Renversé par un employé d'ambassade, un livreur sans papiers risque l'expulsion

Le chauffard ivre, cuisinier à l'ambassade de Chine, s'abrite derrière son immunité diplomatique. La victime est menacée d'expulsion.

Par Lise Lacombe pour Le Point

À peine sorti de l'hôpital, le livreur philippin sans papiers a été convoqué par les enquêteurs. 
À peine sorti de l'hôpital, le livreur philippin sans papiers a été convoqué par les enquêteurs.  © ADRIEN FILLON / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Temps de lecture : 3 min

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En mai dernier à Paris, un livreur de 30 ans a été victime d'un accident de la route. Au volant, un chauffeur ivre, employé de cuisine de l'ambassade de Chine. Tandis que ce dernier a été libéré sans suite, le livreur sans papiers, blessé dans l'accident, a tout perdu : son scooter, son travail, et risque l'expulsion, comme le raconte Le Parisien.

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Kamel, chauffeur de taxi, a été témoin des faits alors qu'il rentrait du travail. Il y a un mois, avenue Bosquet à Paris, à deux pas de l'ambassade de Chine, un conducteur percute de plein fouet un homme en scooter.

Le témoin raconte au Parisien avoir vu la voiture aux plaques diplomatiques « redémarrer en trombe » à un feu vert avant de perdre le contrôle. Le conducteur a « défoncé le feu tricolore, tourné comme une toupie, fait un tonneau et, sur son passage, projeté le livreur sur son scooter avec son sac Uber Eats », raconte Kamel, qui se précipite pour lui venir en aide. 

Le chauffard tente de s'enfuir

Blessé, le conducteur du scooter refuse d'appeler les secours parce qu'« il n'avait pas de sécu ». Arrivés sur place, les pompiers le persuadent d'aller à l'hôpital. À peine sorti de l'établissement de santé, ce livreur philippin sans papiers a été convoqué par les enquêteurs la semaine dernière et se trouve sous le coup d'une obligation de quitter le territoire (OQTF).

Des conséquences lourdes pour la victime de l'accident, tandis que le chauffard a brandi son immunité diplomatique. Au moment de l'accident, cet employé de cuisine de l'ambassade de Chine avait tenté de s'enfuir. Kamel, qui lui a porté secours, se souvient que l'intérieur de la voiture « puait l'alcool » et que « le premier réflexe » du chauffeur a été de « prendre son sac et de partir ». Mais le témoin de l'accident l'a retenu de force en attendant la police.

Selon une source policière, un représentant de l'ambassade de Chine se déplace à la rencontre de l'homme à qui il faudra deux heures pour accepter de se soumettre à un test d'alcoolémie. Un policier présent explique : « Il était à plus de 0,56 [g/litre de sang]. Ce qui laisse présumer le taux au moment du choc, deux heures plus tôt. » Malgré tout, l'homme avait pu repartir libre en raison de son immunité diplomatique. 

La justice impuissante

Une source au ministère de l'Intérieur, citée par Le Parisien, regrette l'impuissance des magistrats. Dans les dossiers d'immunité diplomatique, « la plupart du temps, ils n'ont même pas le droit d'entendre les suspects ». Un magistrat peut tout de même prendre la décision de poursuivre l'auteur d'un accident, selon « le pays concerné » et « le degré d'immunité dont jouit le conducteur ». 

L'ambassade de Chine, interpellée sur Twitter par Kamel, le témoin « révolté » de l'accident, n'a pas souhaité s'exprimer. Elle assure ne pas avoir d'« information sur l'affaire ». 

À LIRE AUSSI Uber, Deliveroo, Take Eat Easy : les procès de l'ubérisation

De son côté, Uber affirme que le livreur ne travaille pas pour la plateforme. Le porte-parole explique avoir vérifié toutes les courses du secteur au moment de l'accident, mais qu'aucune « n'est arrivée à destination ». Le service de livraison de repas évoque la possibilité que des livreurs indépendants « utilisent les sacs Uber » pour travailler pour d'autres plateformes. 

Le livreur philippin est pour l'heure injoignable, précisent nos confrères, préférant rester anonyme. L'affaire, toujours en cours, a été confiée au service de traitement judiciaire des accidents (STJA) de la préfecture de police de Paris.

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Commentaires (21)

  • Sin Pous

    Le livreur sans papier sous le coup d'une OQTF a plus de droits de rester dans notre pays que les citoyens présents depuis des milliers d'années

  • Yuropp

    @ tarvos le 19/06/2023 à 19 : 03 : "Ce chauffeur est à expulser sans délai comme délinquant ! "

    Non. "à expulser sans délai" … tout court. La France n'a aucune raison ni justification à donner.

  • Raymonde Bidochon

    L’immunité diplomatique est à double sens. Celle qui protège le conducteur chinois en France est la même que celle qui protège les gens de l’ambassade française en Chine contre les lois chinoises. Ça leur évite de passer quinze ans en prison pour un délit d’opinion ou un non respect du confinement.