Accéder au contenu principal

"La mort partout autour de nous" : des inondations historiques submergent le Nigeria

Plus de 600 personnes sont déjà mortes dans les inondations qui ont touché le Nigeria en octobre, les pires depuis dix ans. Elles ont eu des effets très divers, allant de l'insécurité alimentaire aux pénuries de carburant, selon notre Observateur, qui apporte son aide aux populations touchées.

Une photo publiée sur Twitter le 18 octobre montre des populations touchées par les inondations dans l'État de Bayelsa, au Nigeria, qui dépendent des canoës pour se déplacer.
Une photo publiée sur Twitter le 18 octobre montre des populations touchées par les inondations dans l'État de Bayelsa, au Nigeria, qui dépendent des canoës pour se déplacer. © Twitter/@YeriDekumo
Publicité

Plus de 2 millions de personnes et 200 000 foyers ont été touchés par les inondations, selon le ministère nigérian des Affaires humanitaires. Les populations situées le long du fleuve Niger et de la rivière Benue ont été particulièrement touchées, le niveau de l'eau ayant atteint 13 mètres.

Des vidéos montrent des maisons et des locaux d'entreprise entièrement submergés, ainsi que des personnes tentant d'avancer alors qu'elles ont de l'eau jusqu'à la taille ou utilisant des canoës pour se déplacer.

"Nous avons déjà vécu des inondations, mais elles n'ont jamais été aussi graves"

Layefa Oboh est étudiante et entrepreneue à Yenagoa, capitale de l'État de Bayelsa, au cœur de la région du delta du Niger. Au moins 700 000 personnes ont été déplacées dans cet État. 

Les écoles ont été fermées, puis les inondations ont touché les maisons et les terres agricoles. L'eau a atteint des lieux de stockage où les gens entreposaient leurs produits : manioc, plantains, poivrons récoltés, tomates, concombres, tout. Ma propre maison a été inondée, j'ai dû faire mes valises et partir. Il y a beaucoup de gens qui ont dû, comme moi, quitter leur maison : les inondations ont pris le dessus. Ils restent dans les écoles qui n'ont pas été envahies par les inondations ou montent des tentes sur les hauteurs.

Certaines régions du Nigeria connaissent des inondations tous les ans, dues aux fortes pluies, mais aussi à cause de l’eau relâchée par un barrage situé dans le Cameroun voisin. À la mi-septembre, les autorités camerounaises ont commencé à libérer l'excès d'eau du réservoir, ce qui a entraîné son écoulement par la rivière Benue, vers le Nigeria. 

Un barrage tampon en aval avait été prévu par le Nigeria en 1982, mais celui-ci n'est toujours pas achevé. Un mémorandum d’entente entre les deux pays vise normalement à prévenir les inondations liées à l'ouverture du barrage, mais beaucoup estiment que les autorités nigérianes ne font pas assez pour prévenir les risques.

Le réchauffement climatique, qui touche de manière démesurée l'Afrique subsaharienne, est également considéré comme l'une des causes à l'origine des précipitations particulièrement abondantes de cette année, qui surviennent à la fin de la saison des pluies au Nigeria.

Layefa Oboh poursuit :

Nous avons déjà vécu des inondations, mais elles n'ont jamais été aussi graves. Vous ne pouvez plus utiliser de véhicules, mais des bateaux pour vous déplacer. C'est très dangereux. J'ai même connu une personne qui a essayé, mais les inondations l'ont emportée et elle est décédée. Quand vous vous déplacez en canoë, vous voyez la mort partout autour de vous. Vous voyez des reptiles dangereux, parfois même des cadavres. Il y a eu des cas de personnes disparues et dont le corps est revenu à la surface un jour ou deux plus tard. 

De nombreuses personnes sont mortes en tentant d'échapper aux inondations. Un bateau a chaviré dans l'État d'Anambra et entraîné la mort de 76 personnes, le 7 octobre dernier.

Cette tragédie laisse également présager l'imminence d'une crise sanitaire et humanitaire, les populations étant confrontées à des pénuries de produits de base et d'eau potable. Les cadavres, les déchets et les eaux usées présentent des risques sanitaires supplémentaires pour les personnes qui doivent patauger dans les rues inondées.

Face aux 110 000 hectares de terres cultivables détruites, les agriculteurs nigérians ont averti que les prix risqueraient d’augmenter. 

"Le peu que nous avons dans cet État est accaparé"

Selon Layefa Oboh, les inondations ont eu un effet immédiat sur les prix :

Les inondations ont entraîné une inflation vertigineuse des prix des denrées alimentaires et de l'eau. Nous avons normalement de l'eau [potable] qui vient d'autres États, mais maintenant les produits ne peuvent plus être acheminés. Les inondations ont détruit la route de l'État de Delta à l'État de Bayelsa. Le peu que nous avons dans cet État est accaparé. Les gens vous vendent des choses à des prix exorbitants. Nous sommes également confrontés à une pénurie de carburant. Avant, nous pouvions obtenir de l'essence à 180 nairas le litre [0,42 euros], mais aujourd'hui j'ai acheté du carburant à 550 nairas le litre [1,28 euros]. C'est scandaleux.

"Personne ne nous vient en aide" 

Le gouvernement dit qu'il a débloqué de l'argent, qu'il a acheté des choses, mais les gens n'ont rien reçu de tout cela. Personne ne nous vient en aide, nous ne recevons aucun soutien matériel. Mes amis et moi, ainsi que d'autres personnes, utilisons le peu d'argent que nous avons additionné à ce que nous avons obtenu à travers les donations publiques pour acheter des choses et nous rendre dans les camps improvisés pour personnes déplacées afin de partager du matériel de secours.

Les dernières inondations de cette ampleur au Nigeria remontent à 2012. On estime que celles de cette année ont causé au moins 17 milliards d'euros de dégâts.

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.