Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Après la nomination de Geoffroy Lejeune à la tête du « JDD », la ministre de la culture s’alarme

Rima Abdul Malak a affirmé dimanche qu’elle comprenait les inquiétudes de la rédaction du « Journal du dimanche », en grève depuis la nomination d’un nouveau directeur marqué à l’extrême droite.

Le Monde avec AFP

Publié le 25 juin 2023 à 11h49, modifié le 25 juin 2023 à 15h25

Temps de Lecture 3 min.

La ministre de la culture a fait part, dimanche 25 juin, de sa vive inquiétude pour les « valeurs républicaines » en raison de la situation au Journal du dimanche (JDD), en grève pour empêcher l’arrivée prévue d’un nouveau directeur marqué à l’extrême droite.

Le journal, désormais contrôlé par Vincent Bolloré, est à l’arrêt depuis jeudi et le vote d’une grève qui a empêché sa parution dimanche. Elle a été reconduite samedi soir jusqu’à mercredi à la quasi-unanimité.

En cause, l’arrivée de Geoffroy Lejeune, licencié de l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs actuelles, comme directeur de la rédaction. Officielle depuis vendredi soir, cette arrivée est une « ligne rouge » pour la rédaction, considère la société des journalistes (SDJ) du JDD, qui demande à la direction de renoncer à cette nomination. « La rédaction du JDD refuse d’être dirigée par un homme dont les idées sont en contradiction totale avec les valeurs du journal », a-t-elle ajouté.

« Mon rituel du dimanche, c’était de me réveiller avec le JDD. Aujourd’hui il ne paraît pas », a écrit, dimanche, Rima Abdul Malak sur Twitter. « Je comprends les inquiétudes de sa rédaction. En droit, le JDD peut devenir ce qu’il veut, tant qu’il respecte la loi. Mais pour nos valeurs républicaines comment ne pas s’alarmer ? », a-t-elle poursuivi.

« Des idées en contradiction totale avec les valeurs du journal »

La formulation de la ministre de la culture a été critiquée par le patron de Mediapart, Edwy Plenel : « Un capitaliste qui possède un média ne doit pas pouvoir en faire “ce qu’il veut”. En ne respectant pas l’indépendance des rédactions, il s’attaque à un droit fondamental, la liberté de l’information », a-t-il rétorqué.

Comme lui, la spécialiste de l’économie des médias Julia Cagé a souligné que le JDD recevait des aides publiques de l’Etat. Sur Twitter, elle a appelé la ministre de la culture à « utiliser ce levier » : « Vous ne pouvez pas accepter que l’on piétine ainsi l’indépendance des journalistes (…) Il en va de la bonne santé de la démocratie en France. »

Des déclarations qui rejoignent la principale revendication des salariés en grève : que la direction renonce à nommer M. Lejeune directeur de la rédaction. « La rédaction du JDD refuse d’être dirigée par un homme dont les idées sont en contradiction totale avec les valeurs du journal », a fait savoir la Société des journalistes.

Ils redoutent de voir se répéter une méthode déjà dénoncée ailleurs dans les médias contrôlés par Vincent Bolloré : valse des dirigeants et interventions sur la ligne éditoriale, peur qu’elle ne bascule à l’extrême droite, au prix d’une éventuelle hémorragie de journalistes.

Des journalistes apportent leur soutien aux grévistes du « JDD »

Dimanche, une trentaine de sociétés des journalistes de grands médias, dont Le Monde, France Télévisions, Le Figaro, Le Parisien, Libération, Radio France ou encore Paris Match, ont apporté leur soutien aux journalistes grévistes du JDD, dans une tribune publiée sur Mediapart.

« La nomination de Geoffroy Lejeune, ancien directeur de la rédaction de l’hebdomadaire d’extrême droite Valeurs actuelles, dont les contenus haineux ont été condamnés par la justice, est incompatible avec les valeurs que porte le journal depuis soixante-quinze ans », soulignent-ils.

Sous la direction de M. Lejeune, Valeurs actuelles a en effet été condamné en appel à une amende de 1 000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée de La France insoumise Danièle Obono. En cause, un article et un dessin parus en août 2020 sous le titre « Obono l’Africaine », où l’élue d’origine gabonaise était représentée en esclave.

La cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, a fait part de son « total soutien aux journalistes du JDD », estimant que « l’extension de l’empire médiatique de Bolloré [était] un grave danger pour la démocratie ».

Une inquiétude largement partagée à gauche, où plusieurs responsables politiques ont dénoncé l’ambition supposée du milliardaire, qui contrôle désormais plusieurs grands médias (comme Canal+, Paris Match, Europe 1 et CNews), de préparer le terrain à une prise de pouvoir de l’extrême droite dans la perspective de la présidentielle de 2027.

La députée écologiste Sandrine Rousseau a apporté son soutien aux salariés du journal, et le chef du Parti socialiste, Olivier Faure, s’est dit « très inquiet pour le pluralisme ». « On a aujourd’hui un problème de concentration dans les mains (…) de Vincent Bolloré, c’est tout une galaxie qui se met au service d’un homme et au service d’une ambition, d’une idéologie, a-t-il poursuivi sur Radio J. L’ambition, c’est de conquérir le pouvoir, je rappelle que Vincent Bolloré était derrière la candidature d’Eric Zemmour à la dernière présidentielle. »

M. Faure a appelé à une nouvelle législation pour garantir la liberté de la presse, les socialistes travaillant au Parlement à une proposition de loi sur le sujet. Une perspective à laquelle la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, n’a pas fermé la porte. « Compte tenu des évolutions technologiques, du paysage également de la presse, il faudrait revoir tout cela », a-t-elle déclaré à propos de la concentration dans les médias, interrogée sur France 3.

Au Rassemblement national, le député Jean-Philippe Tanguy a regretté, dans l’émission « Questions politiques », que la ministre de la culture « donne son opinion sur une ligne éditoriale » d’un journal, mais dit n’être pas « du tout opposée au fait qu’il y ait une réflexion démocratique sur qui peut posséder des médias en France ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Comment l’extrême droite a infiltré les médias

Le Monde avec AFP

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Contribuer

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.