Partager
Économie

Pourquoi l'Etat a besoin d'inflation pour réduire ses dépenses

Le ministre des Finances l'a reconnu mardi, une hausse des prix à 0,5% par an ne permet plus à la France de tenir ses engagements budgétaires. Explication.
1 réaction
Manuel Valls et Michel Sapin
Manuel Valls et Michel Sapin
JOEL SAGET / AFP

Le compte n’y est pas et c’est le ministre des Finances qui le dit. Dans un entretien à l’AFP mardi 2 septembre, Michel Sapin a déclaré tout de go que l'objectif de réaliser 21 milliards d'économies dans la dépense publique en 2015 serait revu à la baisse.  "On ne peut pas avoir les mêmes objectifs avec une inflation qui devient très faible", a reconnu le ministre: "l'année prochaine par exemple, là où, sur une hypothèse d'inflation de 1,5%, on faisait au-delà d'un milliard d'économies, par le seul gel de prestations, aujourd'hui ces économies sont remises en cause". Or Bercy ne compte pas compenser avec de nouvelles mesures de restrictions: "rajouter des économies ne me paraîtrait pas adapté à la situation", a-t-il dit.

Un plaidoyer qui vise Bruxelles

Ce "coming out" est destiné à préparer le terrain alors que le gouvernement doit présenter le 12 septembre au Haut Conseil des Finances publiques les options choisies pour la réduction des déficits et le rythme des économies, avant de dévoiler la loi de Finances 2015 en Conseil des ministres le 24 septembre. Surtout, il s’agit d’envoyer un SOS à Bruxelles. Déjà, suite à la révision mi-août de la prévision de croissance française de 1% à 0,5% pour 2014 et autour de 1% (contre 1,7% prévu initialement) en 2015, Sapin avait averti que, du coup, il estimait que le déficit public allait se situer au-dessus de 4% cette année (contre 3,8% prévu), laissant planer un doute sur le maintien de l’objectif de 3% en 2015 promis à la Commission européenne.

Là, "on découvre un autre sujet qui finit par être aussi bouleversant pour les budgets que la faible croissance, c'est la faible inflation", explique le ministre, qui plaide pour que "ceci soit pris en compte et que des décisions soient prises" au niveau européen. De fait, le programme de stabilité 2014-2017 reposait sur des hypothèses d'inflation  de 1,2% en 2014 et 1,5% en 2015, bien trop élevées par rapport à l'évolution actuelle (de +0,5% sur douze mois à fin juillet).

En quoi économies et inflation sont-ils liés? 

L’argument de Sapin est-il fondé ? La très faible inflation porte effectivement un coup aux efforts d’économies du gouvernement. Car, il faut le rappeler, les "économies" mentionnées ne sont pas des coupes dans les dépenses mais plutôt un frein à leur progression naturelle… calculée en tenant compte de l’inflation. Quand les dépenses sont stables et l'inflation élevée, les économies sont fortes. Mais plus l'inflation est faible, moins les économies sont apparentes.

Ainsi, les plus "simples" des coups de rabot, comme le gel des salaires des fonctionnaires et des pensions des retraités, deviennent quasi-inopérantes. De même, les enveloppes de crédits des ministères et administrations sont fixées en tenant compte de l’inflation prévue (soit 1,3%). Leurs plafonds de dépenses ont été baissés mais si l’inflation est moindre, leur contrainte d’économies est moins rude.

Comment financer les baisses d'impôts?

Cependant, pour Gilles Carrez, président UMP de la Commission des finances à l’Assemblée, qui s'exprimait hier sur BFM Business cette correction tient de la "manipulation", un "prétexte" trouvé par le gouvernement qui n’aurait jamais réellement voulu faire le montant d'économies promis. L'affirmation peut sembler sévère mais il est vrai que l’exécutif a tendance à dériver par rapport à son sérieux budgétaire affiché.

Les mesures annoncées par Manuel Valls vendredi pour relancer le secteur de la construction pourraient ainsi coûter au moins 1 milliard d’euros l’an prochain. Et le chef de l'Etat comme le Premier ministre ont aussi promis à plusieurs reprises une baisse d’impôts pour les ménages modestes et les classes moyennes à partir de 2015. Comment ces dépenses nouvelles seront-elles financées alors que le gouvernement peine déjà à respecter son plan de marche d’économies de 50 milliards d’ici 2017… et ne compte en aucun cas aller au-delà ?

 

1 réaction 1 réaction

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite TOUT savoir de l’actualité et je veux recevoir chaque alerte

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Entreprise
Politique
Économie
Automobile
Monde
Je ne souhaite plus recevoir de notifications