Une tribune permanente

Sur Twitter, tout se conjugue au présent. Les personnalités politiques peuvent d'un clic réagir à l'actualité et ne s'en privent pas.

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Actualité économique, interview d'un concurrent, nomination politique, campagne pour les Européennes, tout est prétexte à s'exprimer. Mais celui qui twitte à tort et à travers se décrédibilise, selon Yannick Chatelain, chercheur en marketing digital à Grenoble Ecole de Management. "Le risque est de virer à une communication hystérique. Le politique qui twitte trop suscite une perplexité: twitte-t-il? Ou gouverne-t-il?" lance l'auteur du pamphlet Dis tu t'es vu quand tu tweet?

Les petites phrases

En 140 signes, impossible de dérouler un programme. Le linguiste Julien Longhi a analysé les réactions aux premières actions du gouvernement Ayrault publiées en 2012 sur le compte de Marine Le Pen et montre que le tweet se prête tout particulièrement aux jeux de mots.

Ainsi, la leader du Front national dénigrait-elle les moyens déployés face à l'insécurité, d'un cinglant "aux grands maux, les petits remèdes". Elle s'est aussi exprimée lors du discours de politique générale de François Hollande en détournant le slogan de campagne de 2012: "Les poncifs, c'est maintenant".

L'ironie lui permet d'interpeller les internautes et de souligner sa position par un certain nombre de sous-entendus péjoratifs à l'égard des ministres.

Plus près, plus près... trop près

"Les réseaux sociaux permettent de jouer sur différents registres, en privilégiant selon les cas une posture institutionnelle ou plus proche, note Julien Longhi, maître de conférences en sciences du langage à l'université Cergy-Pontoise. La communication de Jean-Marc Ayrault lorsqu'il était Premier Ministre pouvait passer par son compte personnel ou le compte @Matignon".

Sur le premier, des adresses directes aux internautes, sur le second, l'annonce des mesures et déplacements officiels. Même Cécile Duflot, pionnière sur le réseau, a surjoué la proximité lorsqu'elle a twitté en 2012 la recette du chili con carne, suscitant une vague d'agacement et de moqueries.

"Twitter permet aux politiques de parer aux critiques les taxant d'être trop éloignés du terrain, mais peut aussi conduire à une trop grande exposition. Garder la bonne distance, c'est toute la difficulté", prévient Julien Longhi.

Spontanéité et malentendus

"Afin de condenser une idée, on peut être conduit à utiliser des mots plus forts ou plus généraux, et donc à radicaliser ses propos, analyse le linguiste. La manière dont les internautes vont les interpréter peut être en décalage avec l'état d'esprit de l'auteur lors de la rédaction. Par conséquent, il est crucial de rattacher chaque tweet à un thème ou un événement."

Un outil à ne pas surestimer

D'après l'agence Digital Maniak, 346 députés sur 577 ont des profils actifs. L'outil est devenu incontournable mais ne se suffit pas à lui-même. "Il est normal que les politiques soient soucieux des réseaux sociaux mais tout le monde n'a pas de compte Facebook, rappelle Yannick Chatelain. Lorsque les médias font leur Une sur un tweet, cela ne marginalise-t-il pas ceux qui ignorent le fonctionnement de Twitter?"

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