques personnes qui vont me manquer [dans le journal]. C’est tout ce que je peux dire pour l’instant. Â» Dix jours plus tard, la chroniqueuse, connue pour son ton sarcastique, son mĂ©pris des conventions, s’est longuement expliquĂ©e dans la presse de droite (le site en ligne UnHerd et le Daily Telegraph) sur les raisons de son dĂ©part, après vingt-cinq ans de carrière au sein d’un quotidien considĂ©rĂ© comme le phare de la gauche britannique.

En mars 2020, elle dĂ©cide de prendre la dĂ©fense de Selina Todd, une professeure d’histoire contemporaine Ă  Oxford. Selina Todd vient d’être brutalement « dĂ©programmĂ©e Â» d’une confĂ©rence sur le prestigieux campus, au motif qu’elle cautionne les positions d’une organisation reconnue (Woman’s Place UK) mais jugĂ©e « transphobe Â» par des militants trans et des membres du Parti travailliste. Selina Todd la fĂ©ministe est ­menacĂ©e et prise Ă  partie en ligne, Suzanne Moore trouve cela insupportable et signe une puissante tribune : « Les femmes doivent pouvoir avoir le droit de s’organiser, on ne nous fera pas taire. Â»

« Je sais d’expĂ©rience ce que cela vous vaut d’être traitĂ©e de transphobe par un invisible tribunal en ligne. Â» Suzanne Moore

Non, Woman’s Place UK n’est pas une organisation haineuse, assure-t-elle. Oui, elle aussi pense, comme cette organisation militant pour des espaces rĂ©servĂ©s aux femmes, que le sexe n’est pas une construction purement sociale. « Le sexe n’est pas un sentiment. Femelle est une classification biologique qui s’applique Ă  tout le règne animal. Â» L’article est incisif, mais nuancĂ© : « La plupart des gens souhaitent que la très petite fraction de la population qui est trans puisse vivre la meilleure vie possible Â», explique Suzanne Moore, ajoutant qu’il ne faudrait pas que la violence contre ces personnes transsexuelles, qui vient surtout des hommes, se retourne finalement contre les fĂ©ministes. « Je sais d’expĂ©rience ce que cela vous vaut d’être traitĂ©e de transphobe par un invisible tribunal en ligne Â», prĂ©cise la journaliste.

Dans UnHerd, huit mois plus tard, elle racontera que dès 2013, Ă  la suite d’un article sur le fĂ©minisme paru dans New Statesman (hebdomadaire de gauche) oĂą au dĂ©tour d’une phrase elle expliquait que les « femmes sont en colère (…) de n’avoir pas un corps de transsexuelle brĂ©silienne Â», elle avait subi un vrai torrent de menaces. Et s’était Ă©tonnĂ©e Ă  l’époque que cette violence verbale vienne de la gauche, après avoir Ă©tĂ© si longtemps la cible des injures de l’extrĂŞme droite.

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