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TribuneOGM

Les lobbies tentent à nouveau d’imposer les OGM à l’Europe

« En donnant apparemment la liberté de choix aux Etats-membres, l’accord européen leur laisse croire qu’ils seront maitres de décider de bannir les OGM sur leur territoire. En réalité, il s’agit d’un recul doublé d’un leurre » et d’« une victoire du lobby des OGM et des biotechnologies. »


L’accord intervenu sur les OGM, le 12 juin dernier, au Conseil des ministres de l’environnement, démontre encore une fois la fragilité de la position des écologistes. Comme l’affirment les Amis de la Terre, ce mauvais compromis est « un cadeau empoisonné qui ouvrira les champs européens aux plantes génétiquement modifiées ».

En donnant apparemment la liberté de choix aux Etats-membres, l’accord européen leur laisse croire qu’ils seront maitres de décider de bannir les OGM sur leur territoire. En réalité, il s’agit d’un recul doublé d’un leurre.

Une Commission européenne pro-OGM

Un recul, parce que le système d’expertise et d’homologation au niveau européen sera allégé. Les Etats seront confrontés directement aux industriels du secteur, tel Monsanto. On sait bien que, dans ce cas, les risques sont grands de voir des Etats accepter la politique des entreprises de biotechnologies, alors que l’expertise réalisée en amont permet de bloquer l’introduction des OGM

Cette nouvelle procédure va renforcer l’opacité, chaque Etat membre de l’UE négociant sans se soucier du voisin. Si les Etats ont désormais le pouvoir de bannir les OGM, ils devront le faire sur la base de motivations élargies, comme l’éthique, l’atteinte à l’ordre public, ou des motifs socio-économiques… Mais en excluant les raisons les plus évidentes : la santé et l’environnement. Comprenne qui pourra !

De plus, comme dans le cas du futur traité transatlantique - cet accord n’en est que la préfiguration –, sur la base de motifs donnés, les grands semenciers pourront se livrer à une multiplication de poursuites judiciaires.

Depuis quinze ans, le compromis qui existait entre les Etats qui refusent les OGM, comme la France ou l’Allemagne, et ceux qui les ont introduits, comme l’Espagne ou la Roumanie, s’était résolu par un blocage de fait. Avec la nouvelle réglementation, ce verrou sautera.

La commission européenne, qui a toujours soutenu de fait le développement des OGM contre la volonté des Etats, s’empresse d’autoriser un nouveau maïs transgénique : le TC1507. Alors que d’autres demandes se bousculent déjà au portillon… Et tout ça, à peine trois semaines après les élections européennes !

Le poids des lobbies

Pourquoi la France qui, sous Sarkozy comme sous Hollande, a toujours tenu une position ferme sur le sujet, a-t-elle soudain basculé en avalisant cet accord qui ressemble à une capitulation en rase campagne ? Est-ce la vision de la nouvelle ministre, Ségolène Royal, dont l’adversaire principal est « l’écologie punitive », qui s’est imposée au gouvernement, ou, comme l’explique José Bové, les changements constants de cabinets ministériels depuis trois ans qui ne facilitent pas la continuité de notre politique en la matière ?

Ne faut-il pas y voir, plus banalement et plus cyniquement, une victoire du lobby des OGM et des biotechnologies, qui mène un combat acharné contre les associations et la Confédération paysanne pour imposer la culture en plein champ ?

L’affaire est suffisamment grave pour que nous nous ressaisissions et vite. Le nouvel accord doit être soumis au Parlement européen mais, avec la vague europhobe et l’arrivée de nouveaux députés peu au fait de ces débats, nous ne pouvons pas compter sur ce seul recours.

C’est sur chaque territoire que nous devons sonner le tocsin. Les OGM, comme le gaz de schiste et le nucléaire, sont aussi des marqueurs des avancées et des reculs du mouvement écologiste.

Certains estiment que la bataille de la « compétitivité » passe par la liquidation des acquis du mouvement, perçus comme autant de freins à la relance de leur mythique « croissance ». A nous, en nous mobilisant avec et autour des « faucheurs », de leur démontrer que nous ne lâcherons rien.

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