Mondiaux d'escrime : une Ukrainienne disqualifiée pour avoir refusé de serrer la main à son adversaire russe

Un geste aura suffi à éclipser leur duel. Ce jeudi, alors que l'Ukrainienne Olga Kharlan vient de porter la touche fatale à son adversaire russe, Anna Smirnova, pour remporter 15 à 7 son 32e de finale des championnats du monde d'escrime de Milan en Italie, le temps se suspend. Les deux sabreuses convergent vers le centre de la piste. La Russe, qui concourre sous bannière neutre, tend la main. L'Ukrainienne, quadruple championne du monde du sabre, répond en tendant son épée. Les deux athlètes restent face à face un instant, échangent quelques mots, puis regagnent le banc de leur délégation.

La sabreuse russe, qui n'a pas été repêchée par le jury, sera restée 45 minutes sur la piste de la salle, attendant une poignée de main qui n'aura pas lieu. Finalement, la sanction du jury tombe : Ukrainienne Olga Kharlan est disqualifiée. Ne pas saluer son adversaire en fin de combat est en effet contraire au règlement de la Fédération internationale d'escrime (FIE), qui impose de serrer la main de son adversaire une fois le combat terminé.

Une décision "absolument scandaleuse", le CIO réagit

Pendant le combat, une vingtaine de membres de la délégation ukrainienne avaient crié "Slava Ukraini" ("Gloire à l'Ukraine") pour soutenir Olga Kharlan, championne olympique par équipes en 2008.

La décision de disqualifier Olga Kharlan a fait réagir Mikhaïlo Podoliak, un proche conseiller du président ukrainien Volodymir Zelensky. Sur Instagram, il a dénoncé un choix "absolument scandaleux" estimant que celui-ci était "la manifestation d'un manque total d'empathie, d'un manque de compréhension du contexte émotionnel". Il a enfin remercié Olga Kharlan d'avoir "dignement représenté" l'Ukraine dans la compétition.

La fédération ukrainienne a ensuite appuyé ces propos : "Nous avons soumis notre protestation au bureau de la Fédération internationale d'escrime. Nous attendons la prise en compte immédiate de cette protestation, afin que cette disqualification soit annulée", a déclaré aux journalistes le président de la fédération ukrainienne Mykhaïlo Illiachev. De son côté, le Comité international olympique (CIO) a appelé jeudi à faire preuve de "sensibilité" à l'égard des sportifs ukrainiens.

Le précédent Sabalenka-Svitolina à Rolang-Garros

Olga Kharlan était devenue la première représentante de son pays à affronter une Russe depuis l'invasion de l'Ukraine par Moscou, en février 2022. Jusque-là, un décret du ministère des Sports ukrainien interdisait aux athlètes de ses délégations officielles de participer à des compétitions où figuraient des Russes ou Biélorusses - la Biélorussie soutenant la Russie dans la guerre contre l'Ukraine. Modifié mercredi, le décret ne porte désormais que sur les "athlètes représentant la Fédération de Russie ou la République du Bélarus". Anna Smirnova participant comme "athlète individuelle neutre", avait donc pu l'affronter.

Il n'y avait plus eu d'opposition entre sportifs des deux pays depuis la guerre en Ukraine, excepté en tennis, où les joueurs ne font pas partie d'une délégation officielle. À Roland-Garros, début juin, un épisode similaire avait eu lieu. À la fin de son quart de finale perdu contre la Biélorusse Aryna Sabalenka (6-4, 6-4), l'Ukrainienne Elina Svitolina avait refusé de venir serrer la main de son adversaire au filet et avait reçu des sifflets de la part du public.