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Mégabassine de Sainte-Soline : une plainte déposée contre la destruction de l’habitat d’espèces protégées

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Dix associations de défense de l’environnement viennent de déposer une plainte collective dénonçant les «atteintes à la biodiversité» de l’ouvrage des Deux-Sèvres, qui menace plusieurs espèces d’oiseaux protégées.
par Coppélia Piccolo
publié le 10 janvier 2024 à 18h25
(mis à jour le 17 janvier 2024 à 10h08)

C’est un petit caillou dans un gros rouage, et qui pourrait causer sa perte. Dix associations de défense de l’environnement opposées à la construction de la «mégabassine» de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) ont annoncé mardi 9 janvier avoir déposé plainte auprès du procureur de Niort pour «destruction de l’habitat d’une espèce protégée». Selon le collectif, ces «atteintes à la biodiversité» constituent un délit au nom du code de l’environnement.

L’ouvrage, d’une surface de 160 894 m², se situe «sur un habitat sensible abritant des espèces protégées : outarde canepetière, busard cendré, courlis cendré, œdicnème criard, etc.», selon le communiqué transmis par ces associations de défense de l’environnement. La procédure concerne donc en particulier cette immense réserve d’eau, qui fait partie de l’un des 16 projets en cours dans le pays et qui cristallisent l’opposition entre deux visions de l’agriculture. Sa localisation est décriée comme «problématique».

Absence de demande de «dérogation pour espèce protégée»

Dans le cadre de cette plainte, le collectif s’est notamment appuyé sur les conclusions livrées en novembre 2023 par le Conseil national de la protection de la nature (CNPN). Avant le lancement du chantier de la mégabassine, une dérogation «espèce protégée» aurait dû être demandée et obtenue, précise cette institution rattachée au ministère de la Transition écologique. Et d’ajouter que son avis aurait dû être sollicité en amont.

«Nous avons maintenant un organe indépendant qui dit exactement la même chose que nous, avec les mêmes arguments que l’on porte depuis le départ. Et c’est ce qui a motivé notre plainte», énonce Marie Bomare, juriste de l’association environnementale Nature Environnement 17 (NE17) contactée par Libération. Elle ajoute : «Nous ne sommes plus dans une bataille entre associatifs et Etat. Maintenant, c’est associatifs et Conseil national de la protection de la nature d’un côté, et Etat de l’autre. Notre but est de mettre la pression sur le porteur de projets.» Selon les associations, cette démarche aurait permis «de mettre en place des mesures adéquates», essentiellement des compensations économiques, afin de pallier «la perte d’habitat du fait de la construction de la bassine de Sainte-Soline». Tout en précisant «que les préfectures ne l’ont pas non plus imposé».

Vu du ciel, cette mégabassine, dont les travaux ont débuté fin 2022, ressemble à un gigantesque trou creusé dans les champs. Avec son allure de piscine géante, l’objectif de ce projet signé avec l’Etat en 2018 est de stocker 720 000 mètres cubes d’eau afin d’alimenter les exploitations agricoles alentour tout au long de l’année, en particulier en période de sécheresse. Mais cet or bleu provient directement du pompage des nappes phréatiques, un phénomène qui affaiblirait ces réservoirs naturels, selon ses détracteurs. En mars 2022, une mobilisation anti-bassine avait notamment été marquée par des graves violences infligées aux manifestants par les forces de l’ordre déployées massivement sur place.

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