POLITIQUE - Dix jours après l'ultimatum adressé par les jihadistes de l'Etat islamique (EI) aux chrétiens d'Irak, la mobilisation en faveur de cette population persécutée gagne petit à petit du terrain en France. Un combat porté par la communauté assyro-chaldéenne, réunie au sein du Comité de soutien aux chrétiens d'Irak (CSCI), et relayé par un nombre croissant d'élus dépassant le cercle de la droite catholique.
Ce week-end, plusieurs rassemblements de soutien sont organisés pour contraindre le gouvernement à venir en aide aux quelques centaines de milliers de chrétiens irakiens, forcés de quitter leur domicile ou d'abjurer leur foi sous la menace des islamistes.
La première, organisée par la communauté assyro-chaldéenne, se tiendra à 15 heures près de la cathédrale de Lyon en présence de l’archevêque, le cardinal Barbarin, qui lira à cette occasion un message du Patriarche Chaldéen Louis-Raphaël Sako. Le Cardinal Barbarin, qui doit partir en Irak lundi, présidera dimanche une "Messe pour la Paix" en fin de matinée, à la basilique de Fourvière, à Lyon.
Le même jour à 17h, le CSCI appelle à un rassemblement devant la cathédrale Notre-Dame de Paris, manifestation à laquelle pourraient se joindre plusieurs députés.
Un autre rassemblement de soutien aux chrétiens d'Irak était programmé samedi à 14h devant le Trocadéro à Paris. Mais le CSCI a tenu à se désolidariser de la manifestation, organisée par des personnalités proches du Front national. Dans un communiqué, la fédération parisienne du FN a en effet invité tous ses sympathisants à venir défiler "flamme à la boutonnière".
"La communauté assyro-chaldéenne est attachée aux valeurs de la République. Nous ne voulons pas être récupérés par l'extrême droite ni par quiconque", a assuré au HuffPost le porte-parole du CSCI Antoni Yalap. Créé au début du mois de juillet alors que les jihadistes faisaient le siège de Mossoul, deuxième ville d'Irak qui abrite la plus importante communauté chrétienne, le CSCI, qui se veut apolitique, assure vouloir sensibiliser les élus de tous bords aux persécutions que subissent des populations déjà fragilisées par la guerre.
La droite chrétienne et l'UMP en pointe
Comme bien souvent s'agissant de la défense des minorités judéo-chrétiennes, ce combat a très vite trouvé un écho favorable dans les milieux proches de la droite catholique. A l'automne dernier, plusieurs responsables de l'UMP s'étaient déjà alarmés du sort réservé aux chrétiens d'Orient, entraînant la création de la Coordination Chrétiens d'Orient en Danger sous la houlette du conseiller régional Patrick Karam.
Le 1er juillet, le député UMP de Paris Claude Goasguen a remis le sujet sur la table en interpellant le gouvernement pour dénoncer le "grand silence sur le massacre des chrétiens d'Orient".
D'autres parlementaires UMP ou divers droite lui ont emboîté le pas, à l'image des députés de Vendée Yannick Moreau, Véronique Besse et le sénateur Bruno Retailleau. Les députées Valérie Pécresse et Valérie Boyer ont également réaffirmé leur soutien à cette cause, tout comme le député UMP des Français de l’étranger en Afrique et au Moyen-Orient, Alain Marsaud.
Le député UMP Axel Poniatowski, vice-président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée, est allé jusqu'à réclamer "la création d'un pont aérien humanitaire" pour les chrétiens d'Irak et "éviter un massacre annoncé". Son collègue, Hervé Mariton, proche de la Manif pour tous, dénonce quant à lui "une épuration".
Une vingtaine d'entre eux, dont les anciennes ministres Rachida Dati et Christine Boutin, ont signé ce vendredi une tribune dans Valeurs Actuelles en faveur d'un "enjeu civilisationnel de première importance".
Un front transpartisan éclipsé par le conflit israélo-palestinien
Alors, la défense des chrétiens d'Irak, un combat de droite? "C'est une vue de l'esprit", assure-t-on au CSCI. Si l'engagement pro-palestinien de certains partis de gauche a pu focaliser l'attention des médias, la cause des chrétiens d'Irak dépasserait très largement le cercle de la droite chrétienne-démocrate.
François Pupponi, député-maire PS de Sarcelles, figure ainsi parmi les élus les plus impliqués. Il faut dire que la ville compte une forte communauté assyro-chaldéenne, près d'un quart des 20.000 personnes revendiquées par les associations. Sarcelles fut également la première à ériger une stèle à la mémoire des martyrs de la communauté.
Autre soutien affiché des chrétiens d'Irak, le député Henri Jibrayel, ancien candidat malheureux à la primaire socialiste à Marseille. Tous deux ont reçu, avec l'UMP Valérie Boyer, une délégation assyro-chaldéenne le 8 juillet dernier.
Le député socialiste du Cher, Yann Galut, a lui aussi récemment rejoint un rassemblement de soutien transpartisan devant l'Assemblée nationale. "La représentation nationale dans l'ensemble de sa palette républicaine doit se mobiliser, alerter et exiger de la communauté internationale une réponse", a-t-il confié au Figaro. En juin, plus de 110 parlementaires de gauche comme de droite ont soutenu la création d'un groupe d'étude sur les chrétiens d'Orient à l'Assemblée nationale.
"Nous avons des contacts avec le cabinet de Mme Hidalgo à Paris, Cécile Duflot a tweeté son soutien aux chrétiens... Notre but est de sensibiliser tous les politiques, quel que soit leur bord", martèle Antoni Yalap, lui-même conseiller municipal à Sarcelles.
Avec un objectif commun: obtenir du gouvernement qu'il porte et impose un sursaut de la communauté internationale en faveur des populations persécutées.