Psychologie animale

Les singes aussi craquent sous la pression

Exactement comme un joueur qui pense trop à l’enjeu d’un match et à sa difficulté, les performances des singes s’effondrent si on leur fait croire qu’une tâche est difficile et qu’une grosse récompense est à la clé.

CERVEAU & PSYCHO N° 142
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singe sous pression

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Comment diable ce champion de tennis a-t-il pu rater cette balle si facile ? Au moment de conclure le match, il n’avait qu’à tendre sa raquette pour jouer une volée déconcertante de simplicité, et battre ainsi le numéro 1 mondial, remporter le titre, décrocher le trophée le plus convoité de l’année et empocher au passage une somme astronomique.

Mais, patatras ! Il a craqué sous la pression de l’enjeu. On dit que c’est cela, la pensée de l’enjeu, qui provoque l’échec. D’où l’idée de tester cette hypothèse sur de petits singes capucins en laboratoire. Les animaux devaient réaliser des tests cognitifs sur un écran tactile, et les chercheurs ont fait varier à la fois l’enjeu des tests (de une à cinq cacahuètes pour une réponse correcte) ainsi que l’impression de difficulté (les tests étaient tous de même difficulté réelle, mais dans certains cas un fond bleuté était ajouté à l’écran, et cette couleur avait été préalablement associée à des tâches plus difficiles pour le singe).

Résultat : quand beaucoup de cacahuètes sont à la clé, et que le fond d’écran laisse croire au singe qu’il s’agit d’une tâche difficile, ses performances s’effondrent. C’est exactement ce qui se passe quand le joueur pense à l’enjeu d’un match (le titre, la gloire, le prix) et à sa difficulté (« Mon Dieu ! J’ai le numéro 1 mondial en face de moi ! »). Sa main tremble, il a la boule au ventre, et n’a plus les yeux en face des trous.

C’est l’effet du cortisol, que les chercheurs ont mesuré chez leurs singes. Le fait marquant est que les animaux qui craquent sous la pression sont ceux qui ont les taux de cortisol les plus élevés à la base, hors situation de jeu. Dès lors, ils ne peuvent pas bénéficier de l’effet stimulant de cette hormone du stress, qui nécessite des variations dynamiques importantes. Ils sont déjà stressés avant de commencer, et craquent au moment fatidique. Par ailleurs, pour tous les singes testés, c’est la répétition des situations à fort enjeu qui permet de s’affranchir de ce stress. D’où un conseil au perdant : confrontez-vous à ces situations, car elles vous feront ensuite moins peur.

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Sébastien Bohler

Sébastien Bohler est docteur en neurosciences et rédacteur en chef de Cerveau & Psycho.

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