Des médecins français trouvent un traitement pour des enfants souffrant d’une malformation faciale rare

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Des médecins français trouvent un traitement pour des enfants souffrant d’une malformation faciale rare

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Marion souffre d'une myohyperplasie hémifaciale. Après six mois de traitement, son visage s'est détendu.
Marion souffre d'une myohyperplasie hémifaciale. Après six mois de traitement, son visage s'est détendu.
- Hôpital Necker-Enfants malades

Dans une étude publiée dans le Journal of Experimental Medicine, que France Inter dévoile en exclusivité, des médecins de l’hôpital Necker et chercheurs de l'INSERM ont découvert un traitement médicamenteux pour soigner des enfants atteints d’une maladie rare, la myohyperplasie hémifaciale.

Ils sont cinq. Cinq enfants et adolescents touchés par une maladie rare, la myohyperplasie hémifaciale. Une pathologie qui concerne les muscles du visage et qui déforme la figure. Sa prise en charge était jusqu’ici ponctuée d’erreurs de diagnostic et de stratégies inadéquates, y compris des tentatives agressives de correction chirurgicale. Mais deux médecins et chercheurs français viennent de trouver un remède "miracle" pour réparer ces visages.

A la base de cette découverte, il y en a d’abord une première, celle du  médecin français, Guillaume Canaud. En janvier dernier, il a découvert le mécanisme pour vaincre le syndrome de Cloves, plus connu sous le nom de "syndrome d'Elephant man", cette pathologie qui déforme les corps. A l’époque, il s’est rendu compte qu’il y avait une mutation du gène PIK3CA, une transformation responsable de l’hypertrophie musculaire.

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Aucun traitement ne fonctionnait pour ces patients

"Dans le service, on suivait cinq patients qui avaient tous à peu près le même problème", raconte Roman Khonsari, professeur de chirurgie maxillo-faciale à l’hôpital Necker. "Ils avaient la moitié du visage qui était comme contractée, comme s'ils avaient un spasme. Et pendant des années, on n'avait pas de diagnostic pour ces patients. On a essayé des traitements, par exemple des injections de botox, pour relaxer les muscles. Mais ça ne marchait pas. Et petit à petit, on a essayé de comprendre d'où venait leurs problèmes. On leur a fait des IRM du visage et on s'est aperçu de manière assez inattendue qu'en fait, ce n’était pas une contraction des muscles du visage mais des muscles trop gros. Ils avaient une hypertrophie musculaire de la moitié du visage".

"Il y avait l'équipe de Guillaume Canaud qui avait trouvé  un traitement pour traiter ces hypertrophies corporelles qui touchaient d'autres organes", se souvient Roman Khonsari. "On s'est dit c'était peut-être le même mécanisme." Les deux médecins commencent alors à travailler ensemble. La mutation génétique est effectivement la même que dans la découverte sur le syndrome de Cloves. Il fallait donc poursuivre pour ces cinq patients.

L'Alpelisib, une molécule miracle ?

Depuis ses découvertes sur les mutations du gène PIK3CA, le docteur Guillaume Canaud, directeur de recherche Médecine Translationnelle et Thérapies Ciblées à l’hôpital Necker, utilise une molécule développée en cancérologie : l’Alpelisib. "On a obtenu l'autorisation d'utiliser le même médicament sur ces cinq patients", poursuit Roman Khonsari. "Il a fallu ensuite suivre l'évolution de ces patients. Pour ça, on a utilisé une série de méthodes innovantes pour essayer de voir comment la forme du visage changeait au cours du temps. Tout au long du traitement, on les a photographiés en 3D de manière régulière, tous les quinze jours, puis toutes les trois semaines. Et une fois qu'on a obtenu ces images tridimensionnelles de leur visage, on pouvait suivre la modification de forme au cours du temps."

Les résultats sont très rapides. Les muscles du visage dégonflent, la morphologie change. Marion, l’une des cinq patientes qui a pris le traitement, a vu sa vie bouleversée. "Je n’ai jamais eu trop de moqueries quand j’étais plus petite", raconte cette adolescente à la veille de ses 17 ans. Mais trimballée de médecins en médecins, elle en a eu "marre" de ne pas savoir ce qu’elle avait. Ce n’est qu’en venant à l’hôpital Necker qu’on a pu nommer sa maladie et lui proposer ce traitement. "Je reprends confiance petit à petit", confie Marion. "Je suis vraiment très contente de voir mon visage redevenir normal".

"On ne connaît pas exactement le nombre de patients touchés par cette maladie", conclut Guillaume Canaud. "Peut-être quelques dizaines en France… mais une chose est sûre, ces traitements leur changent la vie."

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