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Contraception

Vasectomie : 15 fois plus d’hommes français y ont eu recours en douze ans

Cette méthode de contraception masculine définitive est pour la première fois plus importante que son pendant féminin, consistant à une opération non réversible bien plus lourde.
par Marlène Thomas
publié le 12 février 2024 à 18h26

Un premier pas vers une diminution de la charge contraceptive pour les femmes. De plus en plus d’hommes ont recours en France à la vasectomie. Entre 2010 et 2022, le nombre de ces interventions a été multiplié par 15, passant de 1 940 durant l’année 2010 à 30 288 vasectomies en 2022, selon l’étude menée par l’Assurance maladie et l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Et les hommes faisant ce choix sont de plus en plus jeunes (en moyenne 41 ans contre 44 ans en 2010).

L’opération consiste à sectionner les canaux déférents, reliant les testicules à la prostate, pour empêcher le passage de spermatozoïdes. Autorisée depuis 2001, la vasectomie est considérée comme une contraception définitive, bien qu’une opération restauratrice (très peu demandée) soit possible avec des résultats aléatoires. Entre 2010 et 2018, cette proportion avait déjà été multipliée par cinq. Autre bonne nouvelle, ces procédures se passent apparemment très bien, les hommes ayant très peu besoin d’anti-douleurs dans l’année suivant la vasectomie.

La pratique n’en reste pas moins marginale : environ 0,15 % des Français concernés (soit selon l’étude un spectre très large d’adultes de moins de 70 ans) ont opté pour cette méthode de contraception définitive en 2022, rapporte l’AFP. La France peine à rattraper son retard lié à une légalisation tardive, couplée à des craintes de pertes de virilité tenaces pour les concernés.

Dans le monde, ce recours est également très variable. En 2019, la Corée du Sud enregistrait le taux le plus important de 16,8 % (calculé lui en fonction de son utilisation comme méthode contraceptive chez les femmes en âge de procréer). Mais de façon étonnante, le recours à la vasectomie dans les pays anglo-saxons où cette pratique est très répandue «connaît un déclin» (Australie, Etats-Unis, Royaume-Uni). Le taux de recours y oscille toujours entre près de 10 % et 14 %.

Moins de stérilisations féminines

En France, cette méthode de contraception masculine définitive est pour la première fois plus importante que son pendant féminin, consistant à une opération non réversible bien plus lourde que pour une vasectomie. Depuis le retrait des implants Essure du marché européen en 2018, la stérilisation ne se pratique plus que par ligature des trompes de Fallope ou très rarement par salpingectomie (ablation d’une ou des deux trompes). Dans un effet contraire, le nombre de recours à la stérilisation féminine a été divisé par deux entre 2013 et 2022, après avoir augmenté sur les trois années précédentes. Si elles étaient 45 138 femmes à en avoir fait la demande en 2013, elles ne sont plus que 20 325 en 2022. L’étude résume : «En 2022, trois stérilisations masculines ont été pratiquées pour deux stérilisations féminines.» Des études seront nécessaires pour évaluer ce «croisement des courbes» et déterminer si la hausse de la vasectomie peut être corrélée à la baisse de la stérilisation volontaire chez les femmes.

Les options s’offrant aux hommes pour se «contracepter» restent encore fort limitées. Les deux seules méthodes validées scientifiquement sont le préservatif et la vasectomie. La contraception hormonale sous forme d’injections hebdomadaires contraignantes a, elle, été validée par l’OMS, avec moult contre-indications, pour un maximum de dix-huit mois. Elle n’est prescrite que par une poignée de médecins dont l’endocrinologue Jean-Claude Soufir. Quant à la méthode thermique, le «slip chauffant» développé par l’andrologue Roger Mieusset, il est toujours considéré comme en phase expérimentale faute d’avoir reçu des financements permettant des essais à grande échelle et ne peut plus être prescrit. Il s’agit alors pour les hommes intéressés de se fabriquer un slip eux-mêmes ou utiliser un anneau contraceptif, l’Andro-switch dont la commercialisation a été suspendue en décembre 2021 l’Agence nationale de sécurité du médicament. Son créateur, Maxime Labrit, multiplie les démarches pour parvenir à sa labellisation d’ici 2028. Dans une tribune publiée le 23 août 2022 et signée depuis par plus de 32 000 personnes, Libération a appelé le gouvernement à avancer sur ce sujet, enjeu majeur en matière d’égalité femmes-hommes, et à développer les méthodes disponibles.

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