10 choses à savoir sur Alain Fischer, le « Monsieur Vaccin » du gouvernement

Alain Fischer s’exprime lors d’une conférence de presse sur le Covid-19, le 3 décembre 2020.

Alain Fischer s’exprime lors d’une conférence de presse sur le Covid-19, le 3 décembre 2020. BENOIT TESSIER / POOL / EPA / MAXPPP

Nommé à la tête du conseil d’orientation de la stratégie vaccinale française, l’immunologiste pédiatrique est une personnalité scientifique reconnue parmi ses pairs. Cela sera-t-il suffisant dans un pays qui doute des bienfaits de la vaccination ?

1 Excellence

Méconnu du grand public, le « Monsieur Vaccin » du gouvernement est une sommité dans le milieu scientifique, où sa nomination fait l’unanimité. Professeur émérite au Collège de France, cofondateur de l’Institut des maladies génétiques Imagine, ce fils d’un négociant et d’une ingénieure chimiste, âgé de 71 ans, a dirigé de 1996 à 2012 le service d’immunologie et hépatologie pédiatriques de l’hôpital Necker à Paris.

2 Enfants-bulles

Ses travaux les plus connus ont porté sur le traitement par thérapie génique d’enfants atteints d’une forme rare et sévère de déficit immunitaire les condamnant à vivre dans une chambre isolée. Démarrés en 1999, ils se sont traduits, depuis, par la guérison de plusieurs de ces « bébés-bulles » et lui ont valu de très nombreuses distinctions. « C’était un challenge ambitieux », raconte Salima Hacein-Bey, chef du service d’immunologie biologique à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre et membre, à l’époque, de l’équipe de Fischer. « Sous son impulsion, nous avons obtenu les meilleurs résultats possible avec les outils dont nous disposions. »

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3 Liberté de choix

L’exécutif a misé sur un scientifique qui s’est clairement prononcé, ces dernières semaines, contre la vaccination obligatoire contre le Covid-19. « Une obligation pourrait avoir un effet désastreux », confiait-il à « l’Obs » en novembre. « Ne mettons pas la charrue avant les bœufs ! Un programme de santé publique réussi ne peut se faire sans l’adhésion, la confiance de la population. La campagne d’information en direction du public devra être claire, rigoureuse et transparente. »

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4 Polémique

Le chercheur n’a pas toujours été aussi libéral sur ce sujet. En 2016, alors qu’il présidait la concertation citoyenne qui devait rendre un avis consultatif sur l’extension de l’obligation vaccinale chez les enfants, il a publiquement défendu cette mesure alors que les membres de la concertation s’étaient prononcés contre. Le contexte était, selon lui, très différent : les vaccins pédiatriques ont « une efficacité scientifiquement reconnue depuis plusieurs années mais faisaient l’objet d’une perte de confiance ». En passer par l’obligation était donc nécessaire à ses yeux.

5 Indépendance

Interrogé sur ses rapports avec l’industrie pharmaceutique, cet amateur de marche en montagne dit n’avoir aucun lien ni conflit d’intérêts avec les industriels. « Il a une très grande indépendance vis-à-vis de ceux qui fabriquent les vaccins, c’est rare pour un expert de ce calibre », confirme son confrère Michel Goldman, professeur d’immunologie médicale et codirecteur de l’Institut I3h à l’université libre de Bruxelles. « Il ne sera pas sensible non plus aux pressions politiques, ce qu’il dira reposera toujours sur des données scientifiques. »

6 Médicaments

Au risque de déplaire aux « Big Pharma », il a d’ailleurs dénoncé publiquement, à maintes reprises, le prix exorbitant des thérapies géniques et autres traitements innovants. En 2019, il a ainsi cosigné une tribune choc sur ce sujet dans la revue « Nature Medicine » avec Michel Goldman et l’économiste Mathias Dewatripont, proposant notamment que les universités et organismes de recherche publics imposent aux industriels des « clauses de prix raisonnables ».

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7 Prudence

Sa prudence, lors de sa première apparition publique, le 3 décembre, pendant la conférence de presse de présentation de la stratégie vaccinale du gouvernement, a parfois surpris, voire provoqué les railleries. C’est pourtant un choix réfléchi, tant le sujet de la vaccination est hautement inflammable en France, où plus d’une personne sur deux pense ne pas se faire vacciner contre le Covid-19. « Il a conscience que sa mission est extrêmement délicate », confirme Marie-Paule Kieny, la présidente du comité vaccin Covid-19 dont Alain Fischer est membre.

8 PS

Alain Fischer est un homme engagé. Il a pris position pour Martine Aubry lors de la primaire du Parti socialiste en 2011. « C’était l’un de ses “soutiens en chef” », se souvient l’économiste de la santé Brigitte Dormont. « Il avait monté un comité avec des experts qui devaient plancher, en tandem, sur des sujets pour nourrir le programme santé de la candidate. » Trois ans auparavant, il avait dit son opposition à la loi Bachelot qui risquait, selon lui, de transformer l’hôpital en entreprise.

9 Professionnalisme

« C’est bien simple, je ne lui connais pas de défauts ! », lâche la vice-présidente de France Assos Santé, Claude Rambaud, qui a travaillé avec Alain Fischer lorsqu’elle était coprésidente de la concertation citoyenne sur la vaccination. « Il était efficace, pragmatique, rapide, et il avait à cœur de recueillir l’avis de tous. Mais s’il fallait ne retenir qu’une qualité, ce serait sa rigueur. » « Il a toujours une consultation, il est resté très proche des patients », renchérit Michel Goldman.

10 Rationalisme

Contrairement à des personnalités des sciences sociales, anthropologues et spécialistes de l’écologie, l’homme refuse de voir dans l’épidémie qui frappe le monde depuis le début de l’année un « ultimatum de la nature », pour reprendre l’expression de Nicolas Hulot. « L’histoire nous montre que pandémies, épidémies et endémies sont anciennes », a-t-il rappelé à plusieurs reprises.

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