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La Russie n'obtient pas un siège au Conseil des droits de l'Homme

La Russie n'obtient pas un siège au Conseil des droits de l'Homme. [AFP - FABRICE COFFRINI]
La Russie n'obtient pas un siège au Conseil des droits de l'Homme / Le Journal horaire / 15 sec. / le 10 octobre 2023
La Russie a échoué mardi à regagner un siège au Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, dont elle avait été écartée après l'invasion de l'Ukraine. Avec 83 voix, elle a toutefois recueilli plus de soutien que ne devaient l'espérer l'Ukraine et ses alliés.

Moscou "peut se vanter d'avoir été soutenue par près de la moitié" des 193 Etats membres de l'ONU, a commenté Richard Gowan, de l'International Crisis Group. Selon lui, "cela appuie les affirmations de la Russie qui assure que son isolement diplomatique décroît progressivement alors que de nombreux Etats se lassent des débats autour de l'Ukraine", même si "les amis de l'Ukraine restent la force la plus puissante".

L'Assemblée générale des Nations unies renouvelait mardi, pour la période 2024-2026, 15 des 47 membres de l'institution basée à Genève. Alors que les Etats sont répartis par grande région, chaque groupe régional pré-sélectionne en général ses candidats approuvés ensuite sans difficulté par l'Assemblée générale.

Mais cette année, deux groupes comptaient plus de candidats que de sièges: l'Amérique latine (4 candidats pour 3 sièges) et l'Europe de l'Est (3 candidats pour 2 sièges).

"Un signal fort"

Quelques jours après la frappe russe sur le village ukrainien de Groza (52 morts), tous les yeux étaient tournés vers la candidature russe. Malgré un vote à bulletins secrets qui soulevait une certaine inquiétude du côté des Occidentaux, la Bulgarie et l'Albanie ont finalement été élues, avec respectivement 160 et 123 voix. La Russie a recueilli 83 suffrages.

"Les Etats membres de l'ONU ont envoyé un signal fort aux autorités russes: un gouvernement responsable d'innombrables crimes de guerre et crimes contre l'humanité n'a pas sa place" au Conseil, a commenté Louis Charbonneau, de Human Rights Watch.

"Nous sommes soulagés que les Etats ayant voté soient d'accord que (la Russie) ne peut légitimement pas avoir un siège" à ce Conseil, a ajouté Madeleine Sinclair, de l'International Service for Human Rights.

Mises en garde

Défenseurs des droits de l'Homme et diplomates occidentaux avaient mis en garde ces derniers jours contre une réélection de la Russie. L'Assemblée générale "a un choix important à faire, pour prouver qu'elle n'est pas prête à confondre pyromane et pompier", avait lancé lundi l'ambassadeur albanais à l'ONU Ferit Hoxha lors d'une réunion du Conseil de sécurité sur le carnage de Groza.

"La réélection de la Russie dans cet organe, alors qu'elle continue à commettre des crimes de guerre et d'autres atrocités, serait une horrible tache qui saperait la crédibilité" des Nations unies, avait renchéri l'ambassadeur américain adjoint Robert Wood.

"Pas de modèle"

La Russie s'était elle défendue. "Il n'y a pas de modèle de démocratie ou d'Etat voyou, comme certains le décrivent parfois", a déclaré il y a quelques jours son ambassadeur à l'ONU Vassili Nebenzia. "Aucun Etat membre ne peut affirmer être à l'abri de violations des droits humains".

La Russie avait été élue au Conseil des droits de l'Homme en octobre 2020 avec 158 voix - l'Ukraine avait remporté l'autre siège avec 166 voix. Mais l'Assemblée générale avait voté pour sa "suspension" en avril 2022 (93 voix pour sa suspension, 24 contre et 58 abstentions).

Cette majorité contre la Russie était moins écrasante que celle des résolutions défendant l'intégrité territoriale de l'Ukraine (autour de 140 voix). Mais la question du Conseil des droits de l'Homme était plus complexe, certains pays au bilan contestable en la matière craignant de subir un jour le même sort.

ats/vajo

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Chine et Cuba élus

Les défenseurs des droits humains ont d'autre part dénoncé l'élection ou réélection de plusieurs autres pays, en particulier la Chine accusée de violations des droits de la minorité ouïghoure. Mais la Chine ne risquait rien avec quatre candidats pour quatre sièges asiatiques. Elle est toutefois arrivée quatrième, avec 154 voix.

"Cela laisse penser que s'il y avait eu une compétition dans le groupe Asie, la Chine aurait perdu et ça aurait dû se produire", a insisté Louis Charbonneau, de Human Rights Watch. Autres pays montrés du doigt par les ONG: Cuba, réélu avec 146 voix, et le Burundi, élu avec 168 voix.

Les 15 membres du Conseil élus ou réélus pour la période 2024-2026 sont: Malawi (182), Côte d'Ivoire (181), Ghana (179), Burundi (168), Indonésie (186), Koweït (183), Japon (175), Chine (154), Bulgarie (160), Albanie (123), Brésil (144), Cuba (146), République dominicaine (137), Pays-Bas (169) et France (153).

"Il est légèrement embarrassant que la France ait eu une voix de moins que la Chine", a noté Richard Gowan, de l'International Crisis Group.