Belgique

À 12 ans, Lucas est le premier enfant à se remettre d’un cancer "incurable" et représente un espoir pour de nombreux malades

Médecine : Lucas : 12 ans guérit d un cancer incurable

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Par Sarah Heinderyckx

À 12 ans, Lucas est un adolescent presque comme les autres. Presque, parce que son histoire relève du miracle. Il y a 6 ans, on lui diagnostique un gliome infiltrant du tronc cérébral, une tumeur cancéreuse extrêmement agressive qui se loge dans le cerveau. Espérance de vie : un an ou deux maximum. Pour lui et ses parents, le monde s’effondre. Mais un traitement expérimental va donner des résultats exceptionnels et une piste d’espoir pour de nombreux malades.

"Lucas a explosé les compteurs, nous confie le docteur Jacques Grill qui a soigné le jeune Belge. Aujourd’hui, son IRM est quasiment normale, elle ne montre plus rien si ce n’est la cicatrice de la biopsie qui a servi à faire le diagnostic de son cancer".

Bruxelles – Paris : le trajet nécessaire

Jacques Grill est français. Médecin chercheur à l’hôpital Roussy au sud de Paris, il a conduit un essai clinique, BIOMEDE 1, centré sur cette forme plutôt rare de cancer qui affecte en majorité des enfants. En tout, 233 patients ont été traités lors de cette première phase, dont Lucas.

"Il a eu le droit de venir faire ce traitement-là en France, grâce à un mécanisme qui s’appelle le formulaire S2 et qui autorise un patient européen à venir se faire traiter dans un autre pays européen où le traitement qui lui est nécessaire est disponible alors que ce n’est pas disponible dans son pays. Et l’assurance santé de son pays reverse les coûts au système de santé du pays où le traitement est fait", tient à préciser le médecin.

Les parents du petit garçon étaient prêts à partir pour les Etats-Unis ou le Mexique pour d’autres essais cliniques, mais c’est donc finalement en France que la famille bruxelloise se déplace pour soigner Lucas.

"Quand on est arrivé à Paris, on a été confronté au fait qu’il n’y avait pas beaucoup d’espoir, et que même le traitement était juste expérimental", confie Cédric, son papa, à nos confrères de France 2.

Renforcer la radiothérapie

Lors de l’essai clinique, les chercheurs combinent des séances de radiothérapie avec l’utilisation de trois médicaments. L’un d’eux se révèle plus efficace que les autres, son nom : l'évérolimus.

"Il augmente la sensibilité de la tumeur aux rayons, en empêchant des mécanismes de survie. En fait, on empêche la cellule de réparer ce que la radiothérapie a abîmé", explique le docteur Jacques Grill.

Un médicament qui a l’avantage d’avoir très peu d’effets secondaires. Peu toxique, il permettait à Lucas de retourner à l’école tout en le prenant encore quotidiennement.

Comprendre le miracle pour aider les autres

Depuis plus d’un an, le jeune patient belge ne prend plus aucun traitement et semble en parfaite santé, même s’il reste surveillé de près. Pour les médecins, il s’agit maintenant de comprendre cette réponse exceptionnelle pour tenter d’aider un maximum de patients.

"Malheureusement, beaucoup d’enfants traités avec ce médicament ont rechuté", précise Dr Jacques Grill. Sur les 233 patients de la première phase d’essai, seuls 8 sont considérés comme des "longs survivants", c’est-à-dire qu’ils ont survécu au-delà de 3 ans à leur maladie. Lucas, lui, est le plus long survivant connu.

"C’est en étudiant précisément cette poignée d’enfants qu’on va essayer d’améliorer le traitement pour contrôler un peu plus souvent la maladie, explique Jacques Grill. À l’heure actuelle, par exemple, j’essaye de reproduire médicalement ce qui s’est produit naturellement dans la tumeur de Lucas quand on l’a traité".

Une deuxième phase de test est donc en cours et soignera 360 patients en tout. Elle reprendra l'évérolimus et le comparera à un nouveau médicament développé par une start-up américaine. L’espoir à l’avenir : allonger la vie d’un maximum de petits patients.

Espoir à long terme pour les services onco-pédiatriques de Belgique

De notre côté de la frontière, cette étude est suivie de près par les spécialistes de l’oncologie pédiatrique. La professeure An Van Damme est cheffe du service d’hématologie et oncologie pédiatrique aux Cliniques universitaires Saint-Luc, elle confirme :

"C’est une maladie qui reste difficile à guérir. Globalement, l’étude en question n’a pas réussi à augmenter de façon spectaculaire les taux de survie de cette maladie, mais il y a eu quelques patients chez qui on a réussi à obtenir une rémission très persistante, donc ça ouvre de toute façon des perspectives si on parvient à comprendre pourquoi".

En général, 80% des enfants atteints d’un cancer finissent par guérir. Mais certaines formes très agressives comme le gliome infiltrant du tronc cérébral laissent des perspectives bien plus sombres. Comme il s’agit d’une maladie assez rare (environ 500 cas par an en Europe), les études sont peu nombreuses. Plusieurs hôpitaux belges ont d’ailleurs envoyé leurs jeunes patients en France pour bénéficier du traitement expérimental. Mais les spécialistes espèrent qu’une nouvelle version de cette étude pourra bientôt être organisée en Belgique.

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