Après une nuit de négociations, les régions allemandes et l’Etat fédéral se sont entendus, mardi 7 novembre, sur une série de mesures visant à encadrer plus strictement l’immigration et la politique d’asile outre-Rhin. Pour l’Allemagne, qui avait adopté ces deux dernières années une approche d’ouverture, guidée par le besoin urgent de combler son manque de main-d’œuvre, c’est un tournant. L’idée domine désormais que le pays est « arrivé à ses limites », selon une expression largement utilisée par les responsables politiques de tous bords. « Nous avons besoin de mécanismes pour que le nombre de réfugiés qui arrivent chez nous, surtout par l’immigration irrégulière, soit contenu », avait déclaré Malu Dreyer, ministre- présidente sociale-démocrate du Land de Rhénanie-Palatinat, en amont de la négociation.
Dans le paquet de mesures annoncé mardi matin figurent notamment des dispositions pour réduire le temps de traitement des demandes d’asile et pour accélérer les délais des recours en justice sur ces décisions, qui s’étendent souvent sur des années.
Le gouvernement veut également conclure des accords avec les pays d’origine et de transit des migrants, afin de faciliter les reconduites à la frontière, en échange d’une immigration légale en Allemagne. Berlin veut renforcer les contrôles aux frontières intérieures de l’Europe et envisage d’examiner le statut des demandeurs d’asile dans des pays tiers. Le regroupement familial doit être limité, et une commission pluripartisane doit évaluer une réforme du droit d’asile. Une nouvelle répartition financière des charges entre Etat fédéral et régions a également été conclue.
Charge trop lourde
Le signal de ce revirement en matière migratoire avait été donné par la chancellerie dès le 20 octobre. Dans une interview au Spiegel, Olaf Scholz avait déclaré que l’Allemagne « devait enfin procéder à des expulsions à grande échelle ». Une démonstration de fermeté nouvelle sur ce dossier de la part du chancelier social-démocrate, lui qui déclarait encore en janvier, à la tribune de la conférence de Davos, que « tous ceux qui [voulaient] se retrousser les manches [étaient] les bienvenus en Allemagne ». Neuf mois plus tard, alors que le pays est en récession et que l’extrême droite progresse, l’heure n’est plus aux invitations, mais aux restrictions strictes des flux migratoires illégaux, en concertation avec l’opposition chrétienne-démocrate au Bundestag.
Politiquement, le tournant est délicat, alors que le nombre de demandeurs d’asile présents outre-Rhin est à un niveau très élevé. Selon les chiffres de l’Office pour la migration et les réfugiés, plus de 250 000 personnes ont déposé une demande d’asile entre janvier et septembre de cette année, dont 60 % sont issues de Syrie, d’Afghanistan et de Turquie. Ce nombre pourrait atteindre 300 000 d’ici à la fin de l’année, selon les experts, après 240 000 en 2022. A ces personnes s’ajoutent 1,2 million d’Ukrainiens arrivés depuis février 2022, qui sont dispensés de procédure d’asile.
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