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En pleine COP28, le ciel de Dubaï devient «malsain» en raison des particules fines

Un outil de suivi de la pollution indique ce dimanche que l’indice de qualité de l’air de la ville émiratie s’est dégradé. Dans les salles climatisées, Al Gore fustige les compagnies pétrolières de la région

Vue aérienne de Dubai, ici en octobre 2021. — © NDu
Vue aérienne de Dubai, ici en octobre 2021. — © NDu

COP28

Choc entre pétrole et énergies renouvelables, fonds de compensation… La COP 28 de Dubaï est placée sous le signe de la confrontation. A travers nos articles, graphiques et vidéos, suivez l’actualité de la conférence.

Notre dossier

La rutilante ligne d’horizon des gratte-ciel de Dubaï a été obscurcie par une couche de brouillard qualifiée de «malsaine» dimanche, alors que des milliers de délégués assistaient à une conférence de la 28e conférence des Nations unies sur le climat, la COP28, consacrée aux effets néfastes de la pollution atmosphérique.

L’indice de qualité de l’air a atteint 155 microgrammes par m3 de pollution PM2.5 – les particules fines les plus nocives car elles peuvent pénétrer dans la circulation sanguine – selon WAQI. info, un outil de suivi de la pollution en temps réel. Lorsque la qualité de l’air est «malsaine», «tout le monde peut commencer à sentir des effets sur la santé, les personnes appartenant aux groupes les plus sensibles peuvent ressentir des effets plus graves sur leur santé», avertit le site.

Une brume observée ces jours

Des conditions atmosphériques brumeuses ont été observées les premiers jours de la COP28, où les négociateurs tentent d’élaborer un accord mondial pour réduire les émissions carbone et freiner un changement climatique accéléré par les activités humaines.

Sur le site de la COP28, 3 décembre 2023. — © GIUSEPPE CACACE / AFP
Sur le site de la COP28, 3 décembre 2023. — © GIUSEPPE CACACE / AFP

Environ 80 000 personnes se sont inscrites pour participer à la plus grande édition à ce jour de cet événement, organisée aux Émirats arabes unis, l’un des plus grands producteurs de pétrole au monde. Ce dimanche est une journée consacrée à la «santé» à la COP28, où les discussions portent notamment sur la qualité de l’air et les effets néfastes du changement climatique sur la santé.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) la pollution de l’air extérieur due aux émissions de combustibles fossiles tue plus de quatre millions de personnes par an, car elle accroît le risque de maladies respiratoires, d’accidents vasculaires cérébraux, de maladies cardiaques, de cancers du poumon, de diabète et d’autres maladies.

Une étude en août 2023: La pollution de l’air présente un plus grand risque pour la santé que le tabagisme ou la consommation d’alcool

Dans les environs de la COP, la plus grande centrale électrique à gaz du monde

Les dommages sont en partie causés par les microparticules PM2.5 qui proviennent principalement des combustibles fossiles brûlés dans les transports et l’industrie. La COP28 se déroule à environ 11 km du complexe énergétique et de dessalement d’eau de mer de Jebel Ali, qui abrite la plus grande centrale électrique à gaz du monde.

Deux autres infrastructures polluantes sont également à proximité, le port de Jebel Ali et l’aéroport international Al Maktoum, tandis qu’à 200 km à l’ouest se trouve le champ pétrolifère Bab d’Abou Dhabi.


Al Gore égratigne la compagnie du président de la COP28

«Voici des sites majeurs d’émissions»: invité à faire une présentation en salle plénière de la COP28 à Dubaï, l’ex vice-président américain Al Gore a pointé dimanche le bilan climatique des Emirats arabes unis, pays hôte, allant jusqu’à dénoncer l’empreinte carbone d’Adnoc, la compagnie pétrolière nationale dirigée par le président de la conférence, Sultan Al Jaber.

«Voici des sites majeurs d’émissions de gaz à effet de serre. Tout cela ce sont des sites significatifs d’émission aux Emirats arabes unis», a-t-il lancé dans la salle même où les délégués se réunissent pendant deux semaines de négociations sur le climat. Derrière lui apparaît alors une carte des Emirats arabes unis, avec ses principaux sites émetteurs: champs pétroliers, usines de désalinisation…

Les données de Climate TRACE

Al Gore, grand militant climatique, avait été invité à présenter les dernières données du site Climate TRACE, le premier à estimer, à partir d’un réseau de 300 satellites aidés par l’intelligence artificielle, les véritables émissions de plus de 352 millions de sites à travers le monde, dans dix secteurs: industrie lourde, énergie, agriculture, transports, déchets…

Al Gore à Dubaï, 3 décembre 2023. — © MARTIN DIVISEK / keystone-sda.ch
Al Gore à Dubaï, 3 décembre 2023. — © MARTIN DIVISEK / keystone-sda.ch

Alors que les données de gaz à effet de serre habituellement citées pour les pays sont d’ordre statistiques, Climate TRACE «voit» littéralement le CO2 ou le méthane s’échapper, ce dernier souvent par des fuites de gazoducs ou de puits.

Ces nouvelles données, publiées dimanche pour l’année 2022, montrent d’ailleurs que les émissions de gaz à effet de serre des Emirats arabes unis ont progressé de 7,54% par rapport à 2021.

L’Adnoc mise en cause

«L’Abu Dhabi National Oil Company (Adnoc) prétend toujours n’avoir aucune émission de méthane ou autre émanant de son transport de pétrole et de gaz», a poursuivi l’ancien vice-président de Bill Clinton. «Mais en fait il y en a! On peut les voir depuis l’espace», avance-t-il devant l’image d’une tâche bleue au-dessus d’un champ d’hydrocarbures, projetée sur l’écran géant de la salle. Adnoc, dirigée comme la COP par Sultan Al Jaber, a annoncé l’an dernier un objectif de réduction d’ici 2025 de ses émissions de méthane.

A ce propos: Sultan al-Jaber, président d’une COP28 décriée

Al Gore a toutefois aussi félicité la présidence de la COP28 pour l’engagement samedi pris par 50 grandes compagnies pétrogazières, de réduire leurs fuites de méthane. Sans surprise, les nouvelles données de Climate TRACE montrent une augmentation des émissions mondiales, à 58,5 milliards de tonnes d’équivalent CO2 l’an dernier, en hausse de 1,5% par rapport à 2021.

Depuis 2015, année de l’accord de Paris sur le climat, la hausse atteint 8,6%, avec seulement cinq pays responsables des trois quarts de l’augmentation: la Chine, les Etats-Unis, l’Inde, l’Indonésie et la Russie. Au début de sa présentation, Al Gore a été très applaudi en appelant à «sortir des énergies fossiles».