Le gouvernement a-t-il viré sa cuti sur le Pacte de responsabilité et son dispositif phare, le CICE? Depuis janvier, Bercy défend coûte que coûte sa politique de l'offre, pour relancer l'économie et l'embauche. Mais Michel Sapin, pendant sa visite de la société Broc Service Frais à Feyzin ce vendredi 5 septembre, a dit qu'il ne faut pas attendre d'effet direct du crédit d'impôt sur les embauches. "Ce n'est pas comme ça que fonctionne l'économie, ce n'est pas comme ça que fonctionne une entreprise", a ajouté le ministre des Finances. Ces propos tranchent sensiblement avec la position défendue par le gouvernement depuis neuf mois, mais semblent davantage en phase avec la réalité des négociations de branches.

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Le Pacte de responsabilité vole-t-il en éclat?

Au moment de la présentation du Pacte de responsabilité, François Hollande s'était montré on ne peut plus clair. D'un côté, l'exécutif abaissait les charges des entreprises. De l'autre, ces dernières devaient tenir des engagements clairs, précis et chiffrés sur les créations d'emplois. En dépit de nombreuses contestations du patronat, le gouvernement n'a jamais remis en cause cette ligne directrice... jusqu'à aujourd'hui. Même si, le 22 août, François Hollande avait déjà prévenu, dans le cadre d'une interview au Monde, que le Pacte de responsabilité pourrait n'avoir d'effets qu'à moyen terme".

Un calendrier délicat

Autre source d'étonnement: le moment choisi par le ministre des Finances pour s'autoriser de telles confessions. Le 10 septembre prochain, François Rebsamen doit en effet recevoir au ministère du Travail les représentants des 50 principales branches professionnelles. Au menu de cette réunion: l'évaluation de l'avancée des négociations du Pacte.

Un premier point d'étape prévu en juin dernier dans le cadre de la conférence sociale a déjà été repoussé. A l'époque, le président de la République invitait les partenaires sociaux à accélérer les discussions pour concrétiser sa politique économique.

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Un message brouillé

C'est donc également du point de vue de la communication que le discours de Michel Sapin surprend. Comment le gouvernement pourra-t-il encore réclamer dès maintenant des contreparties chiffrées aux représentants patronaux? Les contreparties, ce terme honni par le Medef, qui ne l'a jamais repris à son compte. Jean-François Roubaud, le président de la CGPME, a lui aussi toujours fait preuve d'un certain scepticisme quant aux effets du Pacte à court terme. Le 19 août, ce dernier confiait ainsi à L'Entreprise qu'à lui seul, le CICE ne permet pas aux petites entreprises d'investir, d'embaucher".

Ce vendredi 5 septembre, le Medef a comptabilisé 47 branches "mobilisées" dans le cadre des négociations. Une formulation difficilement appréhendable, susceptible de recouper des situations très diverses (premières réunions lancées, feuille de route fixée, etc). En juillet dernier, L'Entreprise a sondé les principales branches pour mieux cerner l'avancée des discussions et les sujets évoqués. Apparaissait alors un retard évident sur le calendrier initial. Mais surtout, les créations d'emplois nets n'étaient que rarement débattues.

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Comment justifier ces déclarations?

Le contexte économique est plus que délicat pour l'exécutif. Croissance en berne, chômage en hausse, aucun indicateur n'invite à l'optimisme. Mais surtout, la mission d'évaluation du CICE doit présenter à la fin du mois un rapport sur l'efficacité du dispositif, forcément attendu. C'est d'autant plus vrai que le 15 juillet dernier, une mission d'information du Sénat s'est montrée incapable de s'entendre au sujet de l'impact du Pacte de responsabilité sur l'emploi. "Il y a des entreprises qui grâce au CICE ne vont pas créer un emploi, vont éviter d'en détruire, vous ne pouvez pas avoir un modèle unique", tempère ce vendredi Michel Sapin. Pour mieux prendre les devants?

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