Le dictateur tchétchène Ramzan Kadyrov serait à l’article de la mort
Garant de la stabilité de la Tchétchénie depuis 17 ans, le dictateur Ramzan Kadyrov verrait son état de santé gravement se dégrader.
- Publié le 25-04-2024 à 06h53
Les rumeurs se multiplient depuis plusieurs mois et s’exacerbent à chaque apparition du leader de Tchétchénie. Le visage bouffi de cet homme mis à la tête de cette petite république du Caucase russe en 2007 par Vladimir Poutine alimente encore les spéculations : Ramzan Kadyrov, 47 ans, souffrirait d’une maladie cérébrale dégénérative selon les uns, d’une maladie du pancréas selon les autres. En 2023, les réseaux sociaux tchétchènes s’étaient déjà affolés lorsque le leader avait été hospitalisé à Moscou, placé dans un coma médicamenteux. Le journal russe critique du pouvoir “Novaya Gazeta” affirme même, fort de ses sources dans la région, que le dictateur de Tchétchénie serait hospitalité, dans un état de santé qui inquiéterait le Kremlin.
Un enjeu majeur
L’enjeu est majeur pour Moscou, qui voit encore cette république du Caucase comme une poudrière, 25 ans après les deux guerres opposant Kremlin et indépendantistes tchétchènes, qui avaient ravagé la région. Au lendemain de ces conflits, c’est d’ailleurs son père, Akhmat, qui avait assuré à Vladimir Poutine une reprise en main de la région jusqu’à son assassinat, en 2007. Événement qui avait propulsé le jeune Ramzan à la tête de la Tchétchénie, presque malgré lui.
Pur produit de Vladimir Poutine, Kadyrov a été montré au côté du président, à Moscou, pour lui assurer toute légitimité. Puis il a reçu un budget conséquent pour reconstruire la Tchétchénie. La capitale, Grozny, ne comporte aujourd’hui plus une seule trace de la guerre, c’était le projet du Kremlin. Mais pour tenir la région et s’assurer le soutien de la caste de Kadyrov, le président russe a continué à abreuver la région. Un quartier gigantesque aujourd’hui situé au cœur de Grozny a été privatisé pour héberger Kadyrov et ses “kadyrovtsi”, sa milice personnelle. Depuis 2007, Kadyrov s’est régulièrement illustré comme un enfant gâté (et armé), attiré par les nouvelles technologies, tenant à ses poneys. Ses résidences de Grozny sont gigantesques et… cachées au public. Elles abritent ses 14 enfants et sa femme, Medni Kadyrova. Toute la famille est aujourd’hui sous sanctions occidentales.
Goût pour la torture
Ramzan Kadyrov est aussi réputé pour la violence de sa répression, ses meurtres, son goût pour la torture… Lors d’un reportage réalisé par la Libre Belgique en 2021 à Grozny, un homme qui sortait des geôles du dictateur après avoir commenté une vidéo sur internet avait décrit comment, certains soirs, le président tchétchène se rendait personnellement dans les prisons du centre pour y participer aux actes de torture. En première ligne, les LGBT, assassinés, torturés, poussés à l’exil au nom de valeurs appuyées par un étrange mélange d’un islam sunnite et d’un patriotisme ultranationaliste à la russe.
Craints par les Russes, les Tchétchènes sont aussi capables d’organiser des assassinats d’opposants, en Russie comme en Europe. Les hommes de Kadyrov sont soupçonnés d’être derrière les assassinats de la journaliste Anna Politkovskaïa en 2006 ou de l’opposant Boris Nemtsov en 2015. Seraient-ils les hommes de main du Kremlin ? Toujours est-il qu’au lendemain de l’offensive lancée sur l’Ukraine en 2022, les Tchétchènes se sont illustrés par leur sens de la communication lors du siège sanglant de Marioupol. Ces hommes auraient activement participé aux combats… à en voir les mises en scène, parfois grotesques, de ses “kadyrovtsi”, sur Instagram.
Cacher ses hospitalisations
Mais depuis plusieurs années, le Kremlin observe son dictateur régional, garant de la stabilité de la poudrière du Caucase, soumis à des problèmes de santé. Par le passé, des mises en scène et vidéos pré-enregistrées ont permis aux autorités de cacher des hospitalisations. Était-ce une mise en scène pré-enregistrée qui a été diffusée mardi la présidence tchétchène, quelques heures après l’enquête de la Novaya Gazeta ? On y voit le chef de la Tchétchénie, fan de MMA, soulever des haltères de 14 kilos… Troublant, son voisin de “salle”, n’est autre que le médecin chef de son hôpital de Grozny.
”Moscou doit désormais s’organiser pour que la stabilité soit préservée et que les choses ne deviennent pas violentes” affirme la “Novaya Gazeta”, estimant que la fin du tyran est proche. Le journal s’interroge sur la stratégie adoptée par le Kremlin pour assurer une transition durant laquelle les différentes milices surarmées de la région ne s’entre-tueraient pas dans une guerre civile que craint plus que tout Vladimir Poutine. Car “il n’y a pas de deuxième Kadyrov, pas de personnalité publique à ses côtés” affirme le journal. Mais un visage semble apparaître progressivement dans la presse russe, celui de Apti Alaudinov, 32 ans, commandant des forces spéciales tchétchènes. Celui-ci vient de recevoir un nouveau grade de la part de Vladimir Poutine, “un tremplin vers sa nouvelle carrière politique” d’après le journal qui estime qu’il sera amené, dans les temps à venir, à prendre la présidence de cette dictature dans la dictature.