Airbnb condamné à payer 8 millions d’euros à la Ville de Paris

La mairie a gagné son bras de fer judiciaire contre la plateforme de location saisonnière qui publiait des annonces sans numéro d’enregistrement, pourtant une obligation légale depuis 2017. L’opérateur réfléchit à faire appel.

Il est reproché à l'opérateur d'avoir publié des annonces sans numéro d'enregistrement dans la capitale. LP/O.B.
Il est reproché à l'opérateur d'avoir publié des annonces sans numéro d'enregistrement dans la capitale. LP/O.B.

    « C’est une victoire éclatante qui met fin à quatre ans d’impunité d’Airbnb, se réjouit Ian Brossat, l’adjoint à la mairie de Paris en charge du Logement. C’est la première fois en France qu’une collectivité gagne face à un géant du numérique. » Par un jugement rendu ce jeudi matin, le tribunal judiciaire de Paris condamne en première instance la direction Europe du géant américain de la location saisonnière – la société Airbnb Ireland – à une amende civile de 8,08 millions d’euros au profit de la Ville de Paris.

    Le tribunal juge la plateforme coupable d’avoir publié et maintenu en ligne 1010 annonces sans numéro d’enregistrement, un numéro délivré par la mairie de Paris et rendu pourtant obligatoire depuis 2017. Depuis le 1er décembre 2017 précisément, date de l’entrée en vigueur de la loi République numérique en France.

    « Attitude incivique »

    Dans un long jugement technique et motivé de 24 pages, le président du tribunal retient la responsabilité d’hébergeur d’Airbnb et lui impose 8 000 euros d’amende par annonce de location de meublé touristique publiée illégalement (montant plafonné par la loi à 12 500 euros par annonce). Il met en avant « la gravité du manquement en cause, de sa durée et de ses effets au regard de l’objectif d’intérêt général de lutte contre la pénurie de logements destinés à la location » dans la capitale.

    Enfin, le jugement épingle « l’attitude incivique » de la plateforme américaine « dont l’équilibre économique repose sur la mise à disposition de logements par les Parisiens ».

    L’opérateur rentre dans le rang mais juge la décision « contestable »

    Cette décision judiciaire intervient le jour même où la plateforme annonce rendre ce numéro obligatoire pour toutes ses annonces parisiennes. « Airbnb a anticipé la décision du tribunal et veut présenter comme volontaire une démarche en réalité contrainte par la justice », estime Ian Brossat. Pour lui, cette reconnaissance par la justice de la responsabilité de l’hébergeur est cruciale. « Cela signifie qu’il revient à la plateforme de faire elle-même le ménage parmi ses annonces et peut nous éviter de nous retourner contre chaque propriétaire bailleur en faute. »

    La Ville emploie 35 agents pour contrôler la conformité des quelque 30 000 annonces parisiennes en ligne sur le site.

    De son côté, Airbnb juge ce jugement « contestable » et étudie « la possibilité de faire appel » sous trois mois comme le lui permet la loi. « Le nombre de nouvelles inscriptions dans la capitale en avril et mai a augmenté de 16 % par rapport aux deux mois précédents (NDLR : février et mars) », se félicite encore la plateforme.