À cause d’une mauvaise traduction, les Européens se soignaient en mangeant des momies
Au Moyen-Âge, le cannibalisme était plébiscité pour ses prétendues vertus médicinales et était complètement assumé.
- Publié le 18-05-2023 à 10h53
National Geographic rapporte que pendant longtemps, les corps embaumés étaient prisés sur le continent européen. L’anthropophagie a convaincu les Européens sur base d’une mauvaise traduction d’une langue orientale. La consommation de certaines parties de momies égyptiennes, et ensuite de cadavres embaumés de toutes sortes, a débuté au XIe siècle. Il n’était alors pas rare de trouver sur les étals des apothicaires des morceaux de corps humains embaumés ou momifiés. Il était également possible de se procurer quelques grammes de poudre de corps humain, connu à l’époque en tant que remède efficace contre le mal de tête, les aigreurs d’estomac, voire le cancer.
Mais comment une telle croyance a vu le jour ?
L’historien Karl Dannenfeldt affirme que des mauvaises traductions et des malentendus seraient à l’origine de cette pratique. C’est le mot “mumia” qui serait à l’origine de cette erreur. Il s’agit d’une substance présente sur le flanc d’une montagne de Darabjerd, en Perse (Iran), d’où de l’asphalte naturel suintait d’une roche noire. Elle était reconnue pour ses multiples qualités curatives, utilisée à de nombreuses fins médicales et réputée dans le monde arabe comme étant chère, rare et efficace. Ce remède se répand dans la littérature arabe et est appelé le “mum”, mot local pour “cire”.
À cette époque, les Européens organisent les premières croisades, vers Jérusalem et donc vers l’Orient. Ils découvrent alors les richesses de la civilisation islamique. Ils ont commencé à traduire ses textes mais ont commis quelques erreurs. Pour Karl Dannenfeldt, les traducteurs du XIe et du XIIe siècles ont identifié à tort le “mumia” comme une substance sécrétée par des corps conservés dans les tombes égyptiennes (le mot ressemble fortement à “mummia”, qui signifie momie en latin médiéval). Cette conviction est renforcée par le fait que certaines momies sont embaumées avec de l’asphalte naturel.
Les hommes de l’époque ont donc pratiqué ce qu’on appelle du “cannibalisme médical”. Les médecins pensaient avoir découvert un nouvel antidote fabriqué à partir du corps humain. D’après National Geographic, les gens se sont mis à piller les tombes égyptiennes pour trouver de la chair embaumée. La demande a tellement explosé que des trafics de fausses momies se sont mis en place. Des voleurs de corps récupéraient des corps d’esclaves ou de prisonniers pour les embaumer et les revendre.
Cette confusion a duré plusieurs centaines d’années, jusqu’à la fin du Moyen-Âge. Karl Dannenfeldt explique qu’au 16e siècle (début de la période moderne), des voyageurs européens ont commencé à décrire le lieu de la source de médicaments bitumineux sur les flancs d’une montagne en Perse. Le lien a alors été fait et la pratique de manger de la momie s’est finalement perdue.