Le tribunal administratif de Paris a suspendu, jeudi 19 octobre, l’interdiction préfectorale d’une manifestation propalestinienne, estimant que l’arrêté portait une « atteinte grave » à la liberté de manifester. Sa décision est intervenue alors que se déroulait, depuis 18 heures et dans le calme, place de la République, à Paris, une manifestation qui a réuni 4 000 personnes, selon la Préfecture de police. Elles s’étaient rassemblées à l’appel du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) et de la Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (CAPJPO-Europalestine).
« Le respect de la liberté de manifestation et de la liberté d’expression, qui ont le caractère de libertés fondamentales (…) doit être concilié avec l’exigence constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public », a estimé le tribunal dans son ordonnance dont l’Agence France-Presse (AFP) a obtenu copie.
Le juge administratif a mis en avant que le préfet de police de Paris n’apportait « aucun élément de nature à étayer » que la manifestation visait « à soutenir les attaques terroristes du Hamas qui se sont déroulées à compter du 7 octobre » s’agissant de l’association CAPJPO-Europalestine. Et « si le préfet fait valoir que le NPA est visé par une enquête pour “apologie du terrorisme” », après des propos d’Olivier Besancenot et de Philippe Poutou selon lesquels la lutte du peuple palestinien est « légitime », « cette circonstance ne saurait être tenue pour suffisante pour établir que [les organisateurs de la manifestation] soutiendrai[en]t le Hamas », souligne le tribunal.
Par ailleurs, « il ne résulte pas de l’instruction, et en particulier de la note des services spécialisés établie en vue de la présente manifestation, que le rassemblement projeté présenterait un risque particulier de violences, à l’encontre d’autres groupes ou des forces de l’ordre », argue-t-il. Les arrêtés préfectoraux attaqués portent donc « une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de manifester », conclut le tribunal, en ordonnant leur suspension.
Rappel du Conseil d’Etat
Dès que la nouvelle s’est propagée dans la manifestation, place de la République, les forces de police qui avaient « nassé » la foule se sont totalement retirées, selon un journaliste de l’AFP sur place.
« Je suis un républicain, j’applique les décisions de justice. Ce qui est sûr, c’est que les manifestations, quand elles seront autorisées, devront se tenir dans le bon ordre public », a réagi le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, sur BFM-TV, en apprenant la décision du tribunal administratif.
Dans un télégramme qu’il avait adressé aux préfets, le 12 octobre, cinq jours après l’attaque sanglante perpétrée en Israël par le Hamas, consigne avait été donnée d’interdire les « manifestations propalestiniennes, parce qu’elles [étaient] susceptibles de générer des troubles à l’ordre public ».
Mais le Conseil d’Etat a rappelé, mercredi, au gouvernement que ces rassemblements ne pouvaient être interdits systématiquement et qu’il revenait aux seuls préfets d’apprécier s’il y avait localement un risque de troubles à l’ordre public. Jeudi, Emmanuel Macron a avancé un « délai de décence » pour justifier la décision d’interdire ces manifestations.
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