États-Unis: Refuser des clients gays? La Cour suprême rouvre le débat

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États-UnisRefuser des clients gays? La Cour suprême rouvre le débat

Lorie Smith, chrétienne pieuse, ne veut pas créer de pages web pour des mariages homosexuels. La haute juridiction se penche sur son cas.

Conceptrice de sites Internet, Lorie Smith refuse de créer des produits allant à l’encontre de ses convictions.

Conceptrice de sites Internet, Lorie Smith refuse de créer des produits allant à l’encontre de ses convictions.

Capture d’écran YouTube

Les commerçants américains peuvent-ils refuser de servir des clients homosexuels au nom de leurs convictions religieuses? La Cour suprême, solidement ancrée dans le conservatisme, rouvre lundi ce débat ultrasensible dans une affaire ayant un fort goût de «déjà-vu». En 2018, la haute juridiction avait botté en touche dans un dossier porté par un pâtissier chrétien qui refusait de faire un gâteau de mariage pour un couple gay. Elle lui avait donné raison sur des motifs annexes sans édicter de grands principes généralisables.

La question, très clivante aux États-Unis, n’a pas tardé à émerger de nouveau, posée cette fois par une conceptrice de site Internet: Lorie Smith, qui se définit comme une chrétienne pieuse, ne veut pas créer de pages web pour des mariages entre personnes de même sexe. Comme le pâtissier Jack Phillips, elle travaille dans le Colorado, où une loi interdit depuis 2008 les discriminations sur la base de l’orientation sexuelle.

Contrairement à lui, elle n’a toutefois pas été sollicitée par des clients gays, ni a fortiori inquiétée par les autorités. Cela ne l’a pas empêchée d’attaquer la loi du Colorado en justice, de manière préventive. Après avoir perdu en première instance et en appel, elle s’est tournée vers la Cour suprême qui a accepté d’intervenir en limitant la question à la liberté d’expression des commerçants dont le travail a une dimension artistique.

«Lorie est prête à faire des sites personnalisés pour tout le monde, y compris pour ceux qui se disent LGBT, tant que le message n’entre pas en conflit avec ses opinions», ont écrit ses avocats dans un argumentaire transmis à la Cour avant l’audience. Mais «forcer des artistes, comme des peintres, des photographes, des auteurs, des graphistes ou des musiciens à transmettre des messages qui violent leurs convictions bafoue le premier amendement de la Constitution» garant des libertés d’expression et de religion, ont-ils ajouté.

Le gouvernement du côté du Colorado

Reflétant les profondes divisions de la société américaine, de nombreux acteurs se sont joints à la procédure en soutien de Lorie Smith (élus républicains, groupes religieux, associations conservatrices) ou du Colorado (élus démocrates, défenseurs des minorités…) Le gouvernement américain, qui sous Donald Trump avait appuyé le pâtissier Jack Phillips, défend cette fois la position du Colorado. Sa loi «n’oblige pas à adopter ou relayer un message prescrit par les autorités», écrit la représentante de l’administration démocrate de Joe Biden.

Relevant que de nombreux commerces ont une dimension créative, les associations de défense des minorités ont appelé la Haute Cour à rejeter les arguments de Lorie Smith. Sinon, «des architectes pourraient refuser de dessiner des maisons pour des familles noires, des pâtissiers de préparer des gâteaux d’anniversaire pour des enfants musulmans, des fleuristes de fournir des bouquets pour l’enterrement d’une personne homosexuelle», a énuméré David Cole, le directeur de l’ACLU, lors d’une présentation à la presse.

(AFP)

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