Pourquoi le ministre du Travail Olivier Dussopt est jugé à partir de lundi pour "favoritisme"

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Pourquoi le ministre du Travail Olivier Dussopt est jugé à partir de lundi pour "favoritisme"

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Olivier Dussopt, ministre du Travail, ici le 16 octobre 2023.
Olivier Dussopt, ministre du Travail, ici le 16 octobre 2023.
© AFP - Miguel MEDINA

Après Éric Dupond-Moretti, Olivier Dussopt comparaît devant la justice lundi. Le ministre du Travail est soupçonné d'avoir communiqué des informations privilégiées concernant un appel d'offres au profit du groupe de traitement de l'eau Saur, lorsqu'il était député et maire PS d'Annonay.

Après Éric Dupond-Moretti, un autre ministre en exercice, Olivier Dussopt, est appelé à s'expliquer devant la justice à partir de lundi, pour des soupçons de favoritisme liés à un marché public passé en 2009, qu'il conteste. Le ministre du Travail est cité à comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris pour communication d'informations privilégiées concernant un appel d'offres, au profit du groupe de traitement de l'eau "Saur", lorsqu'il était député et maire PS d'Annonay (Ardèche).

Il est aussi soupçonné d'avoir fait modifier les critères d'évaluation de cet appel d'offres, portant sur un marché de 5,6 millions d'euros, en diminuant l'importance accordée au prix pour favoriser cette société, détentrice d'une délégation de service public pour gérer l'eau de la commune depuis 1994 mais plus chère que les entreprises concurrentes.

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Lithographies

L'affaire avait débuté par  un article de Mediapart, en mai 2020, indiquant notamment qu'un dirigeant local de la Saur avait offert à l'élu ardéchois deux lithographies du peintre Gérard Garouste, en 2017, alors qu'un nouveau contrat était sur le point d'être conclu entre Annonay et cette entreprise. Le parquet national financier (PNF) avait ouvert une enquête préliminaire pour favoritisme, mais également corruption, prise illégale d'intérêt, complicité et recel de ces délits.

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Ces derniers griefs ont été classés sans suite au terme des investigations : les lithographies se sont révélées de faible valeur (quelques centaines d'euros), le cadeau est apparu comme une initiative non sollicitée et Olivier Dussopt n'est pas intervenu dans le processus d'attribution du marché de 2017, a précisé une source judiciaire.

En revanche, une perquisition en août 2020 au domicile du député-maire avait permis de saisir le compte-rendu d'un entretien avec le directeur général de la Saur Olivier Brousse, daté du 29 juillet 2009, évoquant le montant du marché et les critères de l'appel d'offres, et un mail de l'élu envoyé le 17 août 2009 aux services de la mairie, demandant de faire évoluer plusieurs de ces critères.

Il "s'expliquera devant le tribunal"

Lorsque la perspective d'un procès a été rendue publique, en février 2023, le ministre était sur le devant de la scène médiatique, portant la réforme des retraites, texte emblématique et contesté du second quinquennat d'Emmanuel Macron. La Première ministre Elisabeth Borne lui avait alors renouvelé sa confiance.
Depuis la rentrée, le ministre, âgé de 45 ans, s'est fait discret à l'approche de son procès, qu'il refuse de commenter avec les journalistes.

Tout juste le 5 novembre a-t-il répété sur France 3 sa ligne de défense,  constante depuis février : "On parle d'une enquête qui a été classée pour 80%. Quatre points sur cinq ont été classés, il en reste un, sur un marché de 2009, il y a 14 ans. Je vais au tribunal pour convaincre de ma bonne foi. J'ai convaincu le parquet sur les quatre premiers points, je souhaite le convaincre sur le cinquième."

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Olivier Brousse, aujourd'hui dirigeant d'une entreprise de paysagisme, comparaîtra lui pour complicité de favoritisme. "Il conteste les faits" et "s'expliquera devant le tribunal", a indiqué son avocate à l'AFP. Tous deux encourent deux ans de prison et 30.000 euros d'amende.

Saur, troisième grande entreprise de l'eau en France, poursuivie pour recel de favoritisme, risque une amende de plus d'1,8 million d'euros. En février, la société avait indiqué à l'AFP qu'elle considérait "que cette action résiduelle à son encontre, près de quinze ans après les faits, n'(était) pas justifiée". Elle a précisé jeudi ne pas souhaiter faire d'autre déclaration.

François Bayrou, Eric Dupond-Moretti...

Ce procès, prévu pour durer jusqu'à jeudi, arrive après ceux de deux autres piliers de la macronie : François Bayrou, éphémère ministre de la Justice au printemps 2017, et aujourd'hui haut-commissaire au Plan, a comparu devant le tribunal correctionnel de Paris du 16 octobre au 22 novembre, dans le  dossier des soupçons d'emplois fictifs d'assistants d'eurodéputés. Il sera fixé sur son sort le 5 février.

L'actuel garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a lui été jugé par la Cour de justice de la République pour des soupçons de prise illégale d'intérêts, du 6 au 17 novembre. La juridiction composée en majorité de parlementaires rendra sa décision mercredi.  Le parquet a réclamé un an de prison avec sursis.

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