Marseille : la faculté de Colbert chassée par les dealers ?

Par P.K.

La situation aux abords du site, et notamment sur la place de la halle Puget investit par des dealers et théâtre de violences répétées, a conduit la présidence d’Aix-Marseille université à mener une enquête auprès de ses personnels.

La situation aux abords du site, et notamment sur la place de la halle Puget investit par des dealers et théâtre de violences répétées, a conduit la présidence d’Aix-Marseille université à mener une enquête auprès de ses personnels.

Photo P.K.

Marseille

A Belsunce (1er), face à l’insécurité aux abords de la fac d’économie et de gestion, Aix-Marseille Université mène une enquête auprès de ses personnels. Selon son résultat, une relocalisation du site "à Marseille ou ailleurs" est envisagée.

Un service public de plus s’apprête-t-il à quitter Belsunce ? Après le commissariat de la rue Nationale et l’antenne de l’hôpital Édouard-Toulouse (dont les personnels ont exercé leur droit de retrait durant l’été, lire ci-dessous), c’est la faculté d’économie de gestion de Colbert qui pourrait fermer ses portes.

La situation aux abords du site, et notamment sur la place de la halle Puget investit par des dealers et théâtre de violences répétées, a conduit la présidence d’Aix-Marseille université (Amu) à mener une enquête auprès de ses personnels, dont une partie "ne s’estime plus en sécurité". Selon son résultat, la possibilité d’une relocalisation du site "à Marseille ou ailleurs" est envisagée par le président d’Amu, Éric Berton.

"Des collègues se sentent en danger"

"Le niveau de sécurité sur le site est très préoccupant, pose-t-il. Nos différentes alertes auprès de la préfète de police, de la Ville et même de la secrétaire d’État chargée de la Ville ont permis de déployer des patrouilles de police nationale et municipale dans le secteur, ce qui a contribué à effectuer une rentrée dans de bonnes conditions. Mais c’est un problème complexe et une fois les patrouilles parties, les dealers reprennent possession des lieux…"

Décrivant "des collègues qui se sentent en danger" et "des maîtres de conférences angoissés quand ils doivent enseigner sur à Colbert", Éric Berton se veut solidaire. "En conseil d’UFR (Unité de formation et de recherche), la solution du télétravail a été choisie par une partie des équipes, ce que je comprends et soutiens. L’option d’organiser l’intégralité des cours en distanciel jusqu’aux vacances de la Toussaint est aussi sur la table. Mais ces solutions ne peuvent être que temporaires, poursuit le président d’Amu. C’est pourquoi nous menons actuellement une enquête auprès des personnels. Selon son résultat, l’option d’une relocalisation de la fac à Marseille, à Aix ou ailleurs est non nulle."

Sans indiquer de calendrier pour l’heure, Éric Berton semble néanmoins avoir dépassé le stade de la simple réflexion.

"Les collègues sont toujours investis sur les lieux et nous sommes tous attachés à notre mission de service public dans le secteur. Mais je suis responsable des biens et des personnes sur le site et cette situation pose beaucoup de questions. Ce qui nous pousse à travailler à ce plan de relocalisation."

"Ne pas céder à la peur"

Une fermeture de la faculté d’économie et de gestion n’est cependant pas la seule piste évoquée par la présidence d’Amu, qui a demandé à la Ville une privatisation de la place et de la halle Puget pour en faire "un espace universitaire" fermé. Assez peu convaincue par ce projet, la maire (GRS) du 1-7, Sophie Camard, veut "construire des solutions collectives" pour reconquérir le quartier.

"Je comprends la peur et la panique mais j’appelle à ne pas y céder, répond l’édile. L’espace de la halle Puget doit être requalifié, et Amu doit y être associé. Nous ne pouvons pas nous résoudre à l’abandon, dans ce moment où la réaction de la police mais aussi des acteurs institutionnels est en cours."

Une "stratégie globale" également mise en avant par la préfecture de police.

"Sur Pressensé - Louise-Michel mais aussi sur la halle Puget, nous sommes confrontés à des points de deal de cannabis, de cocaïne et de cigarettes et à des faits de délinquance, décrit le sous-préfet Yannis Bouzar. C’est un sujet dont nous nous sommes emparés fortement avec un principe de base : ne pas laisser le service public reculer."

"20 personnes interpellées et des saisies significatives"

Il détaille ensuite le dispositif mis en place. "Nous avons d’abord renforcé la présence policière sur place, avec la mobilisation importante d’effectifs de police mais également le fléchage de compagnies de CRS. Sur le dernier mois, 20 personnes ont été interpellées et des saisies significatives ont eu lieu dans le secteur. 42 opérations de CRS ont également été menées dans le quartier. Depuis le début de l’année, nous notons une augmentation de 71 % des interpellations pour trafic dans le centre-ville."

Une présence de terrain accompagné d’un travail judiciaire pour "porter un coup décisif, grâce aux enquêtes, à l’ensemble du trafic". "Enfin, nous travaillons avec tous les partenaires : la Ville pour les renforts de la police municipale et la vidéosurveillance, les bailleurs afin de libérer les immeubles verrouillés, la Métropole pour la voirie et empêcher l’installation de ’drive’…", poursuit Yannis Bouzar.

Un travail qui porterait ses fruits. "Nous sommes en train de déstabiliser ces réseaux, ce qui peut expliquer la nervosité des dealers et un sentiment d’insécurité accru. Mais nous sommes sur la bonne voie", veut croire le sous-préfet qui appelle le président d’Amu à rejoindre le Groupe de partenariat opérationnel (GPO), qui réunit toutes les deux semaines les acteurs de terrain du quartier sur les questions de sécurité.