Hier en Lituanie et en Afghanistan, aujourd’hui à Guantanamo
Le porte-parole du ministre lituanien de la Justice a déclaré aussitôt que son pays allait respecter cette décision. «Les institutions lituaniennes prendront les mesures nécessaires pour appliquer correctement la décision, y compris le paiement de la compensation monétaire accordée au requérant», a indiqué à l’AFP Paulius Zeimys.
Né en 1968, Mustafa al-Hawsawi avait été capturé au Pakistan en 2003, soupçonné par les Américains d’avoir participé aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Actuellement détenu à la base américaine de Guantanamo où il risque la peine de mort, il dit avoir été transféré en 2005 dans un centre de détention secret de la CIA en Lituanie, indique la Cour basée à Strasbourg.
Les prisons de la CIA avaient été créées par l’Agence américaine de renseignement en secret dans plusieurs pays – Pologne, Lituanie, Roumanie, Afghanistan et Thaïlande –, sous la présidence de George W. Bush au début de la «guerre contre le terrorisme», après le 11-Septembre. La Cour dit s’être appuyée sur un rapport publié en 2014 par le Sénat américain «sur l’utilisation de la torture par la CIA» et qui indique noir sur blanc «que Mustafa al-Hawsawi a été détenu dans un centre secret de détention dirigé» par l’agence.
Vilnius déjà condamné dans un dossier similaire
Selon les éléments de la Cour, ce centre se trouvait en Lituanie entre 2005 et 2006. Sans avoir été forcément soumis durant son séjour «aux techniques d’interrogatoire les plus dures», le requérant a «nécessairement dû» avoir les yeux bandés ou être encagoulé, «placé à l’isolement, entravé de manière continue par des fers aux pieds», pratiques «couramment utilisées à l’époque par la CIA» et que la Lituanie ne pouvait ignorer, estime la Cour.
Elle constate que Vilnius a permis son transfèrement vers un autre site clandestin de la CIA en Afghanistan, d’où il a été déplacé vers les États-Unis où il encourt la peine de mort, bannie par la convention européenne des droits de l’homme.
Vilnius, déjà condamné par la CEDH dans un dossier similaire en 2018 mais qui nie l’existence sur son sol d’un tel site, doit mener «une enquête pénale exhaustive» à ce sujet, estime la Cour. Les procureurs lituaniens ont commencé à enquêter sur cette affaire en 2014. Selon la porte-parole du bureau du procureur général, Elena Martinoniene, cette enquête est toujours en cours.