Bien-être

Les mutilations génitales, un tabou qui concerne pourtant 35.000 femmes en Belgique

Evocation d’une excision

© Getty Images

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Par Belga, édité par Alain Lechien

23.000 femmes excisées vivent, actuellement, en Belgique. Plus de 12.000 filles mineures nées de mamans excisées risquent également de subir une mutilation génitale féminine si aucun travail de prévention n’est fait. C’est ce qui ressort d’une étude commandée par la secrétaire d’Etat à l’égalité des chances et à l’égalité des genres, Sarah Schlitz et du ministre de la santé publique, Franck Vandenbroucke. Elle a été réalisée par deux chercheuses du GAMS (groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles féminines) et l’Aviq (Agence wallonne pour une vie de qualité).

Il s’agit de la quatrième étude sur le sujet. La dernière en date, qui reposait sur des données de 2016, estimait à 17.575 femmes "très probablement excisées" et 8342 filles "à risque d’excision". Leur nombre est en augmentation constante depuis le début du monitoring en 2007. "Cela veut dire que notre pays respecte la convention de Genève" et continue à accueillir les personnes qui en ont besoin, relève Fabienne Richard, l’une des chercheuses. "La migration continue et les personnes migrantes sont souvent plus jeunes et font donc des enfants."

Une majorité de ces femmes, 16.500 excisées ou à risque vivent en Région flamande (cela représente une augmentation de 45% par rapport à l’année 2016) contre 10 000 en Région Bruxelles-Capitale et 8 800 en Région wallonne. Chaque année, 1.700 femmes excisées accouchent dans une maternité belge.

La joie de la naissance d'une petite fille assombrie par le nuage de l'excision

Mariama Bah a été elle-même excisée lorsqu’elle était enfant. Elle témoigne aujourd’hui : " A l’accouchement de ma première fille, j’ai eu tellement de difficultés que lorsqu’on m’a dit que c’était une fille, avant même de tenir ce petit bout dans mes bras, c’était l’inquiétude à la place. "

 

Mariana fait aujourd’hui de la prévention auprès des communautés concernées. Elle fait partie de l’association Gams. Fabienne Richard, sa directrice estime cette prévention primordiale car plus d'un tiers des femmes et des filles concernées sont des mineures: " Nous accueillons beaucoup de femmes originaires des pays où les mutilations génitales féminines sont pratiquées à plus de 90% comme la Guinée et la Somalie. Ces femmes ont été excisées dans leur pays d’origine, leurs filles nées en Belgique sont aussi à risque d’être excisées si aucun travail de prévention n’est fait. Or, nous savons que les moyens mis dans la prévention ne sont pas encore les mêmes sur tout le territoire. Ils ne sont pas suffisants, notamment en Flandre "

Le retour au pays et les risques de pressions familiales

Chaque année, le GAMS accompagne plus de 700 femmes victimes de mutilations génitales. Son action est reconnue à l’international. Il organise notamment des dialogues avec les parents de filles ou jeunes femmes à risque de mutilation génitale, avant qu’elles ne passent leurs vacances dans leur pays d’origine.

 

Sarah Schlitz, la secrétaire d’Etat s’inquiète particulièrement à l’approche des vacances d’été : " C’est une période critique pour les femmes et filles à risque de mutilations génitales car elles repartent dans leur pays d’origine. Sur place, les pressions sont importantes au sein des familles pour pousser à pratiquer l’excision. Ces pratiques inacceptables sont terriblement nuisibles tant physiquement que mentalement. Aucune femme au monde ne devrait avoir à subir cela. Rappelons que ces pratiques sont interdites en Belgique et qu’elles sont passibles de poursuites "

 

La Secrétaire d’Etat a annoncé le lancement de deux campagnes. La première vise à faire connaître les deux centres de prises en charge accrédités par l’INAMI. Le premier est situé au CHU St Pierre "CeMAViE" et le deuxième à l’UZ de Gand. Ils offrent un accompagnement holistique aux femmes excisées (médical, psychologique, sexologique, chirurgical).

 

 La seconde campagne, qui sera lancée en 2023, vise à sensibiliser les familles concernées et les professionnels sur les risques d’excision. Les chercheuses estiment que la thématique des mutilations génitales doit être intégrée aux cursus des étudiants en médecine. Les chercheuses pointent notamment le fait que, par méconnaissance de la problématique, de nombreux médecins pratiquent notamment des césariennes inutiles sur les femmes excisées.

Les grenades: archives 2021

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