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Climat

Climat : « Nous sommes proches de plusieurs points de bascule »

Groenland.

Disparition de la calotte glaciaire du Groenland, mort des récifs coralliens… Les points de bascule climatique sont nombreux et pourraient intervenir dès 1,5 °C de hausse de la température mondiale, alertent des scientifiques.

Disparition des glaces, arrêt du Gulf Stream, dépérissement de la forêt amazonienne… la survenue de ces évènements à cause du changement climatique préoccupe de plus en plus la communauté scientifique. Une étude internationale parue dans Science vendredi 8 septembre fait la synthèse des connaissances scientifiques sur ces points de bascule du climat, autrement dit ces transformations terrestres drastiques et irréversibles au-delà de certains seuils de température. « Il devient clair que nous sommes déjà proches de plusieurs points de bascule, dont certains sont peu connus du public », commente pour Reporterre David Armstrong McKay, chercheur au Stockholm Resilience Centre et premier auteur de l’étude.

En plus de lister seize points de bascule identifiés aujourd’hui par les climatologues, l’étude précise les seuils de température auxquels ces basculements deviennent probables (voir la carte ci-dessous). Et montre ainsi que plusieurs points de bascule comme la disparition de la calotte glaciaire du Groenland ou la mort des récifs coralliens, seront probablement atteints dès une hausse de température de 1,5 °C. Sachant que le réchauffement mondial est aujourd’hui de 1,1 °C.

© Gaëlle Sutton/Reporterre

Les scientifiques expliquent depuis plusieurs années que des effets irréversibles sont prévisibles en deçà des 2 °C maximum de réchauffement, qui est pourtant l’objectif affiché par les États. Dans son cinquième rapport, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) avait ainsi révisé à la baisse sa fourchette des températures capables de déclencher des points de bascule. Certains phénomènes pourraient même se produire dès une hausse des températures mondiales de 1 °C. Autrement dit, on pourrait déjà avoir déclenché certains points de bascule sans le savoir. Et pour cause : avec l’inertie des phénomènes, ils ne seront pas observables avant longtemps, voire très longtemps.

« Cette étude fournit un solide soutien scientifique à l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris »

En effet, si les récifs coralliens pourraient disparaître en une dizaine d’années, le dégel du pergélisol se comptera en centaines d’années et les fontes des calottes glaciaires prendront plusieurs millénaires. Pour chaque point de bascule, l’étude précise ainsi à quelle échelle de temps ils vont advenir. Sachant que la fourchette de temps reste souvent imprécise : la disparition des glaciers de montagne pourrait prendre entre 50 et 1000 ans.

Avec cette synthèse, les auteurs montrent néanmoins que, malgré les fortes incertitudes qui pèsent sur les points de bascule, les connaissances scientifiques progressent grâce aux avancées de la paléoclimatologie, à la précision des observations actuelles et aux perfectionnements des modèles du climat.

Au-delà des éléments scientifiques, c’est un message politique que le Stockholm Resilience Centre veut faire passer. « Cette étude fournit un solide soutien scientifique à l’objectif plus ambitieux de 1,5 °C de l’Accord de Paris, qui minimiserait la probabilité de déclencher des points de bascule climatique. Cependant, plusieurs points de bascule sont encore possibles ou même probables à ce niveau, faisant probablement de 1 °C une limite plus sûre. Sachant que les politiques actuelles nous placent sur la trajectoire dangereuse de 2,6 °C. »

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