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Les jets privés « sobres » ? Le lobby aérien en plein greenwashing

Un rapport du lobby du secteur aérien a publié une défense acrobatique de l’aviation générale et d’affaires.

Notre planète brûle, et le lobby du secteur aérien défend les jets privés. Dans un rapport rendu public le 5 septembre, il vante notamment la « souplesse et la rapidité » de ce moyen de transport, qui permettrait de « désenclaver [l]es territoires ». Les auteurs — la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers, l’Union des aéroports français et francophones associés, la branche française de l’association européenne de l’aviation d’affaires et deux autres acteurs du secteur — se livrent globalement à une défense acrobatique de l’aviation générale et d’affaires, dont font partie les jets privés.

Les gains de temps permis constituent selon eux « un levier de performance de l’industrie française », poursuivent-ils. Ne pas disposer de ces avions « réduirait l’agilité à signer des contrats, négocier des accords stratégiques ou à piloter des activités à distance efficacement. »

Six avions d’ultrariches français ont émis en août 520 tonnes de CO2

Les auteurs vont jusqu’à qualifier de « sobre » ce mode de transport, au motif que l’aviation générale et d’affaires ne représenterait « que » 4,5 % des émissions totales de l’aviation française. On ignore quelle est leur définition du terme « sobre », mais elle ne semble pas correspondre à celle du dictionnaire. Selon l’ONG Transport & Environnement, un jet privé émet, par voyageur, cinq à quatorze fois plus de CO2 qu’un avion de ligne – ces derniers brillant déjà peu par leur sobriété.

Selon les calculs du compte Twitter I Fly Bernard, qui suit les trajets des jets privés des milliardaires français, les six avions des plus grandes fortunes françaises ont émis au seul mois d’août 2022 520 tonnes de CO2 dans l’atmosphère, soit l’équivalent des émissions d’un Français moyen pendant cinquante-deux ans.

Les aéroports ? « De précieuses réserves de biodiversité »

Autre argument surprenant : les « terrains d’aviation générale et d’affaires » seraient, selon les auteurs de ce rapport, « de précieuses réserves de biodiversité au cœur de nombreuses agglomérations ». Les auteurs citent en exemple, parmi d’autres, l’aéroport Paris-Le Bourget, le premier aéroport d’affaires européen. « L’artificialisation des sols y est limitée, défendent-ils sans rougir, et les limites d’accès des aires aéronautiques favorisent le développement de la faune et la flore locale ; de nouvelles pratiques de fauche sont même développées pour permettre à la biomasse de s’y développer mieux et plus. » Changement climatique, érosion du vivant, la solution semble toute trouvée : couvrir la Terre d’aéroports, pour la regarder confortablement s’effondrer depuis son jet privé.

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