A propos du plan: Otages israéliens: les dessous de l’accord entre l’Etat hébreu et le Hamas
Détenus sans procès
Sur la liste israélienne, 267 prisonniers palestiniens sont des adolescents entre 14 et 18 ans, originaires de Cisjordanie et de Jérusalem-Est. Seuls quatre viennent de la bande de Gaza, arrêtés alors qu’ils essayaient d’entrer sur le territoire israélien. Il y a aussi 33 femmes de 16 à 59 ans.
La liste publiée par Israël donne le nom, l’âge, l’origine géographique et le numéro d’identité de chaque prisonnier. Mais aussi leur affiliation et, pour beaucoup, cette case reste vide. Le Hamas n’a manifestement pas priorisé ses membres dans les négociations, ce qui aurait été de toute façon difficile à obtenir, mais sa cote augmentera certainement auprès de ses partisans car les libérés représentent, pour une écrasante majorité, des femmes et des mineurs arrêtés par Israël avant le 7 octobre.
Ces 300 prisonniers sont accusés de violences mineures et parfois ce qu’on leur reproche est peu clair. Presque tous étaient en attente de procès, ou en détention administrative, selon les organisations palestiniennes et israéliennes qui les suivent. Cet outil légal, hérité du mandat britannique, permet d’emprisonner sans procès un Palestinien dont on soupçonne qu’il pose un risque sécuritaire pour l’Etat. Tous les Palestiniens de Cisjordanie sont soumis au régime militaire qui régit ce territoire occupé: plus de 8000 d’entre eux sont aujourd’hui enfermés dans les prisons israéliennes, un record depuis la seconde Intifada. Et plus de 3000 ont été arrêtés depuis le 7 octobre.
Les femmes sur la liste des détenus libérables d’Israël sont en revanche emprisonnées pour des attaques au ciseau ou au couteau sur des Israéliens. Au moins trois sont accusées d’avoir participé à des attentats. Mais – et c’est crucial – aucune n’a de «sang sur les mains», c'est-à-dire n’a tué d’Israélien. Une condition essentielle à la réussite de l’accord puisque selon la loi israélienne, les familles d’Israéliens tués ont le droit de faire appel devant la Cour suprême pour empêcher la libération du coupable.
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«Cet accord n’a aucun sens»
Une association de familles de victimes du terrorisme a déposé mardi un appel contre l’accord. Mais c’est plus symbolique qu’autre chose. Opposée à toute négociation avec le Hamas, une frange de la population est convaincue que seule la force permettra de vaincre. Comme Alice Zeeman, venue jusqu’à Tel-Aviv de sa colonie de Shavei Shomron en Cisjordanie pour manifester son opposition à l’accord devant le QG de l’armée israélienne mardi soir. «La pensée postmoderniste veut qu’on se sauve soi-même d’abord, mais cela ne correspond pas à notre identité. Nous, les juifs, nous sommes le peuple éternel. Si on réfléchit en tant que nation et pas en tant qu’individus, cet accord n’a aucun sens. En laissant le Hamas se réorganiser, il dessert le collectif», dit la jeune femme, regard bleu perçant sous son turban coloré.
Obtenir des informations sur la santé de ceux qui restent
Dans la nuit de mardi à mercredi, au parlement, les trois ministres de la mouvance la plus radicale des colons, le parti Force juive, avaient voté contre l’accord. Cela n’a pas suffi: les 34 autres ont bien compris que l’armée, comme tout le pays, veut voir revenir les otages. La libération de cette trentaine d’enfants, huit mères et douze autres femmes, selon les informations sorties dans la presse, devrait permettre d’obtenir des informations sur la santé physique et psychologique de ceux qui restent. Mardi, le premier ministre israélien a laissé entendre que le Comité international de la Croix-Rouge pourrait avoir accès aux otages, ce que demandent les Israéliens depuis longtemps. Du côté du renseignement, on espère aussi obtenir des informations cruciales sur la situation et le déploiement militaire du Hamas.
Mais le chagrin le dispute au soulagement. «Cela fait six semaines que nous attendons ce moment: nous nous sommes préparés, avec le Ministère de la santé, à soigner d’importantes séquelles physiques et mentales», explique Hagai Levine, directeur de l’équipe médicale du Forum des familles d’otages. Des unités spécialisées, à l’abri des médias, ont été ouvertes dans six hôpitaux israéliens. «Imaginez à quel point c’est difficile. Et derrière, il y a les autres familles qui attendent encore», conclut-il.