C’est un triste record. En 2022, 61 millions de nouveaux déplacés internes étaient comptabilisés dans le monde. Si les conflits font partie des principales causes, les catastrophes naturelles, dont la fréquence et l’intensité sont renforcées par le changement climatique, sont responsables de plus de la moitié de ces déplacements.

Tandis qu’en Irak, la sécheresse prive de travail les agriculteurs forcés de rejoindre les villes pour survivre, en Birmanie et au Bangladesh, l’ouragan Mocha a provoqué ces derniers jours l’évacuation de milliers d’habitants et de réfugiés rohingyas. Deux catastrophes climatiques aux conséquences similaires : des déplacements de populations internes toujours plus importants. Fin 2022, ils concernaient plus de 71 millions de personnes selon le dernier rapport de l’Internal Displacement Monitoring Centre (IDMC) et du Norwegian Refugee Council (NRC), dont 61 millions de nouveaux déplacés. Parmi ces nouveaux déplacés, plus de la moitié (32,6 millions) l’étaient en raison de catastrophes naturelles.

 

Ce nombre est “extrêmement élevé”, a déclaré à l’AFP la cheffe de l’IDMC, Alexandra Bilak. “Une grande partie de l’augmentation est causée, bien sûr, par la guerre en Ukraine, mais aussi par les inondations au Pakistan (…) et par un certain nombre de catastrophes soudaines ou lentes que nous avons vues depuis les Amériques jusqu’au Pacifique”, explique-t-elle. Une “tempête parfaite”, selon le chef du NRC, Jan Egeland. “Les conflits et les catastrophes se sont combinés pour aggraver les vulnérabilités et les inégalités préexistantes, provoquant des déplacements à une échelle jamais vue auparavant”, souligne l’expert dans un communiqué.
Infographie déplacé climatiques 2022 1

 

Inondations et sécheresses pointées du doigt

 

Si beaucoup de ces déplacés sont victimes de conflits qui durent depuis des années, les catastrophes naturelles sont responsables de la plupart des nouveaux déplacements internes. Les auteurs du rapport pointent du doigt le phénomène climatique La Niña, entraînant “le refroidissement à grande échelle des températures de surface dans l’océan Pacifique équatorial”, qui a provoqué des inondations records au Nigeria, au Brésil ou encore au Pakistan. Le pays est d’ailleurs le plus fortement touché avec 8,2 millions de déplacements internes en 2022, “ce qui en fait l’événement de déplacement le plus important au monde au cours des dix dernières années”.

 

La Niña est également accusée d’avoir alimenter de graves sécheresses dans la Corne de l’Afrique. Rien qu’en Somalie, où la pluie manque depuis maintenant cinq ans, 1,1 million de personnes déplacées ont été enregistrées. Il s’agit du chiffre “le plus élevé au niveau mondial depuis 2017, année où les données sur les déplacements dus à la sécheresse ont commencé à être relevées” selon l’IDMC. En compromettant les récoltes agricoles et l’élevage de bétail, la sécheresse a par ailleurs dégradé la sécurité alimentaire de la région, aggravant le phénomène de déplacement.

 

“Personne n’est complètement à l’abri”

 

Pour certains habitants, un retour à la normale s’est fait attendre. Ils étaient 8,7 millions, répartis dans 88 pays, à n’avoir toujours pas retrouvé leur logement à la fin de l’année 2022. C’est par exemple le cas dans les Philippines ou à Madagascar, où “des catastrophes consécutives ont contraint les populations à fuir à plusieurs reprises, compromettant leur rétablissement et prolongeant leur déplacement”, relatent les auteur de l’étude.

 

De leur côté, les pays occidentaux ne sont pas non plus épargnés. Aux États-Unis, 675 000 déplacés climatiques ont été dénombrés durant l’année. C’est le deuxième pays le plus touché du continent américain derrière le Brésil, principalement en raison de tempêtes et d’inondations. “Personne n’est complètement à l’abri, il va falloir prendre la mesure de cette urgence, même pour des pays qui ont beaucoup de moyens”, affirmait il y a quelques semaines Thibault Laconde, président de Callendar, à ce sujet. En Europe, ce sont les incendies de forêt, en particulier sur le bassin méditerranéen, qui ont poussé les habitants à fuir. On compte ainsi 107 000 déplacés pour l’année 2022 dans la région.
Florine Morestin avec AFP
Découvrir gratuitement l'univers Novethic
  • 2 newsletters hebdomadaires
  • Alertes quotidiennes
  • Etudes