La marée de microplastiques en Espagne souligne la nécessité d’une législation européenne en la matière

La Commission européenne a présenté en octobre un nouveau règlement visant à prévenir la pollution par les microplastiques, affirmant que des mesures appliquées à l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement permettraient de réduire les pertes de granulés de 54 % à 74 %. [EPA/Cabalar]

Un récent déversement de granulés plastiques sur les côtes espagnoles a mis en évidence la nécessité d’une règlementation au niveau de l’UE, les groupes de défense de l’environnement prônant une tolérance zéro à l’égard de la pollution plastique.

Depuis la mi-décembre, des dizaines de sacs remplis de granulés plastiques ont été retrouvés sur les plages des Rías Baixas, dans la côte ouest de la Galice, selon l’ONG galicienne de protection du littoral Noia Limpa.

Ces minuscules granulés, dont la taille est généralement inférieure à cinq millimètres, sont utilisés comme matière première dans la fabrication de produits en plastique. Ils ont été identifiés comme provenant du porte-conteneurs « Toconao», géré par la société danoise Maersk.

Le 8 décembre, six conteneurs seraient tombés du navire près des côtes portugaises, l’un d’entre eux contenant au moins 26  000 kg de ces microplastiques.

Rainer Horn, porte-parole de Maersk, a déclaré que la compagnie maritime regrettait l’incident et qu’elle allait enquêter sur ses causes. Le ministère public espagnol a également ouvert une enquête.

« La contamination des océans et des écosystèmes par les plastiques est l’un des plus grands problèmes auxquels l’humanité est confrontée », a déclaré la ministre espagnole de l’Environnement, Teresa Ribera. « Le déversement d’une quantité aussi importante de matières plastiques nécessite une surveillance étroite afin de déterminer si la compagnie de transport et la compagnie maritime ont pris les précautions qui s’imposaient. »

Le traumatisme de la marée noire de 2002

Cette catastrophe écologique a ravivé les souvenirs de 2002, lorsque la Galice avait été touchée par une importante marée noire causée par le naufrage du pétrolier « Prestige », qui avait déversé 60  000 tonnes de fioul sur la côte.

Des associations environnementales, des bénévoles et des travailleurs se sont organisés pour nettoyer les plages et les côtes touchées par la marée de micro-granulés.

Parmi eux, on retrouve le groupe écologiste espagnol Ecologistas en Acción, qui a poursuivi en justice la compagnie maritime propriétaire du porte-conteneurs, battant pavillon libérien, et son capitaine.

L’ONG a demandé au tribunal d’exiger de la compagnie responsable qu’elle fournisse une garantie d’au moins 10 millions d’euros pour couvrir les coûts.

« Ces petits granulés plastiques posent un problème environnemental, car les poissons les confondent avec des œufs et les mangent. Elles entrent dans la chaîne alimentaire […] et finissent sur nos tables », a déclaré Cristobal López, porte-parole d’Ecologistas en Acción, qui s’est entretenu avec l’Associated Press depuis une plage de Galice.

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Projet de règlement de l’UE sur les microplastiques

Natacha Tullis, du Pew Charitable Trusts, explique que les déversements de granulés plastiques sont une source évitable de pollution plastique. Elle estime que chaque année, jusqu’à 20 camions de ce type de granulés sont déversés dans la nature en Europe.

« Tout déversement, quelle que soit sa taille, peut avoir des conséquences à long terme sur l’environnement et les communautés, car ces particules s’infiltrent dans le sol, les cours d’eau et l’océan », a-t-elle indiqué à Euractiv.

Mais malgré les initiatives volontaires de l’industrie telles que l’opération « Clean Sweep », la dispersion de billes plastiques dans l’environnement continue, a déclaré Mme Tullis, soulignant que ces mesures ne sont appliquées que par moins de 5 % de l’industrie européenne du plastique.

La Commission européenne a présenté en octobre un nouveau règlement visant à prévenir la pollution par les microplastiques, affirmant que des mesures appliquées à l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement permettraient de réduire les pertes de granulés de 54 % à 74 %.

Selon le projet de règlement, les opérateurs sont invités à agir dans l’ordre de priorité suivant : prévention afin d’éviter tout déversement ; confinement des zones où des granulés ont été déversés afin de s’assurer qu’ils ne polluent pas davantage l’environnement ; et nettoyage après un déversement ou une perte.

Le Pew Charitable Trusts estime qu’il s’agit d’un « bon point de départ », tout comme les changements proposés par le rapporteur, le député européen Joao Albuquerque (Socialistes & Démocrates européens), pour inclure le transport maritime dans le règlement.

Cependant, Mme Tullis recommande que tous les opérateurs et transporteurs soient soumis à une certification indépendante et à un audit annuel, estimant que la proposition de la Commission « laisse encore trop de place aux déversements et aux pertes pour les opérateurs qui manipulent moins de 1  000 tonnes de granulés par an ».

Le Pew Charitable Trusts demande également aux décideurs politiques « d’abaisser encore le seuil de 250 tonnes proposé par le rapporteur ».

De son côté, l’industrie européenne du plastique affirme qu’elle soutient les objectifs du nouveau règlement.

« La perte de granulés plastiques dans nos écosystèmes est inacceptable et la nécessité d’atténuer les pertes involontaires de granulés est une question de première importance pour l’industrie », a déclaré Virginia Janssens, directrice générale de l’association professionnelle Plastics Europe.

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[Édité par Anne-Sophie Gayet]

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