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Des scientifiques découvrent un immense paysage caché depuis des millions d’années sous la glace de l’Antarctique

Une étendue de 32 000 kilomètres carrés sous la calotte glaciaire de l’Antarctique, qui abritait autrefois des forêts et probablement des animaux, a été mise au jour par une étude publiée mardi

Une vue du galcier de Thwaites, en Antarctique, datant de 2020. — © David Vaughan/British Antarctic Survey/AP Photo
Une vue du galcier de Thwaites, en Antarctique, datant de 2020. — © David Vaughan/British Antarctic Survey/AP Photo

Un décor figé dans le temps: des scientifiques ont détecté un vaste paysage de collines et de vallées au passé verdoyant, caché depuis des millions d’années sous la glace de l’Antarctique, révèle une étude publiée mardi dans Nature Communications.

Ce paysage plus grand que la Belgique serait resté intact pendant potentiellement plus de 34 millions d’années, mais pourrait être libéré par la fonte des glaces due au réchauffement climatique, avertissent les chercheurs britanniques et américains à l’origine de la découverte. «Il s’agit d’un paysage non découvert sur lequel personne n’a jamais posé les yeux», dit à l’AFP Stewart Jamieson de l’Université britannique de Durham, auteur principal de l’étude.

Une représentation de la topographie du continent caché sous les glaces de l’Antarctique. La zone repérée par les chercheurs et indiquée comme “Highland A”. — © STEWART JAMIESON, DURHAM UNIVERSITY/AFP
Une représentation de la topographie du continent caché sous les glaces de l’Antarctique. La zone repérée par les chercheurs et indiquée comme “Highland A”. — © STEWART JAMIESON, DURHAM UNIVERSITY/AFP

Les chercheurs n’ont pas eu besoin de nouvelles données pour le détecter, mais simplement utilisé une nouvelle approche de cette terra incognita, située sous l’inlandsis de l’Antarctique oriental, bien moins connue que la surface de Mars.

Un sondage radio-échographique

Pour voir ce qui se cache en dessous, il a fallu envoyer des ondes radio dans la glace, survolée par avion, puis d’analyser les échos, une technique appelée sondage radio-échographique. Mais réaliser cette opération à l’échelle du continent antarctique – plus grand que l’Europe – constituerait un défi de taille. Les chercheurs ont donc utilisé des images satellites existantes de la surface pour «tracer les vallées et les crêtes» à plus de deux kilomètres de profondeur, a expliqué Stewart Jamieson.

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En combinant ces données avec celles du sondage radio-échographique, l’image d’un paysage creusé par une rivière a émergé, composé de vallées profondes et de collines aux pics abrupts, semblable à ceux qu’on trouve actuellement à la surface de la Terre. «C’était comme si on regardait par le hublot d’un avion et qu’on apercevait une région montagneuse en contrebas», décrypte le glaciologue, qui compare ce paysage à la région de Snowdonia, dans le nord du Pays de Galles.

Un paysage vieux d’au moins 14 millions d’années

Cette étendue de 32 000 kilomètres carrés abritait autrefois des forêts et probablement des animaux. Avant que la glace la recouvre pour la «figer dans le temps». Difficile de déterminer précisément quand le paysage a été exposé au Soleil pour la dernière fois, mais selon les estimations, c’était il y a au moins 14 millions d’années. «L’intuition» du Pr Jamieson est que cela s’est passé il y a plus de 34 millions d’années, lorsque l’Antarctique a commencé à geler.

Des chercheurs avaient auparavant trouvé un lac de la taille d’une ville sous la glace de l’Antarctique, et les auteurs de l’étude espèrent dénicher d’autres paysages encore. Sauf que le réchauffement climatique pourrait menacer leur dernière trouvaille.

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Le paysage se trouve heureusement à des kilomètres du bord de la calotte de glace, ce qui devrait la prémunir d’une prochaine exposition à la lumière. Autre paramètre rassurant: ce monde caché n’a pas été touché par le retrait des glaces au cours d’anciennes périodes de réchauffement – comme la période du Pliocène, il y a 3 à 4,5 millions d’années. Mais on ne sait toujours pas quel sera le «point de bascule» climatique d’une «réaction incontrôlée» de fonte de glace, souligne le Pr Jamieson.

Lundi, une étude avait averti que la fonte de la calotte glaciaire de l’Antarctique occidental voisin risquait de s’accélérer considérablement dans les décennies à venir. Et ce même si le monde respectait ses engagements pour limiter le réchauffement climatique.

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