Sénégal : l’élection de Bassirou Diomaye Faye, qui a deux épouses, consacre la « tradition de la polygamie »

Élu le 24 mars à la tête du Sénégal, « BDF » est entré au palais présidentiel avec ses deux femmes, Marie et Absa. Une première dans ce pays.

Le nouveau président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a deux épouses. AFP / Senegalese Presidency
Le nouveau président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a deux épouses. AFP / Senegalese Presidency

    La scène est inédite au Sénégal. À quelques minutes seulement de la fin de la campagne présidentielle, Bassirou Diomaye Faye s’avance d’un pas mesuré sur une tribune en tenant la main de ses deux épouses, Marie et Absa. Applaudi par des milliers de sympathisants en liesse, le candidat de la rupture et du panafricanisme a fait le choix d’afficher ouvertement sa polygamie, une pratique traditionnelle et religieuse solidement ancrée dans la culture sénégalaise, avant son élection triomphante dès le premier tour du scrutin avec 54,28 % des voix.



    Méconnue jusque-là, Marie Khone, la première femme qu’il a épousée il y a quinze ans et avec laquelle il a quatre enfants, est originaire du même village que lui. Il s’est marié à la seconde, Absa, il y a un peu plus d’un an.

    De nombreuses femmes opposées à cette pratique

    « C’est une consécration de la tradition de la polygamie au sommet de l’État avec une situation qui va coller à la réalité sénégalaise », estime le sociologue Djiby Diakhaté, ajoutant que cette pratique est « plébiscitée » par beaucoup d’hommes mais que de nombreuses femmes demeurent « méfiantes » sur les principes la régissant.

    Nombre d’entre elles se disent contre cette pratique, qu’elles jugent hypocrite et injuste à leur égard. Et la commission de l’ONU pour les droits de l’Homme a jugé dans un rapport publié en 2022 que la polygamie constitue une discrimination vis-à-vis des femmes qui doit être éradiquée.

    Si elle est difficile à chiffrer car beaucoup de mariages ne sont pas enregistrés, 32,5 % des Sénégalais mariés vivent en union polygame, selon un rapport en 2013 de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie. Pour le sociologue Djiby Diakhaté, Bassirou Diomaye Faye a lancé un « signal fort pour que les autres hommes assument également leur polygamie, et pour qu’ils fassent preuve de transparence comme lui » avec « sans doute une volonté de mettre fin à la pratique de la polygamie cachée, appelée le « Takou Souf » (en wolof), ce qui, selon lui, « sera une bonne chose pour l’économie du pays et pour la situation matrimoniale ».