La déconsommation

Les prix flambent, les taux d'intérêt grimpent. Et si c'était le moment de déconsommer ? Il y a la déconsommation choisie comme mode de vie, c’est la révolution du vivre mieux en consommant moins, et puis, il y a la déconsommation subie, celle qui est une conséquence de l'inflation, qui fait que de plus en plus de Français qui n'avaient pas prévu de déconsommer, se retrouvent à se laver moins pour pouvoir continuer de se nourrir.

Mais comment en est-on arrivé là ? La guerre en Ukraine, a-t-elle bon dos ? Est-ce que les industriels n’en profitent pas pour entretenir des prix élevés ? Et si, malgré tout, cette inflation était une chance pour quelque part, nous obliger de gré ou de force à déconsommer, ce qui à terme pourrait être vertueux pour la planète ?

Depuis que l'inflation galope, la déconsommation est devenue non plus un choix, mais bien une nécessité pour bon nombre d’entre nous. Par exemple, pour la toute première fois, le chiffre d'affaires de la grande distribution est en baisse. Au point que le grand patron des magasins Carrefour lui-même, Alexandre Bompard, a employé le terme à la radio, définissant la déconsommation comme un véritable tsunami.

Consommer moins pour consommer mieux ?

La déconsommation a d’abord été souhaitée par les adeptes de la décroissance. Au départ, il y a une dimension militante qui s’oppose frontalement à la société de consommation. Mais est-ce que le fait de consommer moins nous fait consommer mieux ? Pour Cécile Desaunay : « Quand nous sommes contraints de consommer moins et dans ce cas, ça se fait de manière désorganisée, ce qui n’est pas forcément mieux ni pour le consommateur, ni pour l'environnement. »

Le SUV, considéré comme très polluant, domine toujours les ventes de véhicules : « D'une certaine manière, on a du mal à sortir de ces imaginaires du toujours plus. À l’instar du smartphone, ce sont des objets symboles de réussite sociale et réussite financière. » 90 % des téléphones portables qui sont remplacés en France fonctionnent encore parfaitement. Et pourtant, les consommateurs ont très envie de les remplacer pour bénéficier du dernier cri de la technologie. Est-ce que déconsommer, ce n'est pas avant tout une forme de prise de conscience que nous nous faisons avoir par le capitalisme ?

La déconsommation, une exception française ?

De plus en plus de consommateurs ont l’impression de se faire avoir par les entreprises. Pour Cécile Desaunay : « Ce qui est intéressant, c'est qu’il y a vraiment une exception française quand on regarde des enquêtes menées dans différents pays. Il y a une défiance très prononcée et la volonté croissante de ne plus être un gentil mouton qui va consommer comme l'attend de nous ces entreprises. Il fait aussi noter qu’en parallèle des ventes l’IPhone, il y a une explosion des ventes sur leur marché de l’occasion. »

Nous sommes de mieux en mieux informé et donc plus conscients de nos actes en tant que consommateur et les catégories de produits impacté par la déconsommation concernent beaucoup l’hygiène et l’alimentation : « Le problème, c'est que c’est beaucoup des contraintes. Pour l’alimentation, il y a une chute vertigineuse depuis 18 mois, c’est inquiétant, cela veut dire qu'on achète moins de quantité, mais aussi des produits moins chers et donc des marques de distributeur, pareil pour les vêtements. »

La déconsommation, un indicateur d’appauvrissement d’un pays ?

Selon le baromètre annuel de la précarité publié par le Secours populaire qui révèle, il y a désormais un Français sur cinq qui vit en permanence à découvert. Pour Cécile Desaunay, la déconsommation, c'est aussi un indicateur de la peur et de l'appauvrissement d'un pays : « Ce que l’on constate malheureusement, c’est qu’actuellement entre 20 à 30 % des ménages sont obligé d’appliquer la déconsommation, comme une contrainte. »

Est-ce que la déconsommation est féminine ?

Sur Facebook, une communauté s’est donné le défi de ne plus rien acheter le 9 mai. Cette communauté est composée à 90 % de femmes. Mais comment expliquer cet écart spectaculaire entre les hommes et les femmes sur ce sujet ? Pour notre invité : « Premièrement, on remarque une plus grande sensibilité des femmes à ces questions environnementales. Deuxièmement, les femmes sont plus souvent en charge des achats dans leur foyer. Ce qui est fascinant, c'est que le phénomène de charge mentale qu'on connaît va se cumuler avec cette charge de la consommation responsable en plus de s’assurer de ne pas avoir chez soi des produits dangereux, polluants ou trop de perturbateurs endocriniens. »

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