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"Malgré les plaintes victimaires de monsieur Abel, de monsieur Askolovitch, de La Croix, des Frères musulmans, des salafistes et de leurs idiots utiles, ce sont bien les fanatiques religieux qui ont tué et tuent en France et la laïcité qui nous protège."
"Malgré les plaintes victimaires de monsieur Abel, de monsieur Askolovitch, de La Croix, des Frères musulmans, des salafistes et de leurs idiots utiles, ce sont bien les fanatiques religieux qui ont tué et tuent en France et la laïcité qui nous protège."
REX Shutterstock/SIPA

"Les laïques n’ont jamais massacré personne": une réponse à "La Croix"

Tribune

Par Jean-Pierre Sakoun

Publié le

Dans une tribune publiée sur le site du journal « La Croix », Olivier Abel, philosophe protestant, assure que de nouvelles « Saint-Barthélemy » se préparent en France. Cette fois-ci, imagine-t-il, ce sont les défenseurs « d'une France toute laïque » qui deviendront les nouveaux bourreaux. Agacé par l'indigence du propos, le président d'Unité laïque, Jean-Pierre Sakoun, lui répond.

Le 5 septembre 2022 dans un tweet que l’on pourrait qualifier ironiquement « d’événement antilaïque total », Claude Askolovitch signale que dans La Croix , quotidien catholique de référence, « le philosophe protestant Olivier Abel dit redouter de nouvelles Saint-Barthélemy que préparerait une laïcité changée, qui lui rappelle le parti catholique de 1572 ». Cette « laïcité changée » préparant, est-il besoin de le préciser, une Saint-Barthélemy des musulmans.

Voici comment en une phrase et dans une combinaison typique de l’alliance des bigots, qui se reforme toujours contre la liberté de conscience, catholicisme, protestantisme et islam sont convoqués pour mettre en accusation la sanglante laïcité qui prendrait pour victimes les malheureux croyants soumis à l’effroyable règle de l’intolérance, de la séparation et de la sécularisation !

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Oui, mais. Oui, mais ce sont bien les protestants qui massacrèrent les catholiques à Nîmes le 30 septembre 1567. Oui, mais ce sont bien les catholiques qui massacrèrent les protestants le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy. Oui, mais ce sont bien les mêmes catholiques qui massacrèrent des juifs dans notre pays à tant de reprises et dans tant de pogroms qu’il serait inutile et fastidieux d’en donner les lieux et les dates.

Oui, mais ce sont bien des musulmans fanatiques qui au nom de leur conception de leur religion ont massacré des Français de toutes origines et de toutes opinions, enfants, adultes et vieilles dames juives sans défense, soldats de l’armée française, policiers en uniforme, dessinateurs de presse libres-penseurs, amateurs de concerts et de terrasses, admirateurs d’une fête du 14 juillet, professeur d’histoire, « kouffars » égorgés au couteau au hasard.

« Ce sont bien les fanatiques religieux qui ont tué et tuent en France et la laïcité qui nous protège. »

Et les laïques, me direz-vous ? Eh bien, en France, les laïques n’ont jamais massacré personne au nom de la laïcité. Tout au plus ont-ils rappelé vigoureusement en 1905 à tous ceux qui s’opposaient à ce que l’Église et l’État fussent enfin séparés, que le dernier mot restait à la loi.

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Choisir le jour même de l’ouverture du procès post-mortem de l’assassin islamiste de Nice, coupable de la mort de 86 hommes, femmes et enfants, coupable d’avoir blessé 450 personnes, coupable d’avoir traumatisé à vie les milliers de proches de ces morts et de ces blessés, pour accuser la laïcité des maux qui sont ceux des fanatiques religieux n’est pas une erreur, n’est pas une faute, mais une forfaiture. Malgré les plaintes victimaires de monsieur Abel, de monsieur Askolovitch, de La Croix, des Frères musulmans, des salafistes et de leurs idiots utiles, ce sont bien les fanatiques religieux qui ont tué et tuent en France et la laïcité qui nous protège.

Malgré toutes les mises en garde honteuses, comme celles de messieurs Bianco, Cadène et Grzybowski , deux jours après le Bataclan, s’inquiétant d’un amalgame qui n’eut jamais lieu, sans un mot pour les victimes, les Français n’ont jamais renoncé à leur dignité universaliste en s’abaissant aux mêmes agissements que les fanatiques religieux. Il n’y a pas eu dans notre pays, et nous pouvons en être fiers, un seul mort musulman en représailles des massacres islamistes.

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Monsieur Abel, monsieur Askolovitch, vous nous confirmez que rien n’est pire pour une société que l’emprise religieuse et que rien n’est plus délétère que ce réflexe dogmatique qui pousse à opposer sans cesse les Français entre eux et à faire de ceux qui sont laïques et républicains les bourreaux des croyants, à rebours de toute réalité. La laïcité est notre trésor le plus sacré. Le postulat universaliste affirmant sans relâche que les êtres humains sont semblables avant d’être différents est notre guide vers l’émancipation. Monsieur Abel, monsieur Askolovitch, en ce jour de deuil et de commémoration, vous devriez être accablés de honte.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne