Encore aujourd’hui, les femmes ne sont pas assez présentes dans les sciences fondamentales : elles ne représentent que 29% des chercheurs en France, et 33% à l’échelle mondiale. De plus, seulement un quart des hautes fonctions académiques sont occupées par des femmes, et près de 80 % des professionnels de l’intelligence artificielle et du codage sont des hommes.
De nombreux obstacles nuisent à la place des femmes en sciences
La directrice générale de la Fondation L'Oréal, Alexandra Palt, a soulevé ces chiffres alarmants lors de la cérémonie de remise de prix le 11 octobre 2023 : "comment imaginer un avenir plus égalitaire si les femmes n’ont même pas leur mot à dire dans la prochaine révolution numérique ? Surtout en sachant que le nombre de travailleurs dans l’IA a augmenté de 190 % entre 2015 et 2017 et qu’il ne cesse de croître exponentiellement."
De fait, de nombreux obstacles nuisent à la place des femmes en sciences, dont certains sont présents dès l’enfance à cause des constructions sociales et des stéréotypes. Le harcèlement sexuel et le manque de conciliation travail-famille limitent aussi certaines femmes à poursuivre une carrière scientifique. "C’est notre responsabilité collective de créer toutes les conditions favorables aux jeunes filles et aux femmes le plus tôt possible dans leur formation et tout au long de leur vie", pense Alexandra Palt.*
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Un cercle vertueux
Le programme "L'Oréal-Unesco Pour les Femmes et la Science" a pour objectif de valoriser l’excellence scientifique et cherche à inspirer les jeunes femmes pour les encourager à poursuivre des cursus scientifiques. Chaque année depuis 2007, le prix Jeunes Talents récompense 35 doctorantes et post-doctorantes qui se démarquent par leur engagement et leur contribution à la science.
Les lauréates reçoivent une bourse de 15.000 euros pour les doctorantes et 20.000 euros pour les post-doctorantes afin de soutenir leurs projets de recherche. Le prix leur offre également des formations au leadership pour leur donner des moyens supplémentaires de surmonter les inégalités de genre et de mieux valoriser leurs recherches. Puis, les lauréates vont rencontrer près de 1000 lycéens et lycéennes pour inspirer les futures générations à marcher dans leurs pas.
Les jeunes chercheuses proviennent de France métropolitaine et des régions d’Outre-mer, et sont issues de domaines de recherche très divers tels que la médecine, l’informatique, la physique, la mécanique et les sciences biologiques. "C’est un cercle vertueux : plus nous aurons de "role models" nombreux et divers, plus les jeunes générations pourront s’y identifier et faire tomber les obstacles", a souligné Alexadra Palt dans son discours.
Rendre l’IA plus éthique et responsable et pistes de traitement contre le cancer
Le prix Jeunes talents se divise en six grandes catégories. Parmi les lauréates, on retrouve la doctorante Lina El Hajji dans la catégorie "Analyser, anticiper et prédire". Ses projets de recherche portent sur l’amélioration de l’imagerie biologique grâce à une nouvelle génération de marqueurs chimio-génétiques fluorescents. L'objectif est de visualiser précisément et en temps réel les molécules impliquées dans les processus régissant le fonctionnement des organismes vivants.
Dans la catégorie "IA, Sécurité des données et Big Data", on retrouve Virginie Do, dont les projets de recherche visent à rendre l’intelligence artificielle plus éthique et responsable. Elle a notamment développé de nouveaux algorithmes de recommandation de contenu sur les réseaux sociaux capables de booster les créateurs sous-représentés sans détruire la qualité des recommandations pour les utilisateurs.
Dans la catégorie "Mutations génétiques, cancers et maladies chroniques", on a récompensé la post-doctorante Aurore Claude-Taupin, qui explore le potentiel de l’autophagie contre le cancer. Ses travaux permettront de mieux comprendre l’impact de l’intensité du flux sanguin sur la survie de cellules métastatiques circulantes grâce à l’autophagie dans le but de développer de nouvelles cibles thérapeutiques.
Briser le plafond de verre
La fierté était palpable dans la salle lors de la cérémonie de remise de prix, qui a eu lieu à peine une semaine après l’annonce des prix Nobel. Cette année, deux anciennes lauréates du prix L'Oréal-Unesco Pour les femmes et la Science International ont reçu un prix Nobel : Katalin Karikó en médecine et Anne L’Huilier en Physique. Par ailleurs, c’est la première année qu’on retrouve autant de femmes dans le palmarès des prix Nobel : 47% des prix ont été attribués à des femmes en 2023, contre une proportion historique de 4%.
"C’est en valorisant ces modèles que nous pouvons et devons sans délai donner aux jeunes filles les clefs pour se battre et briser, une fois pour toutes, le plafond de verre", a déclaré la directrice de la Fondation L’Oréal.
Depuis sa création en 1998, le programme L'Oréal-Unesco "Pour les femmes et la science" a soutenu 4100 chercheuses originaires de plus de 110 pays, et sept d’entre elles ont reçu un prix Nobel.
