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Emploi

Comment faire pour tout plaquer et se lancer dans l'humanitaire?

5.000 missions humanitaires internationales sont à pourvoir dans les ONG françaises chaque année. Intéressé? Voici les 5 questions à vous poser avant de dire oui.
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Des soldats philippins et taïwanais décharchent de l'aide humanitaire à l'aéroport de Mactan-Cebu, aux Philippines, le 13 novembre.
Des soldats philippins et taïwanais décharchent de l'aide humanitaire à l'aéroport de Mactan-Cebu, aux Philippines, le 13 novembre.
AFP PHOTO / Taiwan Military News Agency

S'investir dans l'humanitaire comme bénévole sur son temps libre, c'est une chose. En faire son métier rémunéré, c'en est une autre. Surtout quand on a commencé par un parcours classique, et que cela fait dix ou vingt ans que l'on occupe un poste à responsabilités, assorti d'un salaire confortable et du niveau de vie qui va avec.

Et pourtant, nombreux sont les salariés français qui se sont déjà surpris à rêver d'un métier plus humain, utile à la société. C'est pour les aider à franchir le cap que Hervé Dubois, président et fondateur de l'Institut de Coopération Internationale, a créé il y a deux ans le dispositif "Reconversion Humanitaire". Ce programme sélectionne entre 30 et 50 salariés chaque année pour les accompagner dans leur projet de reconversion professionnelle, et leur permettre de s’engager dans l’action humanitaire internationale, en tant que salarié. Le coût pour les participants? Environ 9.000 euros les 10 mois, déboursés par l'entreprise soit via un service d'aide à l'entrepreneuriat, soit suite à un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), soit au terme de négociations suite au départ volontaire du salarié, soit dans le cadre du droit à la formation.

"L'envie de voyage, c'est quelque chose que je constate depuis longtemps, mais ce qui a pris de l'importance au cours des dernières années, c'est l'envie d'avoir du sens", constate Hervé Dubois. "Les salariés ont à peu près tous le même discours: 'Je suis cadre supérieur ou moyen, j'ai des enfants qui sont grands, ce que je veux maintenant, c'est faire quelque chose qui a du sens, et dans lequel je me retrouve. J'ai travaillé pour le grand capital pendant 20 à 30 ans, et les 20 ans qu'il me reste, j'aimerais les consacrer à l'intérêt général.'"

Vous êtes décidés à vous reconvertir dans l'humanitaire ? Voici les questions à vous poser avant de tout plaquer.

1. L'humanitaire est-il fait pour vous?

Non, pas forcément. Hervé Dubois met d'emblée les points sur les "i": on ne se lance pas dans l'humanitaire par défaut, juste parce qu'on ne trouve pas d'emploi ailleurs. Il faut une vraie motivation, et les compétences adéquates. Donc, même si le programme "Reconversion Humanitaire" est ouvert largement et s'adresse à trois types de profils (les salariés en mobilité externe après un départ volontaire, un plan de licenciement ou un projet personnel, les demandeurs d’emploi, et les seniors qui souhaitent s’engager dans une nouvelle carrière solidaire), tous ne seront pas retenus.

"Quand nous rencontrons les candidats sélectionnés, nous opérons déjà une première sensibilisation. Nous plantons le décor pour ces personnes qui ont très peu de culture du monde des ONG. Nous sommes francs dès le départ, nous parlons des difficultés et du contexte", explique le président de l'Institut de Coopération Internationale. "Une fois que c'est fait, nous étudions le potentiel de la personne. Il faut que son profil et ses capacités soient en adéquation avec ce que demandent les ONG. Si nous estimons que la personne n'a pas les atouts requis, nous lui disons."

2. Quels sont les profils recherchés?

"Il y a des postes de managers et de techniciens", explique Hervé Dubois. "Pour les postes de coordinateurs ou managers, les ONG cherchent des personnes qui ont une capacité d'organisation, de gestion des ressources humaines ou des finances. Pour les postes techniques, seront très appréciés des techniciens de la logistique, des techniciens de l'eau, ou dans le domaine de l'énergie, et aussi des personnes du domaine médical." Autrement dit, l'humanitaire est en quête de profils opérationnels, pas intellectuels.

