révolutionUn test sanguin pour aider à détecter la bipolarité débarque en France

Un test sanguin pour aider à détecter le trouble bipolaire arrive en France… On vous dit tout

révolutionMyEDIT-B, le premier test sanguin permettant d’aider à diagnostiquer le trouble bipolaire, sera commercialisé en France à partir du 1er avril
MyEDIT-B, le premier test sanguin permettant de diagnostiquer le trouble bipolaire, sera commercialisé en France à partir du 1er avril.
MyEDIT-B, le premier test sanguin permettant de diagnostiquer le trouble bipolaire, sera commercialisé en France à partir du 1er avril. - Prostock-Studio/Getty Images / Getty Images
Lise Abou Mansour

Lise Abou Mansour

L'essentiel

  • La start-up française Alcediag a mis au point un test permettant d'aider à diagnostiquer le trouble bipolaire grâce à une simple prise de sang.
  • Prescrit par un psychiatre et coûtant 899 euros, ce test est destiné aux personnes majeures traitées par médicaments pour un épisode dépressif caractérisé, modéré ou sévère.
  • L’intérêt de ce test est de permettre un diagnostic – et donc un traitement – précoce. « En réduisant l’occurrence des phases, les personnes ont toujours des vulnérabilités mais elles peuvent fonctionner », explique la psychiatre.

EDIT: Cet article est rediffusé car ce samedi 30 mars, c'est la Journée mondiale des troubles bipolaires.

Une simple prise de sang et quatre semaines plus tard, votre médecin vous annonce si vous êtes ou non atteint de bipolarité. Ce test sera réalisable à partir du 1er avril en France. Si jusqu’à aujourd’hui, les diagnostics en matière de troubles psychiques, parmi lesquels le trouble bipolaire, reposaient exclusivement sur une observation clinique de la part d’un psychiatre via des entretiens, le lancement de myEDIT-B vient donc changer la donne.

Il s’agit du premier test sanguin permettant de différencier la dépression du trouble bipolaire, un trouble psychiatrique dans laquelle les malades alternent entre phase dépressive et phase maniaque. Cet examen permettrait à de nombreuses personnes atteintes de bipolarité d’être diagnostiquées – et donc soignées – à temps. Une révolution pour les un à deux millions de personnes touchées en France. A qui ce test est-il destiné ? Comment fonctionne-t-il ? Quel est son intérêt ? On vous dit tout.

A qui est-il destiné ?

Ce test sanguin vise les personnes majeures traitées par médicaments pour un épisode dépressif caractérisé modéré ou sévère. Sont particulièrement visées celles susceptibles d’être atteintes de bipolarité, notamment car il y a des cas dans leur famille ou qu’elles ont obtenu des réponses très particulières aux antidépresseurs. Soit une efficacité très rapide soit, au contraire, une aggravation de la dépression. Prescrite par un psychiatre, la prise de sang devra être réalisée dans un des 400 laboratoires de la marque Synlab. « La majorité de la population sera à moins de deux heures d’un laboratoire participant, précise Florian Scherrer, directeur médical du réseau Synlab. (Pour des raisons technologiques), pour l’instant, on préfère le faire dans nos laboratoires ».

Comment fonctionne-t-il ?

Les chercheurs d’Alcediag, la société biopharmaceutique basée dans l’Hérault à l’origine du test, sont partis de l’idée selon laquelle le cerveau est un organe comme un autre. « Quand le cœur ou le rein dysfonctionne, il émet dans le sang des signaux spécifiques de la maladie, explique Alexandra Prieux, présidente d’Alcediag. Il en est de même avec le cerveau. » Ces signaux, ou biomarqueurs, peuvent alors être captés par un test sanguin.

Pendant dix ans, la société a réalisé des études afin de trouver les éléments différenciants entre les patients atteints de dépression et ceux atteints de trouble bipolaire. Pour ce faire, ils ont creusé du côté de l’ARN et d’un mécanisme précis : l’édition d’ARN. « Ce mécanisme physiologique arrive de façon normale chez tout le monde mais est altéré par certaines pathologies, comme les maladies psychiatriques », souligne la présidente de la start-up.

Alcediag l’assure : la fiabilité du test est supérieure à 80 %. « A part sur certaines études génétiques, il est rare d’avoir des tests fiables à 100 % », soutient Alexandra Prieux. S’il n’est donc pas impossible d’obtenir un faux positif, l’impact est à nuancer car il s’agit seulement d’un outil d’aide au diagnostic. Après envoi des résultats sous quatre semaines, il revient au médecin de faire le diagnostic final, notamment avec l’historique du patient et son histoire familiale.

Combien coûte-t-il ?

Détail non négligeable : le test coûte 899 euros et n’est pour le moment pas remboursé par la Sécurité sociale. C’est donc au patient de régler la note. « On a dix ans d’investissement sur fonds propres, justifie Alexandra Prieux. Le développement de ce test a coûté très cher. On a fait appel aux dernières technologies de séquençage ».

L’objectif de la start-up est maintenant d’obtenir un remboursement par l’Assurance maladie. Une étude d’utilité clinique est en cours afin de mesurer l’impact du test sur l’évolution de la maladie. Elle devrait durer trois ans. Des études économiques seront réalisées dans un second temps, afin de mesurer son intérêt financier.

Quel est son intérêt ?

En moyenne, une personne atteinte d’un trouble bipolaire met huit à dix ans avant d’être diagnostiquée, et la maladie est souvent confondue avec la dépression. Pour cause, chez certains patients, les phases d’exaltation sont bien moins marquées que les épisodes dépressifs. Et les conséquences peuvent être désastreuses. « Si on traite le trouble bipolaire avec des antidépresseurs au long cours, cela peut aggraver la pathologie en entraînant des cycles plus rapides », assure Chantal Henry, professeure de psychiatrie au GHU Paris psychiatrie et neurosciences. Chez ces patients, les antidépresseurs doivent être associés à des régulateurs d’humeur pour éviter des virages maniaques.

Pendant ces années d’errance médicale, la qualité de vie du patient peut se détériorer gravement. « En réduisant l’occurrence des phases, les personnes ont toujours des vulnérabilités mais elles peuvent fonctionner, ont moins de risque de perdre leur travail, de consommer des toxiques, de développer un trouble anxieux, d’abîmer leur vie familiale et affective et d’effectuer des tentatives de suicide », conclut la psychiatre.

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