cancer de la peau

Flambée des cancers de la peau: les raisons d’une inquiétante augmentation

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

A l’heure où la plupart des gens sont bien conscients des dangers du soleil, le nombre de cancers de la peau  continue à augmenter fortement en Europe. Comment expliquer une telle explosion ?

Le cancer de la peau est la forme de cancer la plus courante en Belgique (40% des cancers). Selon les estimations, une personne sur cinq y sera confrontée avant l’âge de 75 ans. D’après la Fondation contre le Cancer, c’est le seul cancer qui a connu une augmentation aussi significative au cours de ces deux dernières décennies.

Chaque année, 46.000 nouveaux cas de cancers de la peau sont détectés en Belgique. « On est passé de 11.373 incidences en 2004 à 45.642 en 2019, soit une augmentation de 400% en 15 ans », rapporte l’association Euromelanoma. Cette explosion des tumeurs cutanées affecte toutes les tranches d’âge, y compris les jeunes de 16 à 25 ans.

D’après une étude menée auprès de presque 400 000 Européens, les coups de soleil graves avant l’âge de 18 ans augmenteraient en de près de 20% le risque de développer des lésions suspectes à l’âge adulte. « Il s’agit de coups de soleil agressifs, c’est-à-à-dire douloureux et qui durent entre un et deux jours, pouvant s’accompagner de bulles. L’aspect de brûlure est important », explique Véronique del Marmol, dermatologue à l’hôpital Erasme et présidente d’Euromelanoma.

Vitamine D

Une grande majorité des cancers de la peau sont causés par une exposition excessive aux rayons ultraviolets (UV), émis par le soleil, et par les bancs solaires. Les rayons UV sont indispensables à notre santé, car ils déclenchent notamment la production de vitamine D, mais ils peuvent aussi endommager la peau. D’où l’importance de trouver un juste équilibre entre carence en vitamine D et exposition au soleil. « Cette production de vitamine D s’arrête automatiquement dès qu’un certain seuil est atteint. Il ne sert donc à rien de s’exposer plus longtemps au soleil dans le but de produire davantage de vitamines D.  Au contraire, si on s’expose trop longtemps, on augmente le risque de cancer de la peau », met en garde la Fondation contre le Cancer.

Comment expliquer cette explosion de cas de cancers de la peau? « Premièrement, l’espérance de vie a augmenté. Le cancer de la peau se déclare généralement assez tard et donc il faut attendre l’âge adulte avancé pour en développer un. Une exposition dans l’enfance ou la jeunesse peut donner un cancer de la peau 20, 30 ou 40 ans plus tard», explique Véronique del Marmol.

Deuxièmement, nos attitudes par rapport à l’exposition solaire ont complètement changé. « Il y a 40 ans, on ne voyageait pas autant qu’aujourd’hui. On a commencé à s’exposer il y a 40 ou 50 ans, mais on s’exposait moins longtemps, moins fréquemment, car les congés étaient plus limités, et on allait moins loin. Aujourd’hui, tout le monde peut aller en Thaïlande pour pas cher. Là-bas, le soleil est beaucoup plus agressif. Tout cela a complètement changé, et on voit les conséquences maintenant. »

Le carcinome basocellulaire

Si le mélanome est connu comme la forme la plus agressive de cancer de la peau, il reste le type le moins fréquent en Belgique. Selon des chiffres de 2020, le carcinome basocellulaire – plus fréquent après l’âge de 45 ans – représente près de 70% des cancers cutanés en Belgique. Le carcinome spinocellulaire – plus courant chez les personnes de 60 ans et plus – concerne lui près de 20% des cas.

S’ils sont moins agressifs et présentent de meilleures chances de guérison, ces types de cancer touchent plus facilement les travailleurs qui restent longtemps à l’extérieur. Une étude de la Fondation contre le Cancer montre que les personnes exposées longuement aux rayons UV sont 77% plus susceptibles, par rapport à la population générale, de développer un carcinome spinocellulaire. Et leur risque de développer un carcinome basocellulaire augmente de 43%. Or, on compte plus de 14 millions de travailleurs actifs à l’extérieur en Europe, selon des chiffres de l’Union européenne en 2019.

Un dégât de l’ADN

Véronique del Marmol rappelle que le mécanisme de bronzage est lié à un dégât de l’ADN. « Nous sommes remplis de mutations liées aux UV. Nous sommes tous originaires d’Afrique. Nous étions tous noirs et protégés contre les cancers de peau. Nous avons migré vers différents continents, dont l’Europe, et pour améliorer la synthétisation de la vitamine D, nous sommes devenus de plus en plus clairs », déclare-t-elle.

Pour se protéger, la Fondation contre le cancer rappelle ses recommandations de base : rester le plus possible à l’ombre, porter des vêtements protecteurs (chemise, chapeau, lunettes de soleil), et appliquer de la crème solaire à haut indice de protection.

A côté de cela, il est également important de procéder régulièrement à un autoexamen. L’association Euromelanoma conseille de surveiller « les taches qui changent de couleur, de taille ou de forme, qui ont un aspect différent des autres, qui sont asymétriques ou ont des bords irréguliers, qui ont un diamètre de plus de 6mm qui sont rugueuses ou squameuses, sont multicolores, provoquent des démangeaisons, saignent ou suintent, ont un aspect perlé et qui ressemblent à une blessure qui ne guérit pas. » En cas de lésion suspecte, il faut évidemment consulter un dermatologue.

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