"Si quelqu'un a été professeur d'histoire ou a fait du marketing en bureau d'études mais n'a pas touché à la technique, on aura du mal à lui trouver un poste. Les ONG préfèrent un mécanicien qu'un professeur. L'humanitaire est particulier en cela: vous pouvez avoir tous les diplômes de la terre, cela ne suffit pas. Il faut avoir les capacités à transférer ses compétences dans un contexte différent. Par exemple, le problème avec les masters qui sont se créés au cours des dernières années pour former à l'humanitaire, c'est qu'ils sont extrêmement théoriques mais ne forment pas au côté opérationnel et pratique des ONG." Le dispositif "Reconversion humanitaire", lui, prévoit une formation qui allie théorie et pratique, avec un stage de plusieurs mois en ONG, qui débauche souvent sur un recrutement.

3. Combien de postes sont à pourvoir?

"Selon les estimations de nos partenaires, chaque année 5.000 à 6.000 postes sont ouverts pour des missions humanitaires internationales dans des ONG françaises, ce qui peut augmenter de quelques centaines s'il y a une catastrophe", déclare Hervé Dubois. "Mais attention, ils ne sont pas tous ouverts à des néopartants. Les deux tiers sont préemptés par l'inter et l'intra-ONG."

4. Quel est le meilleur moment pour se lancer?

Pour Hervé Dubois, deux possibilités se présentent à vous: vous lancer avant 25 ans ou après 45 ans. "Il ne faut pas avoir trop de charges personnelles et familiales, ce n'est souvent pas compatible avec l'humanitaire international. Soit vous êtes célibataire ou sans famille, soit la maison est déjà payée et les enfants sont autonomes." Agnès, la quarantaine, sans enfants, a ainsi lâché son poste à responsabilités chez Veolia transport pour se lancer dans l'humanitaire avec l'aide du dispositif "Reconversion Humanitaire." Après Haïti et les Philippines, elle se trouve désormais en Centrafrique. "C'est le cas de la fille qui avait un très bon job, sûrement bien payé, mais ne trouvait pas son compte en termes de sens", justifie Hervé Dubois.

Pour les plus jeunes, des opportunités existent dès la sortie d'école. "Les ONG apprécient les jeunes diplômés de Sciences Po ou d'écoles de commerce, car ils ont la tête bien faite, ont de l'expérience en gestion." Mais elles sont également à la recherche de profils plus expérimentés. "Au cours des cinq-dix dernières années, les ONG ont commencé à dire: 'nos équipes sont trop jeunes, on aimerait bien mixer un peu avec des cadres plus âgés, plus mûrs'."

Mais pour le créateur du dispositif "Reconversion humanitaire", l'idéal , c'est de se reconvertir après 45 ans, mention spéciale pour les seniors. "Si dans le secteur marchand on est moins considéré après 55 ans, dans l'humanitaire, au contraire, un senior préparé qui sait adapter son savoir- faire, sa sagesse par rapport à un projet, est valorisé", constate-t-il. Exemple? Régine, 58 ans, dont les enfants sont autonomes, a quitté son poste de responsable des ressources humaines chez Schneider Electric à l'heure de la retraite, et se consacre désormais au développement de projets au Bénin. 

5. Est-ce que je serai moins bien payé?

De manière générale, oui. Hervé Dubois considère que les salariés de l'humanitaire sont rémunérés 30% de moins que dans le secteur marchand. Il rappelle toutefois l'existence, parfois, de conditions d'expatriation intéressantes. Sans compter que, comme dans le privé, pour recruter certains talents précieux destinés à des postes stratégiques (directeur de communication ou marketing, par exemple), les ONG n'hésitent pas à mettre le prix qu'il faut. 

 

